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Ouverture de l’accès aérien: entre les intérêts du tourisme et d’Air Mauritius

Les intervenants dans ce dossier sur l’ouverture du ciel mauricien à d’autres compagnies aériennes sont unanimes que l’objectif principal est d’accroître le nombre de touristes pour consolider ce pilier de l’économie. Cette semaine, Xavier-Luc Duval, Premier ministre adjoint, s’est réjoui que le nombre de visiteurs venant de l’Europe de l’Est a connu une croissance exponentielle en mai 2016. Le gouvernement s’attend à une percée en Asie du Sud-Est avec la venue d’AirAsia X en octobre. Face à l’intérêt du secteur touristique concernant l’ouverture du ciel mauricien à d’autres compagnies d’aviation, certains évoquent en parallèle l’enthousiasme d’Air Mauritius, le transporteur national. Que ce soit Arjoon Suddhoo ou Bissoon Mungroo, respectivement son président du conseil d’administration et son directeur et président de l’association des hôtels de charme de l’île Maurice (Ahcim), reconnaissent l’importance de l’ouverture de l’accès aérien, tout en précisant que « l’intérêt d’Air Mauritius doit primer ». Sen Ramsamy, directeur de Tourism Business Intelligence, pense qu’une compagnie aérienne ne peut se replier sur elle-même pour faire du progrès. À son avis, de belles perspectives de développement vont s’ouvrir pour Air Mauritius qui lui permettront de reprendre de l’altitude et d’avoir fière allure dans le ciel. L’ouverture du ciel a permis à Maurice de faire une percée sur le marché de l’Europe de l’Est. C’est ce qui ressort des dernières statistiques rendues publiques, cette semaine, par le ministère du Tourisme. La hausse la plus spectaculaire concerne la Turquie, avec 1 800 visiteurs en mai, soit une augmentation de 859 %. Suivie de la Roumanie, avec une hausse de 150 % dans les arrivées, avec 1 400 touristes, ceux en provenance de Hongrie passe à 1 450, soit une hausse de 107 %, ou encore une croissance de 57,3 % pour Ukraine, avec 1 900 visiteurs. Cela grâce à Turkish Airlines qui dessert la destination mauricienne depuis le 15 décembre 2015. Xavier-Luc Duval, Premier ministre adjoint, attribue cette bonne performance à un « ciblage intelligent des marchés émergents et une forte coopération des secteurs privé-public, nous maintenons une hausse proche de 10 % ». Maurice a accueilli 94 830 touristes en mai 2016 comparé à 87 000 en mai 2015, soit une hausse de 8,9 %. « Nous sommes très heureux de constater une croissance (dans les arrivées touristiques) de 8,9 % en mai. La majorité des visiteurs viennent d’Europe, principalement d’Allemagne et d’Italie, surtout des pays de l’Europe de l’Est qui sont des marchés émergents pour Maurice. Tout cela s’annonce très prometteur pour le reste de l’année », a déclaré Xavier-Luc Duval. [lptw_table id="32374" style="material-blue"] [row custom_class=""][/row]  
 

Sen Ramsamy, directeur de Tourism Business Intelligence: « L’accès aérien peut nous ouvrir une mine d’or »

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/div> Faut-il continuer à ouvrir l’espace aérien ? Les autorités ont commencé une ouverture prudente et réfléchie de notre espace aérien depuis 2015. Ajouter à cela, un corridor aérien entre l’Asie et l’Afrique prend forme et il commence à donner des résultats, avec l’arrivée prochaine d’AirAsia. Je pense qu’il nous faut continuer à ouvrir davantage notre espace aérien, si on veut que notre progrès économique et social atteigne sa vitesse de croisière. L’accès aérien peut nous ouvrir une mine d’or sur les plans commercial, économique, technologique et social. La gestion de notre espace aérien doit aussi se faire avec une vision à long terme. Il est primordial que cette démarche soit pérenne en mettant en place une structure permanente et professionnelle, une ‘Air Access Development Unit’ sous l’ombrelle du Prime Minister’s Office, avec des spécialistes du métier à plein temps, afin de mieux planifier la connectivité aérienne de Maurice avec le monde extérieur, développer durablement cet espace et créer plus d’opportunités et de richesse pour le pays. Quels sont les avantages pour le pays ? Déjà les retombées touristiques et économiques de cette stratégie d’ouverture ne se sont pas fait attendre car une forte croissance est enregistrée dans les arrivées touristiques à Maurice depuis l’année dernière. Cette année encore,  il y aura un record dans les arrivées des touristes et donc une augmentation importante dans les recettes. De facto, il y aura davantage d’effets multiplicateurs qui stimuleront notre économie, l’entrepreneuriat et surtout la création d’emplois directs et indirects au bénéfice de la population locale. Il faut attirer plus de voyageurs chez nous pour faire du business, du shopping à plus grande échelle, assister à des conférences internationales de haut niveau et les hôtels seront remplis à prix fort. Il sera aussi question d’un nouvel élan aux secteurs, tels que l’éducation, la santé, la technologie et la coopération intra et interrégionale. Il y aura aussi un ‘boost’ considérable au fret aérien et maritime, le secteur de la logistique, des transports, de l’énergie, parmi tant d’autres. Est-ce une menace pour Air Mauritius ? Pas du tout ! Au contraire, je trouve que nous allons plutôt ouvrir de belles perspectives de développement pour Air Mauritius et il permettrait aussi à notre ‘paille-en-queue’ de redorer son image après des années de stagnation, d’incertitude et de pertes. Ce sera une opportunité pour le transporteur national de reprendre de l’altitude et avoir fière allure dans le ciel. Ayant déjà collaboré avec le tandem Arjoon Suddhoo-Meg Pillay par le passé, je suis confiant de la nouvelle santé de la compagnie nationale qui est maintenant sur la bonne voie et qui saurait prendre de nouvelles initiatives pour devenir un instrument de développement incontournable dans cette partie du monde, surtout avec l’émergence d’une nouvelle île Maurice économiquement palpitante et professionnellement audacieuse. Savez-vous que dans un rayon de seulement sept heures de vol de Maurice, on peut toucher plus de deux milliards d’habitants de la région. C’est colossal comme opportunité d’affaires pour tout projet de ligne aérienne régionale, qu’elle soit d’Air Mauritius ou des îles Vanille. Si nous ne faisons rien, quelqu’un d’autre le fera avec l’aide des prédateurs du ciel. Une compagnie aérienne ne peut se replier sur elle-même pour faire du progrès. Faut-il privilégier l’intérêt d’une compagnie avant celui du pays ? Je n’ai jamais cru dans cette thèse qui nous fait croire qu’en privilégiant l’intérêt du pays, on va devoir sacrifier celui de la compagnie nationale. Loin de là. En privilégiant l’intérêt du pays on privilégie aussi le destin de sa ligne aérienne. On a qu’à voir ce qui se passe à Singapour avec son Singapore Airline, Hong Kong et son Cathay Pacific, Dubayy et son Emirates Airline, pour ne citer que ces trois exemples, afin de faire comprendre que le destin de l’un est étroitement lié à celui de l’autre. Ils sont tous des économies flamboyantes, des destinations attrayantes et leurs compagnies aériennes resplendissantes, parmi les meilleures au monde. Quand un pays offre de multiples bonnes raisons aux voyageurs, pour des vacances, ou le shopping ou encore pour faire du business, on crée ainsi la masse critique nécessaire pour l’aérien et d’autres se bousculeront sans doute pour se faire une place au soleil. Il faut toutefois que la gestion de l’espace aérien, d’une part, et celle de la compagnie aérienne nationale, d’autre part, soient faites par de vrais professionnels qui ont du ‘business flair’ et qui comprennent l’importance du rapport qualité-prix, et le besoin d’innovation dans l’offre aérienne. Soyons honnêtes, nous savons que pendant de nombreuses années, Air Mauritius a toujours été privilégiée par les différents gouvernements. Ce n’est pas pour autant que la compagnie aérienne a été profitable. Au contraire, au fil des années, elle a perdu de son ‘shine’. Donc, c’est une question de professionnalisme, de vision partagée et de synergie dans l’action des uns et des autres. Mais aussi de discipline et de rigueur à tous les niveaux.  
 

Bissoon Mungroo: « Il ne faut pas brader notre destination »

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Plus de touristes ne veut pas forcément dire plus d’argent pour le pays. C’est du moins l’avis du président de l’Association des hôtels de charme de l’île Maurice (Ahcim) et directeur d’Air Mauritius. Ainsi, tout en se disant en faveur de l’ouverture de l’espace aérien, il se dit toutefois contre toute « braderie » de la destination mauricienne. Bissoon Mungroo indique que l’ouverture de l’espace aérien est une bonne chose, mais qu’il faut faire attention à ne pas « brader » notre destination. « Il faut éviter que Maurice ne devienne comme Goa en Inde. Par le passé, lorsqu’il était question de libéraliser notre espace aérien, il y avait toute une procédure et une étude de marché à adopter. L’objectif étant d’attirer des touristes haut de gamme. Je suis contre l’arrivée de compagnies aériennes à Maurice, transportant des touristes en tout genre. La crainte, c’est que demain, nous perdons cette étiquette de destination haut de gamme. Il faudra alors doubler le nombre de touristes pour obtenir les mêmes recettes et cela n’est pas envisageable. » D’ailleurs, selon notre intervenant, certains opérateurs hôteliers commencent déjà à faire les frais de ce phénomène. « Par exemple, un hôtel 4-étoiles propose une chambre double à environ Rs 4 500. Les petits hôtels offrent la moitié de ce prix dans l’objectif d’attirer des clients. Rs 2 000 à Rs 2 500 une chambre double est le prix que nous pratiquions dans les années 90. On se retrouve ainsi 20 ans en arrière. Ce qui m’amène à dire que ce n’est pas le nombre de touristes qui compte, mais la qualité », poursuit ce directeur d’Air Mauritius. Toutefois, l’arrivée de compagnies d’aviation ‘low cost’ à Maurice, à en croire Bissoon Mungroo, ne serait pas une menace directe pour Air Mauritius. « À condition que MK conforte sa position dans le grand marché européen et de maintenir Maurice comme une destination haut de gamme. Cette clientèle haut de gamme ne voyagera pas à bord d’une compagnie ‘low cost’. » Le président de l’Ahcim est aussi d’avis que ce type de compagnies d’aviation ne fera pas long feu, n’étant rentables que pendant la période de pointe. « Cela avait été le cas avec Virgin Airlines, parmi d’autres compagnies, qui a cessé ses opérations aussitôt que nous sommes entrées en basse saison. Mais MK a continué à desservir ces destinations, malgré des pertes parfois, mais aujourd’hui cela porte ces fruits. Non seulement ces lignes sont devenues rentables, mais il y aussi une croissance de clientèle. »  
 

Arjoon Suddhoo: « Air Mauritius a un marché à préserver afin de rester profitable »

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Le président du conseil d’administration d’Air Mauritius estime que l’ouverture de l’espace aérien doit être une priorité pour tous les gouvernements. « Si nous souhaitons développer davantage notre pays, l’ouverture de l’espace aérien demeure une de nos priorités. D’ailleurs, la connexion, c’est l’avenir. Aujourd’hui, les trois connexions les plus importantes dans le monde sont Internet, la connexion maritime et la connexion aérienne. L’ouverture de l’accès aérien est donc une priorité pour tous les gouvernements », fait valoir Arjoon Suddhoo, président du conseil d’administration d’Air Mauritius. Ainsi, l’arrivée de plusieurs compagnies d’aviation à Maurice ne serait pas une menace pour Air Mauritius, selon Arjoon Suddhoo, qui dit croire dans la « coopération ». L’objectif principal étant d’augmenter le nombre de passagers. « Air Mauritius a un marché à préserver, afin de rester profitable, qui est un élément essentiel et que l’on doit de s’assurer. Ainsi, l’intérêt d’Air Mauritius doit primer, sans toutefois fermer notre espace aérien. Ce qu’il nous faut, c’est une vision plus large et voir comment on peut intégrer le transporteur national dans le plan stratégique de l’ouverture de l’espace aérien, tout en restant profitable. » Arjoon Suddhoo est catégorique. L’arrivée de compagnies ‘low cost’ n’est nullement un problème. Ce sont les clients, dit-il, qui auront à choisir. « Air Mauritius est un ‘full service provider’. Alors qu’avec une société dite ‘low cost’, cela coûte relativement bon marché, certes, mais il faut débourser des sommes additionnelles pour les bagages, les repas et d’autres services. C’est le client qui aura à décider s’il souhaite faire 7-8 heures de voyage sur un siège différent de celui d’un prestataire de services complets. C’est le client qui, une fois encore, aura à juger s’il obtient ‘value for money’. Toutefois, tout cela n’est point une raison pour fermer notre espace aérien à ces compagnies. Au contraire, il faut pouvoir situer la profitabilité d’Air Mauritius parmi tous ces éléments. »
 

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