La Librairie Nationale de Maurice, véritable mémoire vivante de l’île, innove pour préserver 750 000 trésors écrits. Entre numérisation avancée et projets ambitieux, elle connecte le passé au futur.
Depuis plus de 20 ans, la Librairie Nationale de Maurice veille sur l’histoire écrite de l’île. Mais aujourd’hui, face au manque d’espace et à une numérisation qui peine à suivre le rythme, cette institution incontournable se réinvente pour relever des défis de taille.
L’idée d’une Librairie Nationale remonte à 1956, lorsque le Dr Auguste Toussaint propose ce projet ambitieux. Il faut cependant patienter jusqu’en 1996 pour que le National Library Act No. 32 soit adopté, établissant officiellement l’institution sous la tutelle du ministère des Arts et de la Culture. Trois ans plus tard, en décembre 1999, ses portes s’ouvrent enfin au public, marquant une étape décisive pour la préservation du patrimoine littéraire et culturel de Maurice.
La Librairie Nationale conserve une collection unique, enrichie par le système de dépôt légal, qui oblige les éditeurs locaux à fournir six exemplaires de chaque publication. Aujourd’hui, plus de 750 000 documents y sont répertoriés, allant des livres aux journaux, en passant par des manuscrits rares. Chaque année, cette collection s’agrandit de 10 %, ce qui accentue un problème déjà pressant : le manque d’espace.
Parmi les trésors conservés figurent des journaux historiques comme La Balance et Le Cernéen datant de 1832. Cependant, des lacunes subsistent pour certaines périodes, notamment entre 1800 et 1900. « Nous espérons combler ces vides grâce à des partenariats et des dons », explique Belinda Ramnauth, directrice de l’institution.
Depuis 2019, un effort considérable a été entrepris pour moderniser les infrastructures. L’acquisition d’un scanner A0, capable de numériser 500 pages par jour, représente une avancée majeure. « La numérisation est essentielle pour préserver des documents vieux de plus de 200 ans », souligne Belinda Ramnauth.
Chaque document numérisé est enrichi de métadonnées et indexé grâce à un système de reconnaissance optique des caractères (OCR). Ces archives digitalisées sont désormais accessibles via un portail en ligne, permettant une recherche simplifiée à partir de mots-clés. « Ce portail est une révolution pour les chercheurs, offrant un accès immédiat aux ressources, où qu’ils se trouvent », précise un responsable de la Librairie.
La Librairie Nationale ne se limite pas aux écrits. Une médiathèque propose une vaste collection de CD, DVD et autres supports audiovisuels. Depuis 2021, une section dédiée à la numérisation a vu le jour, permettant aux utilisateurs de consulter des documents tout en préservant leur version originale.
Parallèlement, l’institution multiplie les collaborations internationales avec des pays comme l’Inde, la Chine, la Russie et le Pakistan. Ces partenariats enrichissent les collections et contribuent à l’installation de « corners » culturels dédiés à chaque nation. « Lorsque nous aurons de nouveaux locaux, nous prévoyons d’ouvrir une section dédiée aux collections internationales. Cela renforcera le statut de la Librairie comme un centre de référence à l’échelle mondiale », précise Belinda Ramnauth.
Malgré ses contraintes d’espace, la Librairie Nationale rêve grand. Parmi ses projets phares figure la création d’une unité de restauration, un véritable « hôpital des livres » destiné à protéger les ouvrages les plus fragiles. L’objectif est clair : préserver ces témoins du passé pour les générations futures. En attendant, la Librairie Nationale continue d’accueillir chercheurs, historiens et amateurs de culture.
Plus qu’un lieu de stockage, elle incarne la mémoire collective de Maurice, un pont entre l’héritage du passé et les promesses de l’avenir.
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