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À la recherche de nouveaux leaders politiques

Patrick Belcourt, Milan Meetarbhan et Lindsay Rivière

La population se pose aujourd’hui la question de l’émergence d’un nouveau leader politique, 55 ans après l’indépendance de Maurice. D’où devrait-il provenir ? Quelles valeurs et idées devrait-il incarner ? C’est une réflexion qui s’inscrit dans le contexte de la volonté de nombreux citoyens de voir opérer une rupture dans la manière dont le pays est géré à tous les niveaux.

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Un profond désir de changement en matière de leadership politique se manifeste avec vigueur, comme en témoigne un sondage récent commandité par le journal l’express, révélant que 76 % des personnes interrogées aspirent à l’avènement d’un nouveau leader politique. Cette situation suscite un débat sur l’origine possible de ce futur leader : émergera-t-il des partis politiques traditionnels ou des partis extraparlementaires en émergence ?
Cette envie de voir de nouveaux leaders est renforcée par l’émergence de personnalités charismatiques au sein des partis extraparlementaires. Des figures telles que Patrick Belcourt, Rama Valayden, ou encore Roshi Bhadain attirent un intérêt marqué sur les réseaux sociaux et dans les discussions politiques.

Cependant, ce sondage met aussi en lumière un autre aspect essentiel. Malgré l’engouement suscité par les partis extraparlementaires, ils n’obtiennent que de modestes intentions de vote, se situant entre 3 et 5 %. À l’inverse, les partis politiques traditionnels comme le Mouvement Militant Mauricien (MMM), le Parti Mauricien Social Démocrate (PMSD), le Mouvement Socialiste Militant (MSM), et le Parti travailliste, continuent de recueillir le plus d’intentions de vote dans l’électorat mauricien. Cette réalité pose une question cruciale : un nouveau leader politique, tel que souhaité par la population, doit-il émerger d’un parti traditionnel, ou est-il possible qu’une personnalité extraparlementaire puisse répondre à cette demande populaire ?

Pas de salut en dehors des grands partis

Pour de nombreux observateurs, le système électoral de Maurice est structuré de manière à favoriser l’émergence de leaders politiques au sein des partis traditionnels. En effet, le système électoral est conçu, selon eux, d’une manière où il est nécessaire d’obtenir environ 500 000 voix pour accéder au gouvernement. Une base de votes que les partis extraparlementaires sont encore loin de rassembler, malgré la popularité de leurs dirigeants sur les médias sociaux.

« J’ai toujours affirmé qu’à Maurice, il n’y avait pas de salut en dehors des grands partis politiques traditionnels en raison de notre système électoral. Je n’ai jamais cru en la viabilité des petits partis ni en l’existence d’une troisième voie possible », déclare l’observateur politique, Lindsay Rivière. « Le sondage confirme que les petits partis ne sont pas en voie de progression, et par conséquent, il ne faut pas chercher de nouveau leader national parmi ces nouvelles formations politiques », ajoute-t-il. 

Selon Lindsay Rivière, le futur leader politique ne peut émerger que des grands partis traditionnels (PTr, MMM ou PMSD). « Ainsi, face aux aspirations populaires, il revient à ces partis de promouvoir rapidement de potentiels successeurs, à l’instar de Joanna Bérenger, Adrien Duval, Arvin Boolell et Fabrice David, et d’autres. Les leaders traditionnels de l’opposition sont en place depuis 30 à 40 ans, il est grand temps de réfléchir à la relève au sein de l’ensemble des partis politiques », ajoute-t-il. 

Interrogé au sujet des personnalités politiques au sein des partis extraparlementaires émergents, Lindsay Rivière exprime son scepticisme en déclarant : « Je n’y crois pas du tout, pour la simple et bonne raison qu’ils sont des personnalités fortes mais n’ont pas d’ancrage national ». 
population vieillissante

Selon lui, Nando Bodha devrait rejoindre le MMM, Rama Valayden serait mieux placé au sein du PTr, et Roshi pourrait envisager un rôle dans l’un des autres grands partis politiques. 

Patrick Belcourt, leader du parti politique ‘En Avant Moris’, qui aspire à incarner ce renouveau du leadership politique, affirme, quant à lui, qu’il ne faut pas généraliser ce type de questionnement. « Les statistiques que vous évoquez ne peuvent pas rendre compte des réalités que l’on peut observer des partis extraparlementaires. Il y a le vœu de la population qui s’exprime massivement en faveur d’un renouveau du leadership politique et cela doit certainement nous interpeller. Mais il nous faut tenir compte du fait que nous avons une population vieillissante et, par conséquent, le poids du vote des +50 est un facteur à ne pas ignorer. On peut voir que le présent gouvernement est résolu à courtiser cette part de l’électorat et sa lecture du jugement du Privy Council ne semble pas le dissuader des promesses honteuses », ajoute-t-il.

En ce qui concerne les 3% d’intention de vote en faveur des partis extra parlementaires, Patrick Belcourt affirme que cela ne correspond à aucune réalité connue. « L’erreur tient du fait que la méthodologie classe les partis extraparlementaires à la même enseigne que les partis qui siègent au Parlement. Comment voulez-vous que les personnes sondées s’y retrouvent ? D’un côté, vous avez des partis qui ont des représentants à l’Assemblée nationale et l’électorat dispose ainsi de références personnelles dans pratiquement toutes les circonscriptions. De l’autre côté, vous avez des formations qui n’ont aucune inscription personnelle dans des circonscriptions », fait-il part. 

Renouvellement

Il fait aussi ressortir que son parti ‘En Avant Moris’ est la seule formation politique qui a annoncé ses trois candidats au No 19. « Nous le ferons en temps et lieu pour d’autres circonscriptions. Comment allez-vous nous évaluer sur la base de cette stratégie ? Je crois qu’il nous faut être raisonnable dans les interprétations. Il y a des représentations de la réalité que ce sondage peut fournir et il y a des réponses que ce sondage ne peut fournir. Repensez à la leçon qui nous a été infligée durant la pandémie : si vous acceptez qu’une quincaillerie livre des équipements médicaux, vous ne pourrez pas faire la distinction entre l’imbécile qui a passé la commande et les escrocs qui devaient assurer la livraison ! Pour un sondage, c’est pareil », conclut-il.

Selon l’observateur politique et constitutionnaliste, Milan Meetarbhan, il est tout à fait normal que la classe politique, tout comme d’autres secteurs comme l’éducation et l’économie, ait besoin de renouvellement. Cependant, selon lui, cela ne signifie pas nécessairement que les candidats qui se présenteront aux prochaines élections devraient immédiatement céder la place à de nouveaux leaders. « Il est légitime de souhaiter voir émerger de nouveaux leaders, mais cela doit se faire de manière réfléchie et progressive au sein des partis politiques en prévision des élections à venir », dit-il. 
En sus, au-delà de la nécessité de voir émerger un nouveau leader politique, Milan Meetarbhan préfère prôner le renouvellement des idées. « Le renouvellement des idées ne se produit pas automatiquement avec le remplacement des personnes. Lors des élections aux États-Unis, Bernie Sanders avait recueilli un soutien important malgré ses 80 ans, notamment de la part des jeunes, en proposant de nouvelles idées. Le renouvellement des idées est essentiel, car il ne faut pas préconiser la même chose en permanence, étant donné que le monde évolue ». 

Groupes sectaires

Idéalement, dit-il il faudrait un renouvellement tant au niveau des idées que des personnalités politiques, mais cela n’est pas toujours possible. Prenant l’exemple de la situation à Maurice, Milan Meetarbhan souligne que « si un leader politique continue de s’associer systématiquement à des groupes sectaires tout en étant plus jeune, cela peut être considéré comme passéiste et inadapté » à la politique actuelle. « En ce qui concerne le Parlement, il est important de noter que la qualité des débats parlementaires a évolué au fil du temps. Si l’on compare la période précédant l’indépendance à aujourd’hui, il y a eu une génération de politiciens postindépendance. Cependant, il est essentiel de se demander si ce renouvellement a réellement contribué à l’amélioration de la démocratie et à la qualité des débats politiques, ce qui soulève des questions importantes », dit-il.

 

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