Société

La force d’un handicap

Ils le disent souvent : leur handicap est une force. Difficile pour les bien-portants de comprendre. Cependant ils admirent ces handicapés qui excellent dans des domaines aussi variés que la musique ou le sport. Zoom sur le parcours de ces battants, une route semée d’obstacles où l’envie de réussir est plus forte que tout. Plus besoin de la présenter. S’il y a une personne du monde des handicapés qui est connue dans les quatre coins du pays, c’est bien Jane Constance, elle qui a remporté haut la main le concours de chants The Voice Kids en octobre 2015. Il y a surtout une phrase que les lecteurs du monde entier retiennent de son parcours : « C’est une force ! Je l’ai toujours dit. Je suis contente de ne pas voir parce que je ressens les choses différemment », a-t-elle confié aux journalistes du magazine Télé Star. Aujourd’hui, la demoiselle est une star. Toutefois, elle a toujours la tête bien sur les épaules. Ceux qui l’ont côtoyée savent qu’elle s’exprime toujours avec une aisance déconcertante et beaucoup de maturité. à sa manière, elle milite pour les aveugles et autres handicapés. « À chaque fois que Jane monte sur scène, elle transmet un message », disent ses amis. « Elle fait valoir qu’il ne faut pas mettre les handicapés à l’écart, mais leur donner les mêmes opportunités qu’aux autres citoyens pour qu’ils puissent s’épanouir. » Et si pour beaucoup, Jane est un exemple à suivre, pour l’adolescente, c’est simplement « le désir de partager sa passion pour la chanson, la musique, qui fait la différence ». Aujourd’hui, entre ses études et la musique, elle s’accroche en essayant de maintenir un juste équilibre avec le soutien indéfectible de ses parents. Une autre jeune femme porteuse de handicap brille, elle, sur la scène sportive grâce à l’appui de ces parents Jean-Alain et Nathalie. Elle se prénomme Noémie. Dans la famille Alphonse, elle est une étoile. Cette ex-élève du collège Lorette de Port-Louis a décidé de plonger à fond dans le sport depuis qu’elle a découvert, grâce à un ami, la course en fauteuil. C’était l’année dernière. Elle s’est entrainée sous la houlette de Jean-Marie Bhugeeratee et le coup d’essai s’est transformé en coup de maître. Après quelques mois d’entraînement, elle est revenue des Italian Open Athletic Championships avec une médaille d’or.

« Ils n’ont jamais eu honte de moi »

La jeune fille a même été récompensée en début d’année. Elle a été élue Sportswoman of the Year 2015 Handisport. « Je suis une battante, clame-t-elle haut et fort. J’ai la chance d’être en vie et rien que pour cette raison, je me donnerai toujours à fond dans tout ce que j’entreprends. Toute récompense que je reçois ne m’est pas seulement dédiée, elle va surtout à mes parents et grands- parents, mon coach, mes amis et autres athlètes, tous ceux qui m’encouragent et les enfants qui vivent comme moi en situation de handicap. » La jeune femme, qui habite Sainte-Croix avec ses parents, a subi sa toute première opération à l’âge de six mois. Elle porte une prothèse et affirme qu’elle a eu une enfance des plus normales. « Mes parents m’ont avant tout donné beaucoup d’amour. Ils n’ont jamais eu honte de moi. Ils ne m’ont pas gardée à la maison, mais ils m’ont mise en garde contre le regard des autres », affirme-t-elle. Cette année, son plus grand désir est de faire ses preuves aux Jeux paralympiques de Rio qui se tiendront en septembre. Pas trop loin de Sainte-Croix, à Triolet plus précisément, on retrouve un autre jeune homme en fauteuil roulant. Il a 12 ans et s’appelle Ahnas Abdool Careem. Il s’est fait connaître depuis la proclamation des résultats du Certificate of Primary Education en décrochant 24 unités. Ses parents affirment que le jeune garçon, handicapé depuis la naissance, a toujours travaillé dur pour obtenir d’excellents résultats. « Au début, aucune école primaire ne voulait accueillir un enfant handicapé. J’ai dû commencer à lui apprendre l’alphabet à la maison, puis heureusement que nous avons pu trouver une institution scolaire. Depuis, il a toujours eu de très bons résultats. » Ces parents modestes (le père est aide-maçon et la mère femme au foyer) ont alors tout sacrifié pour se consacrer au bien-être de leur fils. « Comme c’est difficile d’avoir un transport pour lui, je l’accompagnais à l’école à pied, nous raconte sa mère, alors que son père doit obligatoirement s’absenter du travail pour aller le quitter ou le récupérer. » Le jeune homme, qui n’est point timide, affirme que son handicap est loin d’être un obstacle. Aujourd’hui, il fréquente le collège Royal de Port-Louis. C’est un rêve devenu réalité. Il en caresse un autre : celui de devenir ingénieur informatique.
 

Ali et le poisson rouge

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"10414","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-18670","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Poisson Rouge"}}]] [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"10415","attributes":{"class":"media-image alignright size-full wp-image-18672","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"300","height":"303","alt":"Ali Asgar"}}]]Il était une fois, un petit garçon qui s’appelait Ali. Il vivait dans une petite maison avec ses parents. Sa vie n’était que joie et bonheur. Un jour à la télévision, il vit un dessin animé avec un joli poisson rouge dans un bocal. Cette image lui a tellement plu qu’il a voulu la conserver pour toujours et c’est ainsi qu’il a demandé à ses parents des crayons de couleurs et un cahier de dessin pour le dessiner. Ali était tout fier de son dessin et le montrait à tout le monde. Mais très vite, il a voulu en faire un autre. Il a donc choisi de dessiner le réveil de sa chambre, puis la maison du voisin qu’il voyait de sa fenêtre. Depuis ce jour, Ali dessine inlassablement : une église sur une boîte d’allumettes, une mosquée sur un calendrier, ou des bâtiments d’architecture coloniale qu’il voit pendant ses balades à Port-Louis, étant lui-même un habitant de Plaine-Verte. Ali a aujourd’hui 24 ans et expose parfois ses tableaux à la Galerie d’Art Amrita Dyalah de Grand- Baie. La plupart de ses toiles se sont vendues, le vernissage a été médiatisé par la presse écrite, la radio et la télé. Le témoignage d’Ali a ému tous ceux qui étaient présents à cet événement et ses œuvres sont si belles qu’on les dévore des yeux dans leurs moindres détails. « Du plus profond de mon cœur, je souhaite une longue carrière artistique à Ali Asghar Ramjaun », déclare Amrita Dyalah. Cette success story est d’autant plus extraordinaire qu’Ali est la première personne ayant une déficience intellectuelle à exposer ses œuvres à la Galerie d’Art Amrita Dyalah de Grand-Baie. Un exploit qui dépasse souvent les personnes qui ne sont pas handicapées. Cela s’est fait grâce à la Society for Living Angels, association de parents de handicapés. Cette association à but non lucratif a pour objectifs d’aider à l’épanouissement des handicapés mentaux de Sainte-Croix, d’améliorer leur bien-être et de professionnaliser leur prise en charge.
 

Yvan Ducasse: « Tout est une question d’accompagnement »

«Être parents, ce n’est pas une tâche facile. Mais être parents d’un enfant ayant une déficience nécessite plus de patience, de dévouement et d’amour. » C’est en substance ce que nous a confié Yvan Ducasse, , directeur de l’Observatoire mauricien des personnes en situation de handicap, lui-même parent d’un enfant handicapé. Il raconte comment les difficultés surgissaient chaque jour : « Votre vie devient un perpétuel combat. Mais si vous ne renoncez jamais à faire progresser votre enfant tout au long de ces années, il aura votre pugnacité comme exemple. Pétri dans cet amour incommensurable, cet enfant se servira de cet amour comme armure pour surmonter son handicap. » Pour notre interlocuteur, ce sera la force de cet enfant dans son combat de tous les jours, comme l’avaient fait ses parents auparavant. « Il sait qu’il ne pourra effacer son handicap, mais le surmontera pour mieux vivre et, pourquoi pas, réaliser des exploits. » On entend souvent des handicapés dire que leur handicap est une force. D’autres, au contraire, confient qu’ils ne parviennent pas à surmonter les épreuves de leur handicap. Où est donc la différence ? « L’OPSH a observé que la différence vient de l’accompagnement des handicapés, l’accompagnement des parents, des structures de soutien, l’offre médico-sociale, l’assistance financière, l’emploi et la formation, la scolarisation, le transport, l’accès au logement, à la culture, au sport professionnel et aux loisirs. » Ces dernières années, Jane Constance, Noémie Alphonse, Yaaseen Edoo, Aarthi Burtoly, Mervyn Anthony, Jonathan Leboeuf et quelques autres sont la preuve flagrante que les handicapés, s’ils sont bien entourés et bien accompagnés, peuvent exceller. Mais un tel accompagnement ne doit pas rester une exception : « Tous les handicapés doivent bénéficier des mêmes opportunités », martèle Yvan Ducasse . Ce dernier rappelle que le handicapé a des droits additionnels en vertu de sa situation exceptionnelle, conformément à la Déclaration des droits des personnes handicapées proclamée par l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies le 9 décembre 1975 [résolution 3447] clause 8 : Le handicapé a droit à ce que ses besoins particuliers soient pris en considération à tous les stades de la planification économique et sociale. Mais « bien souvent, l’indifférence découle de l’ignorance », déplore Yvan Ducasse.
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