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L'affaire Pravind Jugnauth soulève des questions sur la responsabilité et l'intégrité des politiciens et sur le rôle des fonctionnaires. Le gouvernement de l'Alliance du Changement a annoncé son intention d'introduire une Fiscal Responsibility Act pour renforcer la discipline budgétaire. Le point.
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Pour Michael Atchia, membre de Democracy Watch, l'idée d'une Fiscal Responsibility Act est intéressante, mais son impact dépendra entièrement de son contenu et de la volonté politique. « C’est une bonne idée. Une telle loi peut aider, mais tout dépend de son contenu. Il est essentiel que des experts qualifiés soient impliqués pour en faire un outil efficace et fonctionnel », explique-t-il.
Système défaillant
Pour Rajen Valayden, journaliste et observateur politique, le problème ne réside pas tant dans l'absence de lois, mais dans leur mise en application. « Il y a déjà beaucoup de lois en place, mais leur application pose un problème. Quand on regarde ce qui a été relevé dans certains procès, ce sont les failles juridiques qui permettent à certains de passer entre les mailles du filet », estime-t-il.
L'observateur met également en avant la complicité de certains hauts fonctionnaires. « Ceux qui sont censés appliquer la loi sont parfois complices. On assiste alors à des mises en scène, des simulacres de poursuites et de justice. » Il rappelle qu'aucun haut fonctionnaire n'a jamais été condamné par la justice pour corruption ou abus de pouvoir.
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Ce manque de responsabilisation fait poser des questions sur l'efficacité de l'État de droit à Maurice. « En France, un ancien Premier ministre a été condamné pour abus de biens sociaux dans le cadre du financement de sa campagne », indique Rajen Valayden. « Même s'il n'est pas allé en prison, il y a eu un procès, une application de la loi. »
Il ajoute que quand un politicien affirme que les institutions sont « pourries jusqu'à la moelle », la véritable question est de savoir si une nouvelle loi changera réellement la donne. « Ceux qui sont censés appliquer la loi et incarner les pouvoirs parlementaire, exécutif et judiciaire doivent être au-dessus de tout soupçon. Sinon, aucune loi ne pourra améliorer la situation. »
Pour lui, la création de nouvelles lois ne suffit pas. Maurice dispose déjà de législations sur le financement des partis politiques et sur la lutte contre le trafic de drogue, mais leur mise en application laisse à désirer. « Avant de promulguer une nouvelle loi, il faut comprendre pourquoi celles existantes ne fonctionnent pas. »
Multiples défis
Pour sa part, Faizal Jeeroburkhan, observateur politique, revient sur les défis que doit relever une loi pour la gestion des finances publiques dans le contexte économique actuel. Pour lui, son objectif principal est de garantir une gestion rigoureuse des finances publiques. Ce qui selon lui est une démarche fondamentale pour assurer la transparence et la bonne gouvernance dans la gestion des fonds publics. « Il est crucial de maintenir une stabilité financière à long terme pour éviter une accumulation excessive de dettes publiques, comme nous l’avons malheureusement observé récemment », souligne-t-il.
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Faizal Jeeroburkhan avance que les enjeux sont nombreux. Selon lui, un des défis majeurs réside dans les fluctuations imprévisibles des crises économiques mondiales. « La valeur de la monnaie, par exemple, peut augmenter brusquement, influençant ainsi notre budget national », précise-t-il. De plus, il évoque que la volatilité des prix des matières premières a un impact direct sur l’économie. Ce qui perturbe les prévisions budgétaires et exacerbe les tensions financières.
Pour lui, la gestion des finances publiques est d'autant plus complexe lorsqu'il y a des catastrophes naturelles. « Des crises comme la covid-19 peuvent entraîner une sous-estimation des prévisions fiscales, et si les prévisions sont trop optimistes, le pays risque de se retrouver avec un déficit budgétaire bien plus élevé que prévu. »
Gestion déficiente
Il poursuit que les conséquences de cette gestion déficiente sont tangibles, notamment dans le secteur des investissements publics. « Lorsque les finances publiques ne sont pas correctement gérées, il y a un impact directe sur les projets d’infrastructure et les programmes de développement », explique-t-il. La mise en œuvre de ces projets devient ainsi un défi si la surveillance et la gestion des fonds publics ne sont pas rigoureuses et efficaces.
« L’application des lois est essentielle et ce sont leurs paramètres qui détermineront leur efficacité », conclut-il.
Fiscal Responsability Act
Une Fiscal Responsibility Act est une législation adoptée par un gouvernement pour imposer des règles strictes sur la gestion des finances publiques. Son objectif principal est d'assurer la discipline budgétaire et de prévenir les déficits excessifs ou l'endettement incontrôlé de l'État.
Objectifs d'une Fiscal Responsibility Act
- Limiter les déficits budgétaires : Elle impose des plafonds sur le déficit public en pourcentage du PIB.
- Contrôler la dette publique : Elle fixe des seuils pour la dette publique et prévoit des mécanismes de réduction de l'endettement.
- Encadrer les dépenses publiques : Elle définit des règles pour limiter la croissance des dépenses de l'État.
- Assurer la transparence et la responsabilité : Elle oblige le gouvernement à publier régulièrement des rapports sur la gestion des finances publiques.
- Encourager la stabilité économique : En évitant des déficits excessifs, elle aide à prévenir les crises économiques et à maintenir la confiance des investisseurs.
Responsabilité budgétaire
Plusieurs pays ont adopté des lois qui encadrent la gestion des finances publiques et limitent les déficits.
- Tax Equity and Fiscal Responsibility Act (1982, États-Unis) : Votée sous Reagan, elle a augmenté certains impôts et elle réduit les dépenses pour limiter le déficit.
- Fiscal Responsibility Act (2007, États-Unis - Projet de loi) : Proposé pour contrôler les dépenses fédérales, mais jamais adopté.
- Fiscal Responsibility Act (2010, Royaume-Uni) : Elle imposait la réduction du déficit, mais elle a été abrogée en 2011.
- Fiscal Responsibility Act (2023, États-Unis) : Elle vise à plafonner la dette fédérale et à éviter un défaut de paiement.
- Fiscal Responsibility and Budget Management Act (2003, Inde) : Elle oblige le gouvernement à limiter le déficit et à garantir la transparence budgétaire.
(Source : Internet)
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