Les habitants de l’Est se disent prêts à affronter Cilida qui devrait, selon les prévisions, traverser cette partie du pays aux petites heures dimanche. Vendredi, ils étaient tous à pied d’œuvre, barricadant portes et fenêtres et nettoyant rivières et autres cours d’eau, pour éviter d’être inondés, comme cela avait été le cas lors des averses de lundi dernier…

Trempé jusqu’aux os, Yashwan Moheeputh (20 ans)nettoie la rivière d’Argy, à Flacq, à l’aide d’une fourche. Il enlève des fougères qui ont envahi le lit de la rivière au fil du temps. Le jeune homme raconte qu’il nettoie la rivière sur environ 80 mètres de long et 10 mètres de large depuis quatre jours. « Notre tâche consiste à nettoyer cette rivière, car les plantes obstruent le passage de l’eau. Nous avons aussi nettoyé la rivière de Bramsthan. Nous comptons en faire autant dans deux autres cours d’eau de la région », dit-il.

Argy est tristement connu pour les accumulations d’eau qui surviennent à chaque fois qu’il pleut à verse. C’est la raison pour laquelle les autorités, par le biais du conseil de district de Flacq, ont sollicité l’aide d’entreprises privées pour le nettoyage des rivières avant l’arrivée de Cilida.

Roodrasensingh Nundloll, qui habite Bel-Air, se dit prêt à affronter le cyclone. « J’ai pris des dispositions. J’ai acheté des bougies et des denrées de base », confie l’entrepreneur, en prenant place dans son 4x4 bleu marine.

Comme à Argy, tout est calme à Bramsthan, Grand-Sable, Petit-Sable, Providence, Vieux-Grand-Port, Rivière-des-Créoles, Bel-Air, Ville-Noire et Mahébourg. Idem à Clémencia, où les travaux d’agrandissement du pont vont bon train.  

Plus loin, nous apercevons des villageois qui s’adonnent à leurs achats de fin d’année, faisant fi de l’alerte cyclonique. Un homme passe avec un sapin artificiel sur le dos. « Nous allons connaître le même sort qu’en janvier », lance Motilall Choonee, dont la maison a été inondée lors du passage de la tempête Berguitta en janvier.

Inondation

Le planteur de 58 ans est convaincu que le seul moyen d’éviter une autre inondation est de rehausser sa maison. « La région est dépourvue d’un système de canalisation. L’eau de pluie qui dévale des champs de canne n’a nulle part où aller. Tout se refoule dans ma maison. L’eau inonde aussi la serre de tomates ainsi que le terrain qui se situe non loin de chez moi », confie-t-il.

Plus près de la mer, à Deux-Frères, Bissoon Kewal amarre son embarcation avec l’aide d’une dizaine d’autres pêcheurs. « Depi siklonn klas enn nou ti fini koumans amar nou bato. Me la nou pe kal li byen akoz zafer la pe vinn serye. Meteo inn fini met klas 2 », dit-il.

La région de Deux-Frères est elle aussi tristement connue pour ses accumulations d’eau. « Espérons que Cilida ne provoquera pas trop de dégâts », dit-il. Les averses qui se sont abattues à Cottage le 10 décembre hantent toujours les esprits.

À l’approche de Cilida, les habitants sont sur le qui-vive. À l’instar de Suraj Harkoo. « Lundi dernier, avec cette inondation, toute la clôture en béton a cédé. C’est la troisième fois que cela arrive. Il n’y a pas de drains et l’eau s’accumule. Je dois barricader portes et fenêtres afin d’éviter le pire », explique l’habitant de la rue Veerasawmy.

À Forbach Lane, les habitants nettoient encore les dégâts causés par les pluies de la semaine dernière. Ils se débarrassent de vêtements, d’électroménagers et de meubles abîmés. Francine Montagne-Longue dit avoir vécu l’enfer.  « Ki Noël pou fete ? Fini gro lapli, aster siklonn. Nous nous en remettons à Dieu. »

Si le calme plat règne à Fond-du-Sac, l’inquiétude peut se lire sur les visages des habitants de The Mount. Maisons inondées, enfants pris au piège dans leur chambre, meubles endommagés… les images de la semaine dernière sont fraîches dans les mémoires.

Frédéric Duval se prépare à nouveau. « Nous ne pouvons lutter contre dame nature. Si le niveau de l’eau augmente, nous déserterons la maison. Nous monterons à l’étage ou nous quitterons les lieux », raconte-t-il.

À Cité La Cure, le pont Marjolin a été fermé à la circulation. Les autorités entreprennent des travaux pour éviter les accumulations d’eau. À Chitrakoot, les habitants évitent de parler du cyclone. « Sori mo pa pou gagn letan koz sa. Mem si lapolis vini, nou pa pou bouze », lâche un père de famille. Idem pour Prem, un autre habitant. « Nou pena okenn problem isi. Tou korek. Pena ni glisman terin, ni debordman. » Quelques mètres plus loin, le couple Dursun ramasse des matériaux de construction sur la route. « Siklonn la kapav pran roksenn la ale avek sa delo ki desann isi la. »

Service de dialyse

Les patients qui ont besoin de dialyse pourront bénéficier de ce service lorsque le pays est en alerte 2. En revanche, il sera interrompu si l’alerte 3 est émise. Le ministère de la Santé a toutefois pris des dispositions pour qu’une équipe soit disponible dans les hôpitaux régionaux afin de prendre en charge les patients nécessitant une dialyse en urgence. Ce service reprendra normalement dès que l’alerte 3 sera levée. Les ambulances du SAMU feront des sorties uniquement en cas d’extrême urgence.

172 centres de refuge

Le National Disaster Risk Reduction and Management Centre a pris des dispositions pour prévenir les accumulations d’eau et pour intervenir plus promptement. À la deuxième réunion de crise qui s’est tenue le vendredi 21 décembre, la Vice-Prime Minister Fazila Jeewa-Daureeawoo a annoncé que les collectivités locales ont eu pour mission de nettoyer drains et rivières afin de faciliter l’écoulement des eaux pluviales.

En ce qui concerne les habitants des régions où les risques d’inondation sont élevés ou qui, pour une raison ou une autre, doivent évacuer leur maison, 172 centres de refuge seront mises à leur disposition à travers l’île. Si nécessaire, les centres de jeunesse seront ouverts afin d’éviter que les centres de refuge ne soient bondés.

Selon le nouveau protocole, outre des biscuits et de l’eau, des boîtes de conserve ainsi que des nouilles seront offertes aux sinistrés. Le Mauritius Prison Service assurera la fourniture de pains. La nourriture sera distribuée uniquement par la police.

Des conditions cycloniques attendues tôt dimanche matin

L’alerte cyclonique de classe 2 est maintenue à Maurice. Les bandes nuageuses, qui ont commencé à influencer l’île depuis vendredi soir, vont s’approcher davantage de Maurice. Ce qui va occasionner des pluies passagères modérées à fortes par endroit avec des orages localisés. C’est ce qu’indique le 6e  bulletin cyclonique de la station météorologique de Vacoas émis à 22 heures vendredi.

Cilida est resté un cyclone tropical intense et se trouvait à 22 heures vendredi soir à environ 500 km au nord de Maurice. La formation cyclonique se déplaçait dans une direction du sud à 10km/h. Selon les indications, Cilida va emprunter une trajectoire vers le Sud-est à partir de ce samedi. Il passera entre Maurice et Rodrigues dans la nuit de samedi à dimanche.

Avec l’approche de Cilida, le temps à Maurice va se dégrader davantage avec des pluies plus intenses partout à travers l’île. Le vent de l’est-sud-est de 25 km/h va également augmenter et les rafales de 60 km/h dans le courant de la journée de ce samedi pourront atteindre 110 Km/h dimanche. Les conditions cycloniques vont alors se faire ressentir. Selon le service de la météo de Vacoas, le cyclone intense Cilida reste une menace potentielle pour l’île.

Mais selon les divers modèles numériques, Cilida devrait perdre de son intensité au fur et à mesure qu’elle va s’approcher de Maurice. Ce que nous a confirmé la prévisionniste Vandana Gooljar. Cependant, la prudence reste de mise, a-t-elle précisé, car tout va dépendre si le cyclone tropical intense maintient son déplacement vers le sud-est. Le temps devrait s’améliorer dans le courant de la journée de dimanche.