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Commission Justice et Vérité: les victimes montent au créneau

Le suivi du rapport de la Commission Justice et Vérité (CJV) se fait attendre, selon les membres de l’Association du même nom. Au Parlement, il y a deux semaines, le député Joe Lesjongard avait souhaité que des décisions soient prises pour traduire dans les faits les conclusions de la CJV. «La commission a besoin d’un second souffle afin que les personnes spoliées illégalement de leurs terres soient compensées », déclare sans ambages Clency Harmon. Il plaide pour la mise sur pied d’une Land Tribunal, présidé par un ‘sitting judge’, dédié au traitement des cas soulevés durant les audiences de la commission. Pour Didier Kisnorbo, un autre membre de l’association, qui est, en ce moment, engagé dans une action en cour pour exiger la cessation des travaux sur une partie de ses terres par un groupe sucrier, la proposition de la Land and Research and Mediation Unit les place en situation inégale face aux énormes capacités dont disposent les ‘barons sucriers’. « Ceux qui ont leurs titres de propriété attendent qu’on désigne les responsables actuels des « vols » commis par leurs ancêtres, sans qu’ils en soient eux-mêmes tenus responsables. Malheureusement, force est de constater que ces derniers restent sur leurs positions et usent de tactiques dilatoires devant les tribunaux pour ne rien lâcher », fait valoir Danielle Tancrel, autre membre de l’association, qui ajoute : « À chaque fois qu’on a abordé la problématique des terres « volées », certains, parmi nombre de ‘barons sucriers’,  disent que nous faisons comme au Zimbabwe ». Pour Benjamin Moutou, un des trois commissaires (les deux autres sont V. Teelock et P. Veerapen) qui ont auditionné les témoins lors des sessions de la CJV, « il est clair que la commission a un goût d’inachevé. Il faudrait, aujourd’hui, commencer par mettre sur pied cette Land Court, mais aussi recourir aux services des arpenteurs, notaires, avocats et commissaires fonciers. Certains cas sont toujours complexes. » Autant de services que les familles spoliées ne pourraient s’offrir. « S’il faut aller jusqu’à la Cour suprême ou au Privy Council, cela exigerait des millions de roupies, explique Veda Sreepaul, membre de l’association et président de l’Association des pays métayers du Sud.  Si la  Land and Research and Mediation Unit ne parvient pas à des solutions, les cas seront transmis à la Cour suprême, qui est déjà surchargée. » Par ailleurs, les membres de l’association dénoncent l’exercice qui entoure le choix de 42 cas parmi les 88 confirmés de dépossession de terres. « Nous n’avons jamais été convoqués par  l’arpenteur qui a effectué cette sélection, écrivent les membres de l’association dans une lettre adressée à sir Anerood Jugnauth. Depuis que le rapport lui a été soumis, alors qu’il était Président de la République en 2011, on a été très patient, on a fait confiance au gouvernement. Aujourd’hui, on a le sentiment qu’on joue avec nous et qu’il n’y a rien de sérieux dans la mise en application des rapports de la Commission Justice et Vérité sur la dépossession des terres. On établit des comités après comités (...) C’est un cauchemar pour nous et une farce… », s’insurge un membre de cette association. Quelles sont les chances des membres de l’association de se faire entendre ? Didier Kisnorbo et ses amis comptent user de tous les moyens légaux pour que leur cause obtienne la même envergure médiatique que celle des Chagossiens. « Notre combat dépasse les frontières mauriciennes, fait-il valoir. Il vient illustrer de manière flagrante comment le colonialisme, la traite des esclaves, l’engagisme ont servi à spolier des familles entières et, jusqu’à nos jours, cette question est pervertie par la force de l’argent ».
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