Législatives 2024

Circonscription n°1 : Une arrivée dans un mouchoir à prévoir

Dans la circonscription n°1, des habitants déplorent le manque de développements. Le chômage, la drogue et la grossesse précoce sont des problèmes majeurs dans plusieurs quartiers.

Avec ses dix centres de vote éparpillés entre Pointe-aux-Sables, La Tour Koenig, Camp-Chapelon, Richelieu et Bain-des-Dames, Débarcadère, Sugar Planters, entre autres, la circonscription n°1 (Grande-Rivière-Nord-Ouest/Port-Louis Ouest) compte plus de 33 000 électeurs. Elle a perdu environ 7 000 électeurs au profit de la circonscription voisine, la n°2 (Port-Louis Sud/Port-Louis Central). 

Le manque de développements dans la circonscription n°1 est déploré par les habitants.
Le manque de développements dans la circonscription n°1 est déploré par les habitants.
Le manque de développements dans la circonscription n°1 est déploré par les habitants.

Longtemps considéré comme un bastion mauve, petit à petit cette circonscription s’est retrouvée avec aucun élu mauve en 2019. Les candidats de l’Alliance Nationale, Fabrice David et Patrice Armance, ainsi que la candidate de l’Alliance Morisien, Dorine Chukowry, avaient alors remporté les trois sièges, distançant les candidats mauves Veda Baloomoody, Giovanni Catherine et Arianne Navarre-Marie. Classée en quatrième position, cette dernière a été repêchée en tant que Best Loser.

La belle chapelle du Père Laval au coeur de la cité Boarstal.
La belle chapelle du Père Laval au coeur de la cité Boarstal.

Cette fois, pour les prochaines législatives, la joute s’annonce davantage serrée, avec la présence de l’équipe de Linion/Reform Party (Jean-Claude Barbier, Igor Tan Yan et le Dr Didier Michel), de celle de Bruneau Laurette, de Stephan Buckland et de Danielle Selvon pour le Muvman Bruneau Laurette, de L’Alliance Lepep avec Dorine Chukowry, Joanne Tour et de Patrice Armance et le trio de L’Alliance du Changement avec Fabrice David, Arianne Navarre-Marie et Kugan Parapen. Au total, 25 candidats, dont trois indépendants, se disputeront les 3 sièges.

Les quatre compères sont plus intéressés par les dominos que par les élections.
Les quatre compères sont plus intéressés par les dominos que par les élections.

A Camp-Chapelon, à quelques jours du scrutin, l’ambiance est à l’image des rues : tranquille, presque endormie. Quelques travaux d’entretien sont en cours, mais rien de bien spectaculaire. Quelques employés d’une entreprise de nettoyage de l’État se prélassent à l’heure de la pause. Pour Steve, 48 ans, marié, maçon reconverti en nettoyeur, « il faut reconnaître que ce petit quartier, qui ne compte que moins de 2 000 votants, a été délaissé. Nous sommes là justement pour tout nettoyer, car des ordures sont entassées. On débroussaille pour rendre les espaces publics vivables ».

Plus loin, dans un petit salon de coiffure « cosy », père et fils sont au rasage. Gool, 82 ans, exprime sa frustration : « Je me suis fait opérer des deux yeux. On m’a demandé d’aller à l’hôpital pour avoir des lunettes gratuites, auxquelles j’ai droit. Mais, à la Sécurité sociale, on me dit que je suis un pensionné et que je n’ai pas ce droit-là. Je me suis plaint, mais rien. ‘Ena fonksioner gagn lump sum, lamone pansion, zot gagn linet gratis’… » Son fils, Gool Jr., d’enchaîner tout en rasant la tête de son client : « Nanye pa finn fer isi, zot finn bliye nou existe. Bizin sanzman mem-la, pena lot swa. Nou ena enn gouvernma ki get figir. »

Pour Ishaaq. Rusha et Sophia, « lane ale, lane vini, parey mem ».
Pour Ishaaq. Rusha et Sophia, « lane ale, lane vini, parey mem ».

Nous quittons Camp-Chapelon pour Bain-des-Dames. Côté mer et plage. Sous un soleil radieux, un petit coin aménagé avec des sièges en pierre et une table en béton abrite trois jeunes gens qui savourent leur déjeuner. Pain burger au fromage et boisson gazeuse : un menu simple et efficace pour Ishaaq, sa fiancée Rusha et sa belle-sœur Sophia : « Nou finn pran enn zour konze zordi, la nou finn desid pou manz enn zafer, dipin burger-la pa move ditou, mari bon mem. »

Et les élections ? « Lane ale, lane vini, parey mem. Nou, nou tras nou lavi, pa gagn zot traka », répond Ishaaq. Rusha et Sophia abondent dans le même sens.

À quelques mètres de là, quatre hommes animent une partie de dominos sur une table de fortune. L’ambiance est bon enfant. « Nou, nou kontan pass enn ti moman ansam, zwe domino, pa gagn traka personne k personn pa anouy nou », confie, sourire aux lèvres, Philip Agathe, 74 ans, ancien plombier à la mairie de la capitale. Arvin, 42 ans, habitant St-Pierre, est venu rejoindre ses amis Anil, 68 ans, et Roland, 73 ans, de Cassis. Leur principale préoccupation ? La cherté de la vie, mais avec leurs pensions « kapav zis debrouye ». Que ce soit à la Cité Boarstal avec Émilie, Tyrel, Loreen, Doretta ou Kellynia, c’est la même rengaine : le cout élevé de la vie.

Gool Sr et Goo Jr de Camp Chapelon ont une dent très dure contre le gouvernement sortant.
Gool Sr et Goo Jr de Camp Chapelon ont une dent très dure contre le gouvernement sortant.

À La Tour Koenig, dominé par le supermarché Sheridan et ses nombreux immeubles résidentiels construits sous l’ère de feu Jayen Cuttarree, l’ambiance est animée et parfois bruyante. Les petits snacks sont toujours bondés, les files d’attente aux distributeurs automatiques sont monnaie courante, et les petits commerces de proximité sont très appréciés. Le Muga, quant à lui, est peu fréquenté. L’atmosphère générale rappelle celle d’une cité HLM. Les jeunes sont nombreux à embrasser le chômage, d’autres sont des saisonniers attitrés, mais ils s’accrochent. « Pa fasil gagn travay. Kan gagne, se zis pou enn ti moman, pa zwenn de bout, mari tough. Me nou manz ar li, ki a fer », lâche un jeune homme d’une vingtaine d’années, cheveux joliment tressés.

À cité Débarcadère et Sugar Planters, le constat est similaire. Les habitants nous confient qu’ils s’efforcent d’améliorer leur quotidien. « Me ena enn gro problem ek bann zeness. Boukou pa travay, ladrog an plas, ler la sa koz problem pou landrwa. Me bizin rekonek ki finn ena ameliorasion lor fason viv bann zabitan, zot fer zefor, me li pa fasil », raconte Anne (prénom d’emprunt).

À Cité Richelieu, la situation est plus complexe. Le nombre de mères adolescentes ne cesse d’augmenter. Pourtant, il existe des moyens de contraception gratuits. « Ou kapav kontrol bann zenes azordi ? Ou le bon fer zot konpran, zot pa oule. Rezma ki papa bann piti-la pa abandonn zot zenn fam ek zot ti baba. Zenn zenn tifi, zot mem kouma zanfan fini vinn mama », confie une habitante, fan de Bruneau Laurette. D’ailleurs, toute cette bande du quartier, bébés dans les bras, s’est déplacée pour soutenir leur nouveau leader.

La circonscription n°1 sera âprement disputée. Si les trois centres de vote de La Tour Koenig (JM Frank Richard SSS, New La Tour Koenig GS et La Tour Koenig GS) font le plein avec leurs 2 552, 2 587 et 4 132 électeurs respectivement, cela pourrait faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre. À moins que la Pointe-aux-Sables Government School, avec ses 6 270 électeurs, comprenant les morcellements Rey, Sagittaire et Ghuburrun, ne fasse la différence. Il faudrait prévoir une arrivée au coude-à-coude dans cette circonscription le 11 novembre prochain.

Sarahjane, receveuse et fière d’être Lalit

Ceux qui empruntent régulièrement le bus du Triolet Bus Service reliant Port-Louis à Pointe-aux-Sables devraient la reconnaître. Elle s’appelle Sarahjane Naraina, mariée et mère de deux enfants. Sa particularité : une militante de Lalit depuis qu’elle a 15 ans. « Depuis adolescente, je milite aux côtés de Lalit. Ce parti représente pour moi l’idéal avec des idées de gauche avant-gardistes. Si jamais on fait un bon score, mes collègues Ange Laval Yves et Rada Kistnasamy et moi n’acccepterons pas d’être repêchés comme Best Losers », affirme-t-elle.

 

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