Les habitudes du consommateur mauricien changent. Celles des grandes surfaces aussi. Managing Director de Panagora - société faisant partie du groupe Eclosia, avec un chiffre d’affaires de Rs 3,3 milliards – Cédric Lagesse fait le point sur les tendances dans la consommation en décembre, où le volume de ventes est supérieur de 30 %.
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À l’approche de la fin d’année, comment se présentent les ventes ?
Par rapport à l’effervescence de décembre, tout n’a pas encore bougé à ce stade. Nous travaillons sur ce que nous comptons réaliser au cours de ce mois. Nous avons déjà fait passer le budget et les prévisions pour l’importation et la production des autres compagnies du groupe. La fin de l’année représente une hausse de 30 % dans le volume relatifs au précédents mois. N’empêche que les gros volumes bougent de plus en plus tard. Et ce sont des pics. Il y a de gros jours de vente. Et c’est là qu’on peut manquer quelques commandes. La force logistique est un moyen très important pour répondre à ces pics dans la demande.
Est-ce qu’il y a une croissance par rapport à l’année dernière ?
Il y a une croissance. Elle est relativement faible, soit 5 % en volume de produits livrés. Je me base sur ce que Panagora Marketing a réalisé sur l’année se terminant au 30 juin 2016 par rapport à la précédente période. Ça dépend effectivement des prix, marques, produits et attentes des consommateurs.
Est-ce que le comportement du consommateur a beaucoup évolué ces dernières années ?
Auparavant, les ventes étaient plus étalées sur le mois de décembre. Aujourd’hui, nous assistons de plus en plus à des achats de dernière minute. Elles démarrent quelques jours avant la fête de Noël et entre la Noël jusqu’au 31 décembre. D’une part, nous avons toujours l’impact du bonus de fin d’année. Et d’autre part, le ratio entre les produits frigorifiés et frais est en mutation. Même si le volume de produits congelés est encore très important, l’achat en aliments frais augmente. La date d’expiration est plus courte, ce qui fait que les gens attendent.
Le côté sain de l’alimentation est une tendance. Le consommateur est plus conscient et plus avisé de ce qu’il mange. La confiance sur la marque est importante. Nous misons sur cela. Nous avons beaucoup de marques qui sont leaders sur le marché. Et on voit que le consommateur reste très attaché et fidèle.
Par rapport à la classe moyenne, le rapport qualité-prix reste très important. Il comparera le prix auquel il paie pour sa marque préférée. Si les écarts de prix sont conséquents avec les autres marques pour la même catégorie de produits, il changera. Le nombre de brochures promotionnelles dans les journaux est en hausse. Une étude de DCDM a révélé qu’un consommateur sur deux consulte la brochure avant de faire ses courses. Il recherchera ses marques et où il pourrait obtenir un bon deal. D’ailleurs, un phénomène de plus en plus visible est cette notion de promotions et les grandes surfaces engagées dans une guerre de brochures et des prix.
«Le petit commerce doit pouvoir se réinventer, donner une qualité de service, une proximité que le consommateur n’a pas nécessairement avec les grandes surfaces.»
Quel est l’impact de cette guerre sur les marges du distributeur ?
La guerre des prix est très grande. Tous les supermarchés se retournent vers les distributeurs pour demander de contribuer sur les promotions et accords commerciaux. Les accords sont annuels. Mais, ponctuellement, chaque mois, nous arrivons avec des promotions pour leurs brochures. Tout le monde vient contribuer.
Qui sont les perdants dans cette guerre des supermarchés ?
Le sondage effectué par DCDM démontre que le consommateur fait ses courses de plus en plus dans les supermarchés. Ça devient donc plus difficile pour les petits commerces. Mais le petit commerce doit pouvoir se réinventer et donner une qualité de service, une proximité que le consommateur n’a pas nécessairement avec les grandes surfaces. Ça peut se jouer par rapport aux heures d’ouverture ou des facilités de paiement. (Par exemple), des stations d’essence sont toujours en train d’adosser un petit commerce à leur activité principale. Même si la marge serait plus élevée, elles offrent un service de dépannage des consommateurs.
Aujourd’hui, comment qualifierez-vous le secteur des grandes surfaces ?
La première enseigne de grande distribué est arrivée, il y a 20 ans. Au cours de ces deux dernières décennies, la grande distribution s’est développée. Nous avons, aujourd’hui, sept ou huit grands groupes. Nous avons au moins 70 ou 100 qui sont sous des groupements ou dans le modèle de grande surface. Ensuite, il y a les commerces de proximité. Entre ces deux catégories, une troisième est venue se faire une place. Ce sont les hard discounters comme Dream Price, King Savers ou Lolo. Elles offrent un modèle presque similaire à la grande distribution, mais en jouant sur les prix. Tout cela fait que nous avons une offre très variée.
Donc, il n’existe aucun cartel dans la grande distribution ?
Non seulement il n’y a absolument pas de cartel, mais tout est ouvert. Il n’y aucun droit de douanes sur les produits alimentaires. Le groupe Eclosia produit localement. À Panagora Marketing, deux tiers de la production sont locaux. Un tiers est de l’importation. Nos clients, qui n’ont pas d’activité locale, s’approvisionnent à l’étranger directement et concurrencent les distributeurs. Pourquoi décembre devient de plus en plus difficile ? Parce que les supermarchés ont leurs capacités de stockage. Ils importent en avance et stockent. Donc, ils viennent dire aux distributeurs qu’ils ne peuvent pas livrer, car ils n’ont pas de place.
Aujourd’hui, les supermarchés sont engagés dans l’importation. Cela n’a-t-il pas une incidence sur le rapport qualité-prix ?
Le consommateur mauricien reste très attaché aux marques. Avant les années 2000, le consommateur connaissait plus les marques du groupe que ses compagnies. Ils connaissaient Chantecler, Yoplait ou Candia. Les marques du groupe sont extrêmement fortes. Panagora Marketing met en avant les marques que nous distribuons. Certaines de ces marques ont 70 % du part de marché parce que le rapport qualité-prix, la confiance et le produit sont bons.
N’empêche ces parts de marché ne sont-elles pas sous pression?
Complètement. Si vous prenez un segment qui est très concurrencé aujourd’hui, c’est le jus. C’est très éclaté avec l’arrivée de dix nouvelles marques. Le leader n’a que 27 %. Si, aujourd’hui, une marque dispose de 70 % des parts, c’est exceptionnel par rapport à la qualité-prix, le positionnement et les autres qui essaient ne parviendront pas à le défier.
Tout compte fait, dans un pays avec une population de 1,3 million, est-ce logique d’avoir un tel niveau de concurrence?
Maurice a une particularité. Il y a toujours eu beaucoup de concurrence sur les différents secteurs d’activités. (…) Le marché est complètement ouvert. Nous avons moins de protection à l’entrée qu’un pays industrialisé. On peut dire qu’il faut absolument protéger le consommateur. Mais pour le côté de la fabrication et production locale, c’est un danger. Il faut se battre contre des pays qui ont des volumes plus importants et faire du dumping.
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