Il y avait la senteur d’un raz-de-marée dans l’air à la fin des années 80. Puis, quand le monde syndical s’est mué en un seul corps, il y a eu le tout premier 60-0 du pays, en juin 1982. Alain Laridon s’en souvient comme si c’était hier.
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Àcette époque, le pays connaissait un bloquage économique, le ministre des Finances d’alors, sir Veerasamy Ringadoo, avait décidé, sous l’influence du Fonds monétaire international (FMI), de déprécier la roupie mauricienne à deux reprises. C’était la colère généralisée.
« Il y a eu deux dévaluations successives. Les jeunes gradués qui revenaient au pays étaient chômeurs. C’était infernal et invivable », nous conte Alain Laridon, qui a été parlementaire et surtout diplomate.
Il ajoute que le port a été d’un apport certain pour l’avènement de ce premier 60-0 : « La Port Louis Harbours Workers Union, avec de solides gars comme Gaetan Pillay, Mario Flore, Claude Élysée, et la Transport Workers Union avec Balram Ramsahye, Alim Bundhoo, Jimmy Gobin, le frère de Subash Gobin, étaient la cheville ouvrière de ce movement de massee. Les rencontres étaient cordiales et régulières entre Paul Bérenger et ces sydicalistes. »
Est-ce là que s’est construit ce movement anti-Travailliste ? « Effectivement, la classe ouvrière a compris, à travers des discours, des explications des syndicats, des peronnes engagées, qu’il fallait se mobiliser et quand la mayonnaise a monté, c’était inévitable qu’on se dirigeait vers un tsunami politique », avance Alain Laridon.
Les jeunes diplômés qui revenaient au pays étaient chômeurs. C’était infernal et invivable"
Le PSM de Harish Boodhoo
Au sein meme du Parti Travailliste au pouvoir, mais fléchissant, il y avait une profonde fronde menée par un certain Harish Boodhoo et quelques caciques du PTr. « On était vers la fin de 1981. Harish Boodhoo menait une guerre interne au sein du Parti Travailliste. C’était déjà une opposition dans le gouvernement, alors que le MMM de Paul Bérenger rameutait ses troupes en dehors du gouvernement. C’était une guerre de clans politiques », nous dit celui qui a été au coeur de ces négociations.
Alain Laridon raconte que tout a commencé chez un militant pur et dur, soit le Dr Siddiq Maudarbaccus : « C’est chez le docteur que tout a commencé. Les négociations ont pris leur forme sous la houlette du Dr Maudarbacus avec le support de Kader Bhayat à Curepipe et avec la présence d’Anerood Jugnauth et de Paul Bérenger. »
Pour l’ex-ambassadeur, cette osmose entre les divers syndicats et le MMM a mené vers le tout premier 60-0 de notre histoire : « Rien ne pouvait éviter cette débacle de l’Alliance du gouvernement contre le MMM/PSM. Les petites gens et la classe ouvrière ne demandaient qu’à virer le gouvernement de Seewoosagur Ramgoolam et de Veerasamy Ringadoo. Surtout les jeunes, qui ont voté massivement contre le régime d’alors. Et on a eu droit à un 60-0, sans partage. »
Au sein du PTr, fléchissant, il y avait une profonde fronde menée par Harish Boodhoo"
Alain Laridon raconte, de mémoire, ce tout premier 60-0 de notre histoire avec émotion. Car, il a été omniprésent quand ce tsunami est tombé sur la tête du PTr de l’époque.
Puis, on a eu droit à deux autres 60-0, en 1995 et en 2024.
Le point faible du ‘leader maximo’
Pour Alain Laridon, le leader du MMM fait trop confiance à ceux qui l’entourent et quand ceux-là le quittent pour diverses raisons - son ‘bezer karakter’, son intransigeance ou autre -, il est blessé. « Mais il encaisse, ne prend pas de revanche et se relève de ces trahisons de militants qu’il a tant chéris », nous dit-il.
Un exploit et un désastre en neuf mois
Le tout premier ‘pisso’ de 60-0 en juin de 1982 a été vécu comme un soulageement pour tout un peuple. L’euphorie n’aura duré que neuf petits mois, car l’alliance entre le MMM et le PSM d’Harish Boodhoo a volé en éclats neuf mois après.
On a alors vécu une autre alliance, avec la naissance du MSM d’Anerood Jugnauth, qui s’est acoquiné avec le PTr de SSR et le PMSD de Gaetan Duval. Aux élections qui ont suivi, les mauves se sont fait battre et l’alliance Bleu-Blanc-Rouge a géré le pays.
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