
Depuis un mois, la situation devient critique à Agalega. Les habitants des deux îles font face à une pénurie de vivres, ce qui plonge la population dans un profond désarroi. Deux navires, essentiels à l’approvisionnement, sont en panne, tandis que la jetée, non conforme aux normes, complique l’acheminement des denrées.
Face à cette crise, les autorités tentent de rassurer. Dans une intervention en direct dans la soirée de lundi, le ministre des Infrastructures nationales, Shakeel Mohamed, a appelé les habitants à patienter, affirmant que des provisions arriveraient d’ici au 29mars.

Le 5 mars, l’administrateur d’Agalega avait fait observer que les stocks diminuaient de façon alarmante. Alerté, le gouvernement mauricien a sollicité l’aide de l’Inde le 11 mars. Trois jours plus tard, New Delhi a autorisé le navire INS Imphal, qui avait participé aux célébrations de l’indépendance, à dérouter sa mission pour acheminer des vivres sur l’île. Toutefois, en raison de sa capacité limitée, seulement 1 000 kg de provisions ont pu être envoyés, excluant les produits frais et congelés.

Si cette livraison a permis de constituer une réserve, elle reste insuffisante pour calmer les inquiétudes des habitants. Wesley Augustin, un résident de l’île, ne cache pas son désarroi. Pour lui, ce problème ne date pas d’hier. « Nous sommes à bout. Ce problème persiste depuis des années. Je ne comprends pas comment les instances concernées peuvent agir de la sorte. Nous n’avons plus rien à manger. Il y a plus de détergents que de nourriture dans les provisions. Les deux boutiques de l’île sont vides et nous ne savons pas quand nous verrons enfin la lumière au bout du tunnel », confie-t-il.
Selon Wesley Augustin, l’Outer Islands Development Corporation (OIDC) porte une lourde responsabilité dans cette crise. Il explique qu’une liste de vivres est transmise à l’instance concernée pour organiser l’approvisionnement, mais que les quantités envoyées sont bien trop faibles. « 25 sachets de riz pour 350 habitants ? Ce n’est pas suffisant », déplore-t-il.
Au-delà des pénuries, Wesley Augustin remet également en question les décisions du gouvernement. « On nous demande de faire preuve de patience, mais pourquoi ne pas dépêcher un avion pour nous aider ? Nous avons une piste désormais et nous sommes dans une situation d’urgence. Pourquoi les travailleurs indiens reçoivent-ils leurs vivres sans problème, alors que nous sommes abandonnés ? » s’interroge-t-il.
Des promesses jamais tenues
En 2012, les Agaléens avaient reçu la promesse que leur situation s’améliorerait avec la mise en place d’un conseil géré par les habitants de l’île. Treize ans plus tard, rien n’a changé. Arnaud Poulay, un artiste engagé qui reste en contact permanent avec la population locale, déplore le laxisme des autorités.
« Ils nous avaient promis une réforme de l’OIDC pour permettre aux Agaléens de mieux gérer leur île. Aujourd’hui, on ne voit que des nominations politiques, mais aucune avancée concrète. Pendant ce temps, la situation s’aggrave. La plupart des habitants n’ont plus de vivres, les enfants n’ont rien à manger. Que font les responsables ? Ne sommes-nous pas humains avant tout ? », s’indigne-t-il.
Le cyclone Chido, qui a récemment frappé la région, a également compliqué la situation, mais Arnaud Poulay estime qu’il ne peut pas être une excuse pour justifier l’inaction des autorités. « Il y a un manque criant de communication et de réactivité. Le 11 mars, les enfants n’ont même pas pu célébrer la fête de l’Indépendance dignement. Ce sont les habitants eux-mêmes qui ont dû organiser les festivités avec les maigres moyens dont ils disposaient », raconte-t-il.
Climat social tendu
Selon Arnaud Poulay, si les ravitaillements n’arrivent pas à temps, la situation risque de dégénérer entre les habitants. « La population d’Agalega souffre. Les autorités font semblant de nous écouter, mais nous sommes livrés à nous-mêmes », dénonce-t-il.
La question des infrastructures, notamment celle du transport maritime vers Agalega, demeure un problème de fond. Lors de son intervention en direct, Shakeel Mohamed a reconnu que les infrastructures disponibles sur l’île ne sont pas aux normes. Il a toutefois assuré que l’Inde fera le nécessaire pour rectifier la situation. En attendant le prochain convoi de nourriture prévu pour le 29 mars, les deux boutiques de l’île sont en rupture de stock et les habitants n’ont d’autre choix que d’attendre.

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