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Actes de violence et incivilité - Dr Ravat  : «Les jeunes et les adultes n’ont pas de mots pour dire leurs maux»

Pour Jonathan Ravat, la famille doit être formée pour mieux suivre les enfants. Soondress Sawmynaden estime qu’il faut repenser le système éducatif et inclure les jeunes dans les décisions prises. Preetam Mohitram fait comprendre que le ministère de l’Education mise sur le développement du capital humain.

Les actes de violence et d’incivilité en public se multiplient, alimentant les débats et les inquiétudes. Ces comportements, souvent capturés en vidéo et diffusés sur les réseaux sociaux, posent une question fondamentale : comment en sommes-nous arrivés là ? Pour en parler, Patrick Hilbert a réuni plusieurs invités sur le plateau de l’émission « Au Cœur de l’Info », le lundi 20 janvier, sur Radio Plus.

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La violence qui sévit au quotidien dans la société est devenue une situation alarmante et préoccupante, selon Soondress Sawmynaden, ancien recteur et syndicaliste. « L’école est le reflet de la société, et ces derniers temps, nous assistons à des cas d’agression presque chaque jour. Les violences, les viols, les vols et la consommation de drogues se multiplient, et les jeunes sont de plus en plus concernés. La société se dégrade en raison d’un manque de discipline, un phénomène qui prend racine dès le milieu scolaire », a-t-il souligné.

D’après lui, le problème réside dans le système éducatif, qui ne parvient pas à offrir aux jeunes des repères solides. « Ils se sentent abandonnés, pour diverses raisons. Les parents sont de plus en plus occupés et n’ont plus le temps de communiquer avec leurs enfants, ce qui a un impact sur la cohésion familiale. Les jeunes sont souvent isolés et leurs seuls compagnons deviennent leurs téléphones portables, les exposant ainsi à de nombreux fléaux », a-t-il expliqué, avant de mettre en lumière l’indiscipline croissante dans les écoles, qu’il attribue à un manque d’enseignants et à l’incapacité de ceux présents à fournir une attention individuelle suffisante.

Pour Preetam Mohitram, administrateur au ministère de l’Éducation, la situation doit être vue sous trois axes différentes. « Il y a une crise d’autorité, d’attention et de confiance. Pour la crise d’autorité, il faut comprendre qu’il s’agit d’un problème multidimensionnel notamment avec des enfants ayant des troubles de l’apprentissage ou encore certains sont issus des foyers brisés. Et pour régler ce problème, la crise d’autorité doit être rétablie. Cela passe par un réapprentissage de l’autorité en expliquant à l’enfant quel est son rôle et son devoir », a-t-il fait ressortir.

Repenser l’autorité

Le constat est tout aussi inquiétant selon le Dr Jonathan Ravat, directeur de l’Institut Cardinal Jean Margéot. « Les jeunes et adultes aussi n’ont pas les mots pour dire leurs maux. S’ils n’ont pas les armes nécessaires notamment les outils cognitifs et intellectuels pour dire ce qu’ils vivent et peut être aussi leurs difficultés et frustrations, ils prendront d’autres armes. Et ça, c’est le propre des humains », a-t-il précisé. Et face à cette situation, il prône une solution à court terme avant d’envisager des solutions à moyen et long termes.

Dans un premier temps, Jonathan Ravat a évoqué le besoin, par exemple, de repenser l’autorité, notamment de venir avec le Community Policing, avec un Mauritius Police Service au lieu de Mauritius Police Force. « Il nous faut ‘think out of the box’ et de voir comment la présence policière peut être une source d’autorité et non pas qu’elle soit porteuse de violence », a-t-il indiqué et cela passe par la revalorisation de la force policière, et des salaires des policiers, entre autres.

Rendre l’univers scolaire attrayant, surtout pour les « cyberkids » qui sont de plus en plus connectés et ne se retrouvent plus entre les quatre murs de l’école. Et Soondress Sawmynaden a évoqué l’importance d’inclure un ‘Happiness Index’ dans le système éducatif. « Le leadership est la première chose à revoir et il nous faut former les chefs d’établissement pour qu’ils puissent apporter des changements à leur niveau et développer une vision pour les écoles qu’ils représentent », a-t-il soutenu tout en évoquant l’importance d’inclure les jeunes dans cette transformation.

Responsabiliser les parents

Au ministère de l’Éducation, Preetam Mohitram a, lui, souligné qu’il y a des efforts pour développer le capital humain. « Il y a une réflexion qui est faite pour élaborer une plateforme d’expression notamment avec les Assises de l’éducation. Il nous faut être à l’écoute pour pouvoir consolider nos institutions. Et le ministère joue la carte de la démocratie en donnant la parole à tout le monde », a-t-il estimé tout en précisant qu’il faut faire confiance aux administrateurs et recteurs d’écoles. Il faut aussi responsabiliser les parents, selon lui.

Le rôle et l’implication des parents demeurent essentiels dans l’effort pour instaurer davantage de discipline dans la vie des jeunes. « Il existe avant tout un problème d’ordre anthropologique. Il est nécessaire de se poser des questions fondamentales : quel genre d’être humain voulons-nous devenir, pour nous-mêmes, pour nos enfants, pour nos petits-enfants, et pour la jeunesse mauricienne ? » a déclaré Jonathan Ravat. Selon lui, une forme de violence invisible, mais extrêmement grave, touche les jeunes : celle de la course effrénée à la consommation. « Il est primordial de réfléchir à qui nous devenons, non seulement à ce que nous avons », a-t-il conclu.

Intervenant sur Zoom, Émilie Rivet, docteure en psychologie clinique et manager de « Konekte » a, elle, parlé du lien avec l’enfant. « Les recherches lent montre, les aides sociales doivent être en lien avec l’enfant. L’accompagnement à la parentalité est un premier pas pour créer un attachement sécurisant entre le parent et l’enfant. L’enfant fait mieux quand il se sent en sécurité », a-t-elle affirmé. Ensuite, elle a aussi souligné le besoin plus d’acteurs sociaux au-delà des psychologues pour les enfants.

La gestion des cas de violence

Si un travail préalable est nécessaire pour résoudre le problème de la violence et de l’incivilité, il convient également de prendre en compte l’aspect de la gestion des cas de violence, selon la psychologue Émilie Rivet. « L’intervention a un impact sur la prévention, et inversement. Mais face à la violence, comment gère-t-on la situation ? » a-t-elle interrogé, soulignant la nécessité de revoir les lois, les systèmes pénitentiaires, les programmes de réhabilitation, ainsi que l’accompagnement des mineurs, entre autres.

Un besoin de plus de recherches et d’études

Les plans d’action doivent être fondés sur la réalité de la situation afin de trouver les solutions les plus adaptées. Cependant, à Maurice, il existe un manque crucial de données fiables sur lesquelles s’appuyer pour élaborer des projets à la fois réalistes et réalisables. C’est ce qu’a souligné Émilie Rivet, en insistant sur l’importance d’investir davantage dans la recherche. « Bien que nous puissions nous appuyer sur les bonnes pratiques internationales, il est essentiel de disposer de données locales, tenant compte des spécificités de notre contexte. Fournir un contexte précis permettra d’adapter les réponses aux véritables besoins », a expliqué la psychologue.

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