Le biocarburant est souvent évoqué comme une solution pour la transition énergétique à Maurice. Cependant, il repose sur une technologie ancienne, l’éthanol, et malgré les importations massives récentes, son utilisation nationale soulève des questions sur l’engagement politique envers les énergies renouvelables. Il est temps de voir si les dirigeants prendront des mesures sérieuses pour mettre en œuvre cette solution.
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«Bien que les biocarburants semblent être une innovation récente, leur base repose sur une technologie ancienne, l’éthanol dérivé de la canne à sucre, présente depuis des siècles ». C’est ce que nous a expliqué le chargé de cours et expert en matière énergétique, Khalil Elahee au sujet de la déclaration du ministre des Services publics et de l’Énergie, Joe Lesjongard à l’effet que Maurice ait rejoint le BioAlliance Fuel à la suite du sommet du G20 en Inde. Selon le ministre, cette initiative permettra à Maurice de réduire sa dépendance sur le charbon ainsi que l’huile lourde.
Les chiffres émanant de Statistics Mauritius indiquent que pour 2022, Maurice a importé un total de 1 922 594 tonnes équivalent pétrole (tep) de carburant, principalement composé de combustibles fossiles, alors que les énergies renouvelables ne représentaient que 0,01 % de ces importations. Le charbon constituait environ 18,9 % des importations, tandis que parmi les produits pétroliers, on retrouvait l’huile de chauffage à hauteur de 37,8 %, le diesel à 16,4 %, l’essence à 10,2 %, le gaz de pétrole liquéfié (LPG) à 5,2 % et le kérosène à double usage à 11,6 %.
Comparativement à l’année 2021, les importations de produits pétroliers ont grimpé de 11,9 %, passant de 1 392 661 tep à 1 558 919 tep, tandis que les importations de charbon ont diminué de 23,3 %, passant de 473 546 tep à 363 428 tep. De 2021 à 2022, la facture d’importation des produits pétroliers et du charbon a augmenté de 82,0 %, passant de Rs 35 887 milliards à Rs 65 322 milliards, représentant ainsi 22,3 % du total de la facture d’importation.
Pendant la même période, le pays a enregistré des hausses du prix moyen d’importation des produits pétroliers comme suit : l’essence (+67,7 %), le diesel (+80,0 %), le kérosène pour carburant d’avion (+59,4 %), le fioul lourd (+52,0 %), le LPG (+23,0 %) et le charbon (+135,5 %).
Au cours des dix dernières années, environ 20 millions de tonnes de bioéthanol ont été importées vers le marché européen, ajoute Khalil Elahee, tout en faisant ressortir que l’éthanol produit à Maurice est considéré comme véritablement bio, contrairement à celui du Brésil qui nécessite la déforestation pour sa production. « Actuellement, l’éthanol mauricien est principalement destiné à l’industrie cosmétique en Europe et à une utilisation comme carburant pour les véhicules européens ». Malgré cela, indique-t-il, depuis plus de deux décennies, chaque gouvernement mauricien a promis d’exploiter le potentiel des biocarburants à base d’éthanol, mais ces promesses sont restées largement inutilisées.
Khalil Elahee explique aussi qu’il est important de noter que l’éthanol mauricien est déjà adapté à une utilisation automobile locale avec une teneur d’éthanol de 5 %. Toutefois, pour augmenter cette proportion à 10 %, des modifications seraient nécessaires au niveau des véhicules.
La décision d’exploiter davantage les biocarburants, selon lui, repose avant tout sur des considérations commerciales et politiques. « Elle requiert la collaboration du ministère des Finances, des acteurs privés, des usiniers, des distilleries et des petits planteurs pour déterminer comment commercialiser le bioéthanol en tant que carburant de remplacement de l’essence. Ce processus implique une organisation minutieuse et des décisions politiques éclairées », dit-il.
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