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Tensions entre Israël et l’Iran : craintes quant aux retombées sur les prix du pétrole et du gaz à Maurice

L’île de Kharg est un point stratégique vital dans le commerce mondial du pétrole. Situé dans le golfe Persique, c’est l’un des principaux terminaux d’exportation de pétrole de l’Iran.

Les tensions entre l’Iran et Israël suscitent des préoccupations à l’échelle mondiale, avec des craintes quant à une remontée des prix du pétrole et du gaz. Et Maurice n’est pas immunisé contre les répercussions potentielles de cette crise géopolitique.

Le conflit récent au Moyen-Orient n’avait pas eu un grand impact sur les prix du pétrole et du gaz jusqu’à présent, malgré quelques fluctuations lors des attaques du Hamas contre Israël en octobre dernier, et des offensives des Houthis contre des navires en mer Rouge. Cependant, les récentes attaques de drones et de missiles d’Iran sur Israël pourraient changer la donne. Cette situation tendue a déjà provoqué une hausse des prix : le prix du baril de Brent s’approche de son niveau le plus élevé depuis un an et le prix du gaz a également augmenté. Certains prévoient même un retour à un baril à 100 dollars. À Maurice, la situation est suivie de près par des observateurs économiques. Pour le CEO d’Anneau, Amit Bakhirta, la question de savoir si ce conflit complique les choses entre les États-Unis (qui soutient Israël) et la Russie (qui soutient l’Iran) sera déterminante pour les prix mondiaux des matières premières. « Si la tension s’intensifie, nous pourrions alors assister à une hausse des prix mondiaux des matières premières, à un environnement inflationniste difficile, et donc à des taux d’intérêt qui resteraient toujours, voire plus élevés », prévient-il. 

Le Moyen-Orient, où se situent ces deux pays, est une zone cruciale pour la production et le transport d’hydrocarbures, fait comprendre l’économiste Takesh Luckho. « Une intensification des hostilités pourrait entraîner des perturbations majeures de l’approvisionnement, avec des attaques ciblant des infrastructures pétrolières et gazières, des fermetures de détroits stratégiques ou des perturbations des flux maritimes », dit-il. 

Cela, explique-t-il, aurait des répercussions immédiates sur les prix. « La loi de l’offre et de la demande dicte une hausse des prix du pétrole et du gaz, d’autant que les pays s’empressent de constituer des réserves stratégiques face à l’incertitude. » Selon lui, l’impact ne se limiterait pas à la région. « Les prix élevés des hydrocarbures se répercutent sur l’économie mondiale, alimentant l’inflation et freinant la croissance », soutient-il. Les pays les plus dépendants des importations d’énergie, ajoute-t-il, seraient particulièrement touchés, avec des conséquences sociales et politiques potentiellement importantes.

Pouvoir d’achat 

Pour Maurice, qui importe la totalité de ses besoins en pétrole et en gaz, une augmentation des prix pourrait avoir des conséquences économiques importantes. Avec la pression inflationniste intérieure supplémentaire d’une année électorale, Amit Bakhirta affirme qu’une éventuelle augmentation des prix du pétrole et du gaz pourrait très probablement conduire à une nouvelle vague de hausses de prix à Maurice. « Par conséquent, on pourrait s’attendre à une pression énorme sur le revenu disponible et le pouvoir d’achat de nos consommateurs », dit-il. Par ailleurs, il avance que des risques d’une baisse des investissements directs étrangers en provenance de la région du Moyen-Orient peuvent également être attendus.

Etant donné que Maurice est très exposé aux variations des prix du pétrole et du gaz en raison de sa dépendance aux importations d’hydrocarbures, « le coût de la vie est directement impacté par cette augmentation, touchant notamment les transports, l’alimentation et l’électricité », fait ressortir Takesh Luckho. Les foyers, déjà vulnérables à la crise économique causée par la pandémie de COVID-19, poursuit-il, sont confrontés à une baisse significative de leur pouvoir d’achat, ce qui accentue les disparités sociales. Par ailleurs, il indique que l’augmentation des prix de l’énergie a également un impact négatif sur la croissance économique du pays. « Les entreprises, confrontées à des coûts de production plus élevés, voient leurs marges réduites et sont contraintes d’augmenter les prix de leurs produits et services », soutient l’économiste. 

Pression sur la roupie 

L’observateur économique Imrith Ramtohul abonde dans le même sens. La hausse des prix du pétrole contribuera normalement à une inflation plus élevée, estime-t-il. « Alors que les coûts de production augmentent en raison de la hausse des prix de l’énergie, les entreprises peuvent répercuter ces coûts sur les consommateurs sous forme de prix plus élevés pour les biens et services », affirme-t-il. 

De plus, il explique que des prix de carburants plus élevés peuvent entraîner une baisse du revenu disponible pour les consommateurs, qui dépenseront alors moins dans l’économie. « Comme l’île Maurice importe tout son pétrole/essence, elle peut connaître un déficit commercial aggravé étant donné que le montant dépensé pour les importations de fioul augmentera. Cela peut exercer une pression sur la roupie mauricienne », souligne-t-il. 

Toutefois, Imrith Ramtohul fait comprendre que des prix du pétrole plus élevés peuvent encourager davantage les personnes/entreprises à passer à des sources d’énergies alternatives telles que les véhicules électriques.

Recommandations

amit takesh

Amit Bakhirta : « Une révision et une restructuration du mécanisme de tarification du pétrole et de ses composantes fiscales peuvent être utilisées intelligemment pour atténuer la volatilité des prix à la pompe. »

Takesh Luckho :« Devant ces difficultés, il est essentiel que le gouvernement mauricien adopte des mesures d’atténuation coordonnées afin de préserver les foyers et l’économie. Les solutions possibles incluent des aides financières spécifiques aux populations vulnérables, des subventions aux entreprises et des investissements dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables. »

Jayen Chellum, secrétaire général de l’ACIM : «À Maurice, les taxes principales responsables de la cherté du pétrole»

jayenLe secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM) fait ressortir, en se basant sur les données internationales, qu’il n’’y aura pas de riposte après les attaques survenues durant le week-end écoulé. « On peut dire que la situation est sous contrôle. D’ailleurs, cela se reflète sur le prix du baril qui commence à baisser après avoir atteint un pic de 92 dollars le baril vendredi dernier », soutient-il. Cependant, il souligne que si les conflits entre l’Iran et Israël persistent, les prix du pétrole et du gaz au niveau mondial augmenteront sans doute. 

« Cependant, à Maurice, ce sont principalement les taxes qui expliquent le prix élevé du pétrole. Les conflits géopolitiques ont certes un impact, mais pas aussi conséquent que les taxes imposées par le gouvernement mauricien », déplore Jayen Chellum. Selon lui, il est grand temps d’abolir plusieurs taxes sur le litre d’essence et de diesel pour faire baisser les prix. En ce qui concerne le prix du gaz, le secrétaire général est d’avis qu’il y a une opacité sur le prix d’achat. « Bien que le gaz soit subventionné par l’État, nous ne savons toujours pas à quel prix la STC l’achète. Il faut rendre publics les prix d’achat », insiste-t-il.

Questions à…Rajiv Servansingh, directeur général de la State Trading Corporation : «Il faut être prêt à toute éventualité»

rajivLes tensions entre Israël et l’Iran pourraient entraîner une hausse significative des prix du pétrole et du gaz, selon les analystes internationaux. Quelles sont vos observations ? 
Bien avant l’attaque de l’Iran sur Israël, le prix de l’essence avait déjà pris l’ascenseur et dépassé la barre des 90 dollars le baril vendredi dernier. Avec les récentes attaques durant le week-end, la possibilité que le prix flambe davantage est bien réelle. Il est bon de souligner que tout conflit au Moyen-Orient a un effet sur les prix des produits pétroliers et éventuellement sur Maurice. Personnellement, je suis la situation de très près. Il se trouve que l’Iran est en train de contenir la situation. Les dirigeants iraniens ont d’ailleurs fait une déclaration précisant que c’était une attaque « isolée » et qu’ils n’ont pas l’intention de riposter. Cette déclaration a, dans un certain sens, calmé la situation. Néanmoins, il nous faudra continuer à suivre la situation de près.

Si les conflits persistent et que le prix du baril augmente, quels sont les risques pour Maurice ? 
S’il y a une augmentation continue du prix depuis la dernière réunion du Petroleum Pricing Committee (PPC) jusqu’à la prochaine réunion, cela influencera certainement le prix du pétrole à Maurice. L’impact de cette hausse sur le Price Stabilisation Account sera pris en considération. Il faut comprendre que les conflits géopolitiques au Moyen-Orient persistent depuis plus de six mois déjà. Malgré cela, le prix du pétrole n’a pas augmenté de manière conséquente. Ainsi, les prix à Maurice sont restés plus ou moins stables.

Quand le PPC se réunira-t-il prochainement ? 
La prochaine réunion du PPC est prévue fin mai. Il y a donc suffisamment de temps jusqu’à la prochaine rencontre pour observer de près l’évolution des conflits géopolitiques. Il faut souligner que la situation au niveau mondial est hautement volatile. Il se peut que les conflits entre l’Iran et Israël prennent fin et que le prix du pétrole commence à baisser. Ainsi, il faut être prêt à toute éventualité.

 

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