Situation politique : instabilité et tensions

Il existe un « manque de cohésion au sein du gouvernement ». C’est l’avis unanime des intervenants lors de l’émission « Au cœur de l’info ». Ils ont souligné que le pays passait par une phase d’instabilité. L’éventuelle accession de Pravind Jugnauth au poste de Premier ministre a aussi été discutée.

Jack Bizlall : « Je suis un anti-parti politique »

Pour le dirigeant du Muvman Premye Me (MPM), trois choses caractérisent la situation politique actuelle : un éventuel changement de pouvoir avec Pravind Jugnauth comme Premier ministre, les tractations d’alliance entre, d’un côté, le PMSD et le PTr, et de l’autre, le MMM et le MSM, ainsi que le fait que les gens ont le sentiment qu’il n’y a pas de grande différence entre ce qui se passe aujourd’hui et ce qui se passait sous l’ancien gouvernement.

Pour Jack Bizlall, c’est par défaut que sir Anerood Jugnauth est revenu au pouvoir en 2014, avec le rejet populaire de l’alliance PTr-MMM. Il précise, cependant, qu’à travers le monde, on rejette de plus en plus les partis politiques. « Moi-même, je suis anti-parti politique », affirme-t-il. Jack Bizlall est d’avis que les partis politiques doivent disparaître car ils ont fait leur temps. « Il faut penser à d’autres structures. Ce n’ est pas pour rien que le MPM n’est pas un parti politique. »

Le syndicaliste affirme aussi que Roshi Bhadain doit « assumer ses responsabilités ». « Il a voulu mettre de l’ordre dans le pays et je pense que ses intentions étaient bonnes, mais sa manière de faire était catastrophique. » Il craint que tout cela ne débouche sur plusieurs procès et que l’État mauricien se retrouve à payer des compensations énormes. Jack Bizlall déplore aussi « l’arrogance » de Roshi Bhadain. « Azordi li finn al met case contre Sanspeur. Ou finn deza trouv sa ? »

Jocelyn Chan Low : « Manque de cohésion gouvernementale »

Pour l’observateur politique et historien Jocelyn Chan Low, il y a « un manque de sérénité et de cohésion au sein du gouvernement » et le pays passe par « une période d’instabilité ». Il fait ainsi référence au conflit entre le ministre de la Bonne gouvernance, Roshi Bhadain, et l’ancien ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo, et à la saga Heritage City. « C’est assez surprenant qu’un ministre tienne une conférence de presse après une décision du Conseil des ministres dans une tentative de renverser la situation et que, par la suite, il consigne une déposition contre le Senior Advisor du ministre des Finances. »

L’historien parle aussi du scandale autour du paiement de Rs 19 millions à Kailash Trilochun par l’Information and Communication Technologies Authority, de la succession de sir Anerood Jugnauth, de l’acquittement de Pravind Jugnauth dans l’affaire MedPoint, et du retour en force de ce dernier au sein du gouvernement. Notamment avec un budget qui, selon l’observateur politique, « conforte la position de Pravind Jugnauth comme prétendant au poste de Premier ministre ».

Parallèlement, fait ressortir Jocelyn Chan Low, on peut noter un dégel dans les relations entre Pravind Jugnauth et le leader de l’opposition Paul Bérenger. L’observateur rappelle que, lors de son intervention sur le budget, le leader de l’opposition avait parlé d’une nouvelle équipe économique sous un leadership dynamique. « Donc, il y a confusion et, bien sûr, tout cela met mal à l’aise le PMSD et le ML au sein du gouvernement. »

Nilen Vencadasmy : « Il faut revoir notre système politique »

Pour l’avocat Nilen Vencadasmy, la cacophonie qui règne est liée à notre système politique, celui-ci ne répondant plus aux aspirations de la population. Outre les secousses qui affectent généralement les alliances politiques, il évoque d’autres problèmes comme la concentration du pouvoir entre les mains du Premier ministre, la perpétuation des dynasties politiques et le choix des candidats aux élections générales en fonction de leur communauté au détriment de leurs compétences. « La population en a assez de cette situation de bonnet blanc, blanc bonnet. Malheureusement, c’est une caractéristique de notre système politique, le first past the post, qui favorise la bipolarisation », affirme Nilen Vencadasmy.

Armoogum Parsuramen : « Je suis triste pour mon pays »

L’ancien ministre de l’Édu­cation Armoogum Parsura­men déclare que ce qui se passe l’attriste et ne fait pas honneur à Maurice. À l’époque où il était ministre, affirme-t-il, le gouver­nement, dirigé par sir Anerood Jugnauth, travaillait vraiment pour le pays et plus particulièrement pour les démunis. Et ce, malgré une situation économique difficile. « Zordi mo trouv bann dimounn pe fer seki zot anvi, dir seki zot anvi. Sa pa ti ekziste dan mo lepok sa. » L’ancien ministre de l’Éducation fait ressortir qu’il y a des tensions entre le Premier ministre et des ministres, et que « c’est inacceptable ».