
Alors que les sirènes retentissent autour des ruines de l'ancien immeuble Sky Villa de Mandalay, et que la Birmanie entame une minute de silence en hommage au plus de 2.000 victimes du tremblement de terre, Shwe Sin pense à sa fille disparue.
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"C'est une fille tellement gentille", affirme cette femme de 40 ans.
La dernière fois qu'elle a vu Chit Yamin Pyae, "elle nous a témoigné son respect et son affection, à son père et à moi, en posant son front sur nos pieds", raconte-t-elle en larmes à l'AFP.
Les sirènes marquant le début de la minute de silence en hommage aux personnes mortes dans tout le pays ont retenti mardi à 12 heures 51 min (06H21 GMT), l'heure à laquelle la secousse d'amplitude 7,7 s'est produite vendredi.
Agricultrice dans le nord de l'État de Shan, Shwe Sin était au téléphone avec sa fille de 20 ans, comptable à Sky Villa - l'un des sites les plus sinistrés de la ville - lorsque la terre a tremblé.
Elle raconte avoir entendu sa fille appeler une amie: "Ma sœur, ma sœur! C'est un tremblement de terre! J'ai peur!".
"Qu'est-ce qu'il s'est passé? Qu'est-ce qu'il s'est passé, ma fille?", a tenté de savoir sa mère, sans succès. "J'ai entendu sa voix mais elle n'a pas entendu la mienne", raconte Shwe Sin à l'AFP.
Quelques minutes plus tard, elle ressent les secousses, à 140 kilomètres de là, dans la ville de Momeik, avant de perdre la connexion.
Immeuble moderne et convoité, Sky Villa offrait des avantages comme l'électricité 24 heures sur 24, une salle de sport et une piscine, un luxe rare dans une Birmanie longtemps ravagée par la guerre.
Pourtant, certaines sections se sont complètement effondrées, étage par étage. Un peu plus loin, les six étages supérieurs, en partie dévastés, ont tenu debout grâce aux étages inférieurs.
- "Le jour où j'allais mourir" -
Zhu Zhu était avec une amie au 11e étage lorsque le tremblement de terre a frappé.
"J'ai pensé que c'était le jour où j'allais mourir, j'ai pensé à mes parents", confie à l'AFP cette étudiante de 20 ans. Elle explique avoir couru vers la sortie de secours et s'être échappée par un trou dans le mur.
"Dans le chaos, les gens se sont heurtés les uns aux autres. Je courais à travers les décombres, sans savoir où j'allais. Au bout d'un moment, la poussière s'est dissipée et j'ai réalisé que le bâtiment s'était effondré derrière moi. De nombreuses personnes se sont retrouvées piégées en dessous", décrit-elle.
Parmi les personnes prises au piège, se trouvait son amie Si Si, âgée de 26 ans, qu'elle considérait comme sa grande sœur. Depuis, Zhu Zhu veille tous les jours autour de l'immeuble de 6 heures du matin jusqu'à la tombée de la nuit.
"J'espérais qu'elle survivrait trois jours sans eau ni nourriture, mais après quatre jours, tout ce que je peux faire, c'est attendre qu'on retrouve son corps. Sa famille est en deuil et il n'y a plus d'espoir", confie la jeune femme en essuyant ses larmes.
- Odeur de cadavres -
Des affiches avec des photos de personnes disparues imprimées sur des feuilles en plastique ont commencé à apparaître dans les environs du site. Sur l'une d'entre elles, un homme en bleu lève le pouce dans l'embrasure de ce qui semble être un immeuble de bureaux. Sur une autre, quatre images prises apparemment au sein d'une même famille montrent une femme d'âge moyen, une plus jeune et un petit enfant.
"Ils n'ont pas encore été retrouvés", peut-on notamment lire en légende. "Si vous les trouvez, veuillez contacter ces numéros."
Par endroits, une odeur de cadavre en décomposition se dégage des débris. Une pelleteuse mécanique au milieu d'un tas de décombres frappe le béton, le brisant.
Non loin de là, une femme observe ce qui était auparavant le troisième étage, où vivait son petit frère.
"S'il vous plaît, tenez compte de mes bonnes actions pour qu'il en bénéficie dans sa prochaine vie", prie son amie, faisant allusion à la réincarnation à laquelle croient les bouddhistes.
"S'il vous plaît, pas encore, il pourrait encore être en vie", répond la femme.
© Agence France-Presse

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