On peut se battre sans armes. L’idéologie est plus qu’une épée, elle tue dans l’œuf. C’est avec cette force que Ragini Kistnasamy, tel Alain Resnais dans « Hiroshima, mon amour », a fait sienne cette conviction.
Un petit bout de femme. Une grande voix qui n’a pas peur de se battre pour ses convictions, forgée depuis 1976 par le militantisme authentique de Lalit, ce temple où le kreol morisien est roi dans toute sa plénitude. C’est avec ferveur que Ragini Kistnasamy nous parle de la Palestine, où elle s’est rendue le 24 octobre dernier en tant qu’observatrice internationale, à l’initiative d’une ONG, après les attaques d’Israël sur le territoire.
Elle dénonce avec véhémence ce qu’elle considère comme un génocide israélien en Palestine. « Vous savez ce que c’est que de voir des femmes, des enfants, des personnes âgées souffrir le martyr, être obligés de se cacher dans des trous, de se nourrir de petits riens, de voir pleurer des enfants parce qu’ils ont faim, soif… Cette peur qui vous prend à la gorge. C’est ça, cette guerre : la Palestine ne vit pas, elle survit aux coups de semonce d’Israël », déclare-t-elle avec une certaine amertume et une douleur palpable.
Les larmes lui montent au cœur. Sa voix est saccadée. Elle a vécu quelque temps en Palestine, une zone occupée. Pourquoi la Palestine ? Sa réponse : « Israël inn gagn enn leta, Palestine pena leta, li normal sa ? »
Faut-il créer un État pour la Palestine ? Cela fait 76 ans que ce peuple vit ainsi, soumis, écrasé, dénonce-t-elle. « Il n’y a plus rien là-bas. Pas d’hôpitaux, pas de premiers soins nécessaires, pas d’eau potable, impossible de manger à sa faim, pas de… Il n’y a plus rien. Pensez-vous qu’un peuple puisse souffrir autant à cause des Israéliens, qui sont soutenus par les Américains en armement ? » ajoute-t-elle avec indignation.
Elle déplore que les États-Unis mettent leur veto à tout processus de création d’un État palestinien. « Amerikin blok tou prosesis. Akoz samem ki Lalit pran pozision pou sa pep-la. Nou lager ek nou zarm, nou krwar dan Lalit ki nou ena rezon », dit-elle avec ce militantisme profondement ancré.
Vous savez ce que c’est que de voir pleurer des enfants parce qu’ils ont faim, soif… Cette peur qui vous prend à la gorge"
Pourquoi un tel engagement de sa part ? « Mo lavi se mo langazman, li integre dan mwa, se mo desizion », affirme-t-elle. Et de révéler qu’à l’époque où elle fréquentait le collège Bhujoharry, à la rue St-Georges, elle militait déjà. « J’ai participé à des grèves, je me suis assise à même le sol pour protester contre l’injustice, j’étais devenue, sans le savoir, une militante des droits humains. » Diplômée en Data Conversion et travaillant pour un grand groupe du secteur privé, Ragini Kistnasamy le dit tout simplement : « Mon engagement est total. »
Quand elle était en Palestine, n’a-t-elle pas eu peur face aux soldats israéliens et leurs armes ? « Mes camarades et moi de l’ONG, nous nous sommes mis devant les armes des soldats israéliens pour protéger les cueilleurs d’olives. Les soldats savaient qu’ils ne pouvaient pas tirer sur nous, car cela allait se répercuter dans le monde à travers la presse », relate-t-elle.
Ragini Kistnasamy nous confie un épisode marquant vécu sur place : « Il y avait une tabagie où l’on achetait de l’eau en bouteille. Puis, quand on y est revenus, la tabagie avait pris feu.
Elle était totalement brûlée. C’était l’œuvre des soldats israéliens. Il n’y avait aucun motif, mais ils ont décidé de tout cramer. »
Pour elle, il ne faut surtout pas prendre pour argent comptant ce qui se dit dans la presse internationale. « La désinformation de la part d’Israël est grave. Ce pays balance n’importe quoi pour que les vraies informations factuelles ne soient pas publiées. À Maurice, il faut prendre avec des pincettes ce qui se dit dans la presse internationale, car elle est manipulée par Israël. C’est pour cela que je suis allée en Palestine : pour raconter la vérité sur le terrain, pas ce qui se dit dans la presse », lâche-t-elle avec conviction.
« Kan ou pran larzan lokasion, ou pe pran larzan disan lor Diego »
Ragini Kistnasamy parle aussi de la base américaine sur Diego Garcia : « Si des bombes partent de Diego Garcia vers un autre pays, c’est que ces bombes partent du territoire de Maurice.
Alors, la riposte serait sur notre île de la part du pays attaqué. »
« Est-ce normal de louer Diego aux Anglais ? » demande Ragini Kistnasamy. « Kan ou pran larzan lokasion, ou pe pran larzan disan lor Diego. » Elle rappelle l’existence du Traité de Pelindaba signé par l’île Maurice, parmi d’autres pays du continent africain. ? » (NdlR, The African Nuclear-Weapon-Free Zone Treaty, également connu sous le nom de Pelindaba Treaty, établit une zone sans armes nucléaires sur le continent africain. Il a été ouvert à la signature le 12 avril 1996 au Caire, en Égypte, et est entré en vigueur le 15 juillet 2009.)
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