Législatives 2019

Publication - Rapport de la Commission Justice et Paix : «Ne vendez pas votre vote au plus offrant»

Jean Maurice Labour

Le rapport de la Commission Justice et Paix, du diocèse de Port-Louis, rendu public cette semaine, propose une liste de réponses et pistes afin de répondre aux différentes problématiques qu’elle a recueillies auprès des ONG, dans la presse et en se fondant sur les observations des Nations Unies. Ce document, paraphé par Jean-Paul de Chazal (président) et le père Jean Maurice Labour (aumônier), même s’il se défend d’être exhaustif, passe également en revue les engagements pris par l’alliance lepep en 2014, mais sans jamais le citer.

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Intitulé « Commission Justice et paix-Pour plus de Partage et de Paix », le rapport, se présente come « un outil de travail destiné aux personnes qui voudraient interpeller les parties et les alliances qui brigueront les suffrages de Mauriciens lors des prochaines élections générales », font ressortir ses auteurs qui toutefois précisent que ce document ne se limite pas aux élections, « mais s’exerce par l’organisation des débats pendant et hors des élections sur des enjeux de société autour desquels se construit l’avenir du pays tout au long de l’exercice du pouvoir par les élus. »

Même si les auteurs reconnaissent que des progrès ont été accomplis dans certains secteurs après 2014, ou que des échecs sont constatés, ils n’en désignent pas les responsables, mais, toutefois, pointent du doigt le fait que des promesses avaient été faites. Autre fait majeur : à aucun moment, ils ne remettent en cause le modèle de développement choisi, afin et sans doute pour éviter de piège qui consisterait alors à s’inscrire dans une perspective politique, ce qui n’est pas propre à l’Église à Maurice. Ainsi, alors qu’ailleurs, les écologistes et les partis de gauche rendent l’économie de marché responsable des atteintes à l’environnement, aux pêches extensives, à la déforestation ou encore la surconsommation, l’Église mauricienne laisse le soin à la population de situer les responsables. Mais partant d’un point de vue généraliste, elle fait ressortir que « les tendances négatives actuelles concernant la biodiversité vont freiner le progrès en vue d’atteindre les objectifs de développement durable dans 35 sur 45 des cas où les cibles ont été évaluées, en particulier la pauvreté, la faim, la sante, l’eau, les villes, le climat, les océans, le sol ».

Classée 16e de la World Risk Index 2018, l’Île Maurice est particulièrement exposée aux dérèglements climatiques.  La diminution de la superficie de nos forets, l’utilisation intensive des fertilisants et autres produits agro-chimiques contribuent à la pollution de nos nappes phréatiques. « En 2015, explique Jocelyn Kwok, (cité dans Le Mauricien) directeur de l’AHRIM, 41 % de nos touristes attribuaient la note ‘excellente’ à l’état de l’environnement, en 2017, ce pourcentage d’appréciation a chuté de 19 %. »

« Donne gousse »

Au total, ce sont 27 enjeux qui sont déclinés dans ce document qui tente de répondre aux questions qui y sont posées, mais en préambule, pour coller à l’actualité, les auteurs demandent à l’électorat mauricien de tourner le dos au candidat qui « donne gousse », fait de « promesses ronflantes sans vous dire comment il va les financer, qui insulte et fait des attaques personnelles sur un adversaire », fait valoir son « appartenance communautaire au-dessus des autres valeurs comme le bien commun » et de refuser de voter à un candidat qui ne croit pas à l’urgence climatique, la perte des biodiversités, l’augmentation des catastrophes naturelles ou la hausse du niveau de la mer. Ne vendez pas votre vote au plus offrant et respectez les priorités nationales contre les appétits sectaires et sectoriels. »

Au chapitre des priorités, la Commission fait ressortir l’urgence environnementale, l’augmentation des pauvres et des inégalités, la lutte contre la pauvreté, l’économie et le logement social, les promesses électorales, le contrat social, l’éducation, la drogue, la santé, famille, la Reform Electoral Commission, la Commission Vérité et Justice, Rodrigues, Agaléga, Chagos et les îles éparses. Concernant la pension de vieillesse qui est un enjeu majeur, le rapport fait observer que « le vieillissement de la population et les projections démographiques sont toujours là. En 2040, la pension de vieillesse pourrait nous coûter encore 10 % du PIB en plus parce qu’il y aura encore plus de personnes âgées. »

Logement : maisons plus grandes et petites cours

Au chapitre du logement, les activistes sociaux reconnaissent que la situation s’est améliorée sur le terrain depuis 2014. « Les maisons mises en vente aux familles à faibles revenus sont plus grandes et disposent d’une petite cour et des possibilités d’agrandissement. Chaque quartier dispose d’espaces de loisirs et d’une salle polyvalente. Des activités sociales sont faites en partenariat avec des ONG et le privé », se réjouissent les auteurs du rapport, tout en relevant que sur les 10 000 logements promis en 2014, seulement 1 979 ont été achevés en 2019 tandis que les maisons en amiante sont encore trop nombreuses.

Dans le secteur éducatif, le rapport fait valoir que 46 ans après l’Indépendance, « nous n’avons toujours pas une politique de langues définie à l’école. L’anglais et le français ne sont pas des langues maternelles pour la grosse majorité des enfants, mais sont encore enseignées comme telles. Le Kreol mauricien, langue maternelle, n’est enseigné qu’en option. » Par ailleurs, poursuivent les auteurs du rapport « l’éducation pré-primaire est obligatoire certes, mais le niveau des écoles et les programmes qu’elles proposent restent différents malgré la publication d’un curriculum national. Cela a pour conséquence que des élèves entrent à l’école primaire avec des capacités et des compétences tres inégales. »

Extraits du rapport

Leçons particulières, Prevoc et éducation gratuite 

« Les enfants entrant en Prevoc n’ont pas tous les mêmes compétences. De l’expérience de certains enseignants, il y a au Prevoc des élèves qui souffrent de problèmes médicaux, psychologiques et psychiatriques (Les enfants du Main Stream ont aussi les mêmes problèmes) qui n’ont jamais été détectés. 

 Les leçons particulières sont « institutionnalisées », mais non-réglementées, ce qui laisse les enfants et leurs parents, à la merci d’enseignants, parfois peu scrupuleux. 

L’éducation est gratuite, mais coûte très chère en termes de leçons particulières indispensables, matériaux scolaires et de transport (bien que le transport public soit gratuit, beaucoup d’enfants prennent des transports privés). »

Social : les recommandations de l’ONU à Maurice 

« Faire en sorte que tous les bénéficiaires potentiels soient informés de leur droit d’être inclus. Que tout obstacle pratique à l’enregistrement soit levé. 

Que les conditions énoncées dans le contrat social conclu avec les bénéficiaires ne renforcent pas les stéréotypes sexistes. 

Prendre des mesures efficaces pour aider les personnes qui n’ont pas accès à Internet ou ne possèdent pas les compétences numériques nécessaires pour bénéficier des infrastructures des TIC de pointe, et de veiller à ce que dans l’État toutes les personnes bénéficient sans discrimination des progrès scientifiques et de leurs applications, notamment des TIC. » 

Minimum vital pour un ménage : Rs 28 092 par mois

Le seuil de revenus pour bénéficier de l’aide de la NEF est de Rs 2 720 pour un adulte et Rs 1 360 pour un enfant par mois. Le seuil par mois est de Rs 2 720 pour 1 adulte et Rs 8 160 pour une famille de 4 personnes (2 adultes et 2 enfants). Le maximum de Rs 9 520 par mois correspond à une famille de 5 personnes (2 adultes et 3 enfants). 
Le Household Budget Survey 2017 estime le seuil de pauvreté pour une famille de 4 personnes (2 adultes et 2 enfants de moins de 16 ans) à Rs 17 657 (2012 : Rs 13 330) par mois. 

La famille moyenne, toujours d’après le HBS 2017, dépense Rs 7 135 (2012 – Rs 6 540) par mois pour se nourrir (Food and non-alcoholic beverages). 

La Commission Justice & Paix a, en 2013, calculé le minimum vital pour un ménage (2 adultes et 2 enfants) à Rs 28 092 par mois. 

La femme au foyer est définie comme « Inactive » dans le Household Budget Survey 2017.

 

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