Depuis 2013, la Mauritius Women Emancipation Association, que Priya Sunkur-Beetul préside, est engagée dans une action de terrain afin de venir en aide aux familles vivant dans l’extrême pauvreté. En 2019, elle fait le bilan de son engagement, avec un constat parfois d’impuissance, mais se réjouit que davantage d’hommes aient rejoint l’association. Les défis, indique-t-elle, restent les mêmes, mais avec une pointe souvent marquée par l’association des drogues aux jeunes dans les milieux défavorisés.
« Parfois, je ressens une certaine impuissance, en raison des moyens qui font défaut face aux attentes qui nous dépassent. Mais je me reprends quand je retrouve les membres de l’association, je vois leur enthousiasme, puis il y a le soutien de ma famille », explique Priya Sunkur-Beetul, employée dans une grosse compagnie de la capitale. Son engagement social, en 2013, est à la fois dans la continuité de celui de son père, Bawansing, travailleur social, puis d’un constat personnel. « J’avais rencontré des femmes issues de milieux extrêmement modestes qui me racontaient leurs problèmes face à la lenteur administrative et surtout leurs difficultés à trouver un emploi. Comme je possède un diplôme en marketing, je me suis dit que je pouvais servir de pont entre elles et les entreprises qui recrutent », se souvient-elle.
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Lorsqu’elle lance l’association, en peu de temps et grâce à sa détermination et son dynamisme, elle réussit à regrouper quelque 200 femmes. « Au départ, il y avait quelques femmes de l’association sur le terrain partout à Maurice. Grace à leur travail, elles ont pu obtenir l’adhésion d’autres femmes qu’elles ont aidées. C’est comme un travail à la chaîne, les nouveaux membres sont des femmes qui voulaient elles aussi devenir bénévoles dans notre association », explique-t-elle.
Avec ces membres, ce sont des données sociales et économiques de première main qui atterrissent dans les registres de l’association, avant d’être informatisées pour être traitées de manière scientifique. « Cette méthodologie nous a permis d’établir une cartographie de la pauvreté et de ses séquelles, confie-t-elle. Mais, nous faisons attention à ne pas passer trop de temps dans le travail théorique, les personnes en état d’extrême pauvreté attendent des résultats rapides et concrets. Ils veulent le contact visuel afin d’être écoutés, elles font peu de confiance aux politiciens. »
Actions de l’État
Comment l’association vient-elle en appoint aux actions de l’État, dont Priya Sunkur-Beetul reconnaî t un certain nombre d’actions efficaces mais qui ne ressortent pas des moyens de son association ? « Les aides matérielles publiques sont nécessaires mais il faut aussi un accompagnement psychologique, qui consiste à faire naître la confiance chez l’individu. Seules les personnes qui ont pu sortir la tête de l’eau peuvent aider les autres, en partageant leur propre parcours », explique-t-elle. Mais, elle reconnaît les limites à l’action sociale, de par essence bénévole. « Parfois, certaines personnes attendent trop par rapport aux demandes de base dont elles ont vraiment besoin. On a remarqué que certains choisissent d’acheter à des prix chers des produits électroniques, comme des téléviseurs, portables, ou encore un abonnement à une chaîne satellitaire, plutôt que de dépenser utile. Même avec une bonne éducation consumériste, ils ne résistent pas aux sirènes de la pub. »
Aussi, certaines actions de l’association se focalisent-elles sur des lieux de vie que partagent des familles, avec l’emphase sur l’utilisation commune des terres à une culture ou un élevage de subsistance. « Les récoltes, l’élevage et les pontes leur permettent de se nourrir et, éventuellement, de vendre le reste », fait-elle ressortir.
Rubriques offres d’emploi
Les rubriques offres d’emploi sont d’un grand apport, permettant d’entrer en contact avec une société qui recrute une personne au profil précis. « Compte tenu du niveau des demandeurs d’emploi parmi nos membres, nous essayons de dénicher le poste correspondant. Mais, il faut aussi qu’ils possèdent un profil sans reproche pour décrocher le job », fait-elle observer.
Depuis son engagement, la jeune femme a fini par équilibrer son agenda, entre son travail et sa vie familiale. Tous les après-midis, de retour au bercail, elle consacre plus d’une heure à son ordi pour vérifier les emails adressés par les membres de l’association et s’assure de l’authenticité des demandes d’aide. « C’est un travail collectif, les compétences individuelles de chacun se manifeste sur le terrain, mais, à la fin, c’est le groupe qui est récompensé », assure-t-elle. Comme sa famille est impliquée dans les actions de l’association, il n’est pas rare que sa fille aînée de huit ans l’accompagne lors ses descentes sur le terrain durant les week-ends. « Ces sorties lui permettent de se rendre compte des réalités sociales à Maurice et de l’existence des poches d’extrême pauvreté, elle intériorise aussi le sens du sacrifice, de la valeur de l’argent », dit-elle, dont l’association sera bientôt rebaptisée ‘Ansam nu avanse’.
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