Politique : les ponts sont coupés entre l’Entente de l’Espoir et Nando Bodha

Le leader du Rassemblement mauricien a provoqué l’agacement de ses partenaires politiques. Les déclarations de Nando Bodha, vendredi dernier, quant à ses réserves sur une alliance avec le Parti travailliste, jettent un gros doute sur l’avenir de l’ex-ministre au sein de l’Entente de l’Espoir.

Vendredi dernier, Nando Bodha a déclaré qu’il n’était pas convaincu qu’une alliance avec Navin Ramgoolam puisse remporter les prochaines élections. Il n’est pas non plus persuadé qu’une telle alliance puisse apporter un changement radical. Néanmoins, il a précisé qu’il n’avait aucun problème d’ordre personnel avec le leader du Parti travailliste (PTr). Selon lui, tous les partis politiques devraient se rassembler autour de l’Entente de l’Espoir. Il a également affirmé qu’il compte reprendre le flambeau de cette plateforme si ses partenaires du Mouvement militant mauricien (MMM) et du Parti mauricien social-démocrate (PMSD) concluent une alliance avec le PTr.

« Se enn deklaration ki enerv tou dimoun », nous dit un dirigeant de l’Entente de l’Espoir. S’il refuse de commenter à haute voix la dernière sortie de Nando Bodha, il avance cependant que les ponts sont coupés pour le moment entre l’Entente de l’Espoir et le leader du Rassemblement mauricien (RM). Aucune rencontre n’est prévue avec Nando Bodha et il n’y aura aucune activité conjointe avec le RM, indique-t-il. Une décision sera prise au retour du leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, qui n’est pas à Maurice actuellement.

Arvin Boolell, du PTr, estime que « Nando Bodha a le don de la parole facile ». Or, poursuit-il, un politicien doit savoir mesurer ses propos. « C’est sa façon de voir les choses. Pour nous, au PTr, l’essentiel, c’est l’alternance. Notre programme électoral, c’est de répondre aux aspirations d’un électorat qui en a visiblement marre d’un régime gouvernemental en décadence. Il faut voir l’essentiel et non dire des choses qui vont à l’encontre. »

Quid de la déclaration de Nando Bodha selon laquelle il est disposé à reprendre le flambeau de l’Entente de l’Espoir si le MMM et le PMSD se rangent aux côtés du PTr ? « C’est à lui de faire valoir ses droits et ses obligations au sein de l’Entente de l’Espoir. Qu’il assume pleinement ses responsabilités. On respecte sa décision mais on espère qu’il reviendra à de meilleurs sentiments », répond Arvin Boolell. Navin Ramgoolam, toutefois, n’a pas manqué de lancer quelques piques à l’encontre de Nando Bodha lors d’une réunion du PTr à Triolet vendredi. « Certains veulent uniquement le poste du Premier ministre », a-t-il notamment déclaré.

Quel poids électoral ?

Pour l’observateur politique Dharam Gokhool, Nando Bodha doit se poser une question : quelle est sa force électorale ? « Est-ce qu’il a une base dans plusieurs circonscriptions du pays ? Si ce n’est pas le cas, alors quelle légitimité a-t-il pour venir dire que c’est lui qui doit rassembler tous les partis de l’opposition. Il vit dans un autre monde politique. » Ainsi, il se demande quel poids pourrait bien avoir l’ex-ministre entre, d’un côté, le Mouvement socialiste militant (MSM), et de l’autre une alliance PTr-MMM-PMSD.

Selon Dharam Gokhool, le leader du RM semble ne pas bien comprendre l’enjeu des prochaines élections générales. « L’objectif premier est le changement de gouvernement. Il y a donc un problème dans l’analyse de Nando Bodha. Il doit comprendre qu’il faut arriver à une transition et que ce n’est qu’après que les partis politiques pourront se positionner. »

Quant à l’historien et observateur Jocelyn Chan Low, il pense que Nando Bodha avait un intérêt à faire de telles déclarations. « Pourquoi a-t-il quitté son poste de ministre pour rejoindre l’opposition. Il veut se positionner comme le futur Premier ministre. Le problème, c’est qu’au sein d’une alliance PTR-MMM-PMSD, cette fonction serait pour le PTr. Du coup, il serait hors-jeu. » Il ajoute que le profil de Nando Bodha est perçu comme une menace pour le leader des rouges, Navin Ramgoolam. « Il n’a clairement pas sa place au sein de cette alliance. Même s’il arrive à se faire accepter, son rôle sera marginalisé par la suite », explique-t-il.

Ashwin Kanhye, Thierry Laurent et Fernando Thomas