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Pléthore de mesures sociales : le coût caché de la «générosité» gouvernementale

Le Premier ministre a annoncé, samedi, plusieurs mesures en faveur de la force policière.

Le gouvernement en fait-il trop ? La question se pose devant les nombreuses annonces successives en faveur du pouvoir d’achat de la population depuis quelque temps, notamment dans un contexte d’élections. Des observateurs mettent en garde contre le revers de la médaille.

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Le gouvernement mauricien se montre très « généreux ». Trop ? Entre l’augmentation de la pension de vieillesse, les hausses salariales et le versement d’arriérés, le pay back de 12 mois aux fonctionnaires avec l’application du rapport du Pay Research Bureau en 2025, et, samedi encore, l’annonce de plusieurs schemes et compensations aux policiers (voir encadré), certains y voient des « cadeaux » pour séduire l’électorat à l’approche des élections générales. Toujours est-il que les « largesses » du gouvernement suscitent diverses réactions. 

Sur le court terme, cette injection de fonds semble répondre aux attentes d’une population en quête de soutien économique. L’observateur Abdallah Goolamallee avance qu’après le passage de la pandémie de COVID-19, « les réalités économiques ont profondément changé ». « La crise sanitaire a lourdement impacté l’économie mondiale, plongeant de nombreux pays, dont le nôtre, dans une récession brutale. Cette crise économique a eu des répercussions sociales, et la population en paie aujourd’hui le prix fort », explique-t-il. 

Il y a la perception que le gouvernement « donne trop », affirme-t-il. Abdallah Goolamallee rappelle que « la priorité actuelle est de rétablir le pouvoir d’achat des citoyens ». « Tout le monde dit que la vie est devenue chère. Donc, l’une des façons de résoudre ce problème est de réaligner les salaires, d’augmenter la pension de vieillesse et de fournir des allocations pour rétablir l’équilibre social », insiste-t-il.

La question se pose : alors que des défis économiques se profilent à l’horizon, tels que le ralentissement de la croissance mondiale et les incertitudes liées à l’inflation, est-il prudent de dépenser autant ? « Au cœur du débat économique actuel se trouve un problème majeur : l’inflation. En économie, on parle souvent de ‘l’effet multiplicateur’ pour désigner les conséquences en chaîne d’une décision financière. Augmenter les salaires est, sans conteste, une initiative louable pour soutenir le pouvoir d’achat des citoyens. Mais cette mesure a un revers : elle risque de provoquer une hausse des prix des biens et services, entraînant ainsi la population dans une spirale inflationniste. Une dynamique dangereuse pour l’économie », redoute l’enseignant de sociologie et observateur Olivier Précieux. 

« Notre » argent

Il concède qu’il est « indéniable que disposer de plus d’argent peut sembler positif à première vue ». Cependant, fait-il comprendre, cette politique de hausse des salaires a des répercussions directes sur le coût de la vie. « Si les salaires augmentent, mais que les prix des commodités grimpent à un rythme plus rapide, le gain se transforme en illusion, laissant les ménages dans une situation similaire, voire pire, qu’auparavant. Cette crainte d’une spirale inflationniste n’est pas infondée : les hausses successives des prix peuvent devenir incontrôlables et provoquer un cercle vicieux difficile à enrayer », dit-il.

Le débat s’élargit lorsqu’on considère la notion de « notre » argent. En effet, l’argent redistribué par l’État provient des impôts et autres contributions de la population elle-même. Il s’agirait donc d’un retour de ce qui a été collecté. Mais cette redistribution soulève une question essentielle : ces mesures sont-elles la meilleure utilisation possible des fonds publics ? Le gouvernement, lui, défend ses choix en arguant qu’il répond au bien-être des citoyens et qu’il maintient un niveau de vie décent pour tous. Mais cette approche paternaliste est-elle vraiment la meilleure solution ? À force de donner sans compter, le gouvernement risque-t-il de créer une dépendance, où les citoyens s’attendent constamment à ce que l’État intervienne pour pallier leurs difficultés financières ?

Feel-good factor

« Nous assistons à une redistribution de la richesse, mais il y a une portée très électoraliste », souligne l’économiste Takesh Luckho. Selon lui, l’objectif ultime de cette politique est de créer un feel-good factor susceptible de permettre au gouvernement de remporter les prochaines élections.

L’économiste estime, par ailleurs, que cette approche tend à engendrer « une dépendance et une attente de la population envers le gouvernement ». « Je ne suis pas contre les allocations. Mais si l’on redistribue sans introduire de réformes structurelles, le feel-good factor sera temporaire », prévient-il. L’observateur Olivier Précieux va plus loin : « La question se pose. Sommes-nous en train de créer une société d’assistanat ? En multipliant les aides et en redistribuant de manière massive, ne risque-t-on pas de rendre la population dépendante de l’État pour subvenir à ses besoins quotidiens ? »

L’équilibre à trouver

Une politique de soutien est essentielle, surtout pour les plus vulnérables, poursuit-il, « mais elle doit s’accompagner d’une gestion rigoureuse de l’économie ». Et d’ajouter : « Il est crucial de trouver un équilibre entre l’aide nécessaire aux plus démunis, à travers des mesures comme le salaire minimum, et la maîtrise de l’inflation pour éviter de plomber le pouvoir d’achat général. » Pour éviter de sombrer dans une crise inflationniste profonde, ajoute-t-il, il est impératif de revoir les stratégies économiques, d’encadrer les hausses salariales et de garantir une gestion efficace des ressources de l’État.

Cependant, l’observateur Abdallah Goolamallee estime que la situation actuelle résulte d’une conjoncture difficile héritée des événements récents : « Nous n’avons pas pu investir comme nous le souhaitions pour produire de la richesse. Les restrictions imposées par la crise sanitaire ont limité les capacités d’investissement et freiné la croissance économique. » Il défend donc la stratégie gouvernementale : « Le gouvernement, conscient du bien-être de sa population, a préféré donner des allocations pour soutenir ceux qui sont les plus touchés. Ces mesures sont indispensables pour éviter une dégradation encore plus sévère des conditions de vie des citoyens. »

Pravind Jugnauth annonce un « Risk Compensation Grant » pour les policiers

Le Premier ministre, Pravind Kumar Jugnauth, a annoncé un nouveau système de compensation, sous la forme d’un Risk Compensation Scheme, pour tous les membres de la force policière. Il s’exprimait dans la matinée du samedi 24 août, lors d’une cérémonie de promotion organisée au Gymkhana. « Vous pouvez compter sur le gouvernement pour vous épauler et vous donner tout le soutien possible afin de bien faire votre travail », a-t-il ajouté.

En présence de leurs familles, 270 policiers ont reçu des distinctions, notamment la President’s Long Service and Good Conduct Medal. De plus, 240 policiers, récemment promus à de nouveaux grades, ont reçu leurs lettres de confirmation. Au total, 1 871 policiers ont été promus à des grades supérieurs, incluant des sergents, des inspecteurs, des chefs inspecteurs et des surintendants de police (SP). Parmi les promus, on trouve Rajesh Moorghen, désormais ASP ; Roland Dabeesingh, également ASP ; Kailash Dussoye, promu SP ; Ramjit Jheengut, promu SP ; l’ASP Laljee, promu SP ; Mohit Ramma, au rang de SP ; et Goinsamy Veerasamy, également SP. L’ASP Ahad Boolaky, de l’Helicopter Squadron, a également été promu au poste de SP.

Les mesures annoncées applicables à partir du 1er octobre 2024 :

  • Décès dans l’exercice des fonctions : une compensation de Rs 3 M sera accordée à la famille d’un policier décédé, au lieu de six années de salaires.
  • Funeral Grant : cette allocation passera à Rs 15 000.
  • Amendement au Pension’s Act : la famille d’un policier ayant moins de 10 ans de service, qui perd la vie, recevra désormais une compensation de 20 mois de salaire au lieu de 12 mois.
  • Blessures en service : la compensation pour les policiers blessés passe à Rs 400 000, en fonction du degré de capacité physique. Contrairement aux pratiques antérieures, le paiement se fera « tout de suite », sans attendre l’âge de la retraite.
  • Retraite forcée pour invalidité complète : un policier contraint de prendre sa retraite en raison d’une « invalidité complète » bénéficiera désormais d’une compensation de Rs 2 millions.
 

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