Le discours du ministre des Finances attendu d’ici une semaine prévoit une orientation budgétaire axée sur la résilience sociale, économique et environnementale. Toutefois, selon l’économiste Pierre Dinan, ces mesures ne doivent pas être dictées par des considérations électorales à court terme, mais plutôt par une vision de gouvernance à long terme pour assurer le bien-être durable de la population.
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Le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, a fait comprendre que son prochain Budget sera axé sur trois thématiques : résilience sociale, économie et environnement. Est-ce une bonne stratégie ?
Nous le saurons une fois qu’il aura terminé son discours du Budget 2024-25. Il convient de rappeler ce que signifie le terme à la mode : résilience. À mon sens, cela signifie endurance. Certes, puisque le rôle du ministère des Finances est de fournir au gouvernement les moyens de remplir sa mission pour le bien-être durable, sinon le mieux-être, de l’ensemble de la population, la résilience que promet le ministre doit concerner non seulement le social, mais aussi l’économie et l’environnement. C’est pourquoi les mesures à prendre doivent s’inscrire dans une perspective de gouvernance à moyen et long termes, et certainement pas dans l’horizon restreint des prochaines élections.
Comment le gouvernement peut-il favoriser la résilience sociale ? Quelles mesures préconisez-vous ?
Dans le domaine social, l’objectif évident est d’aider ceux qui éprouvent des difficultés financières majeures pour faire face aux réalités de la vie. Les exemples sont bien connus et notre pays a, depuis des décennies, adopté des pratiques généralement liées à l’État-providence, comme la santé et l’éducation gratuites, sans oublier les allocations de pensions pour les personnes handicapées ou âgées, n’ayant peu ou pas de moyens de subsistance. En règle générale, ces facilités offertes par le gouvernement sont disponibles pour ceux qui en font la demande. Le système ne comporte pas une formule d’aide automatique basée sur des critères prédéfinis et sans référence aux moyens de l’éventuel bénéficiaire. Quant aux autres citoyens disposant de moyens personnels, ils peuvent choisir d’avoir recours à des services privés et donc payants. Ces pratiques utilisées pendant des décennies ont fait leurs preuves. Certes, des améliorations de fonctionnement seraient bienvenues, et c’est ce à quoi nos gouvernants devraient s’atteler.
Quel est l’impact du vieillissement de la population mauricienne sur les dépenses sociales du gouvernement et quelles sont les prévisions pour les prochaines années concernant ces dépenses ?
Ce qu’il y a de nouveau depuis quelques années, c’est l’octroi universel de pensions à des catégories de personnes, surtout caractérisées par leur âge. Compte tenu du vieillissement de la population et de la réduction conséquente de Mauriciens en pleine capacité d’activité économique, cela expose le pays à des obligations financières croissantes. Il y a donc lieu de craindre que les dépenses sociales du gouvernement ne s’accroissent. D’ailleurs, les prévisions publiées l’an dernier en font déjà état, avec Rs 51,1 milliards durant l’exercice présent, Rs 59,8 milliards en 2024/25 et Rs 65,5 milliards en 2025/26.
L’éducation nationale n’a d’autre choix que de se mettre au service des jeunes de ce pays, lesquels doivent être adéquatement formés pour gérer toutes les nouvelles technologies numériques issues de la présente révolution mondiale»
Quelles mesures peuvent aider à booster l’économie ? Que recommandez-vous concrètement ?
Le renforcement de l’économie mauricienne, sa résilience, se concrétisera lorsque toutes ses ressources seront mises à contribution et fonctionneront à plein rendement. Quelles sont ces ressources ? Commençons par la population mauricienne dans son ensemble. Sachons nous mettre à l’œuvre, selon notre santé physique et mentale, notre sexe, notre statut marital, les moyens financiers dont nous disposons, les études que nous avons faites, la formation dont nous avons bénéficié, et ainsi de suite. Et surtout, persuadons-nous d’être capables d’accomplir ces tâches au niveau national, car nos compatriotes des années 80 ont, grâce à leur détermination et à une gouvernance serrée et disciplinée, réussi à relancer l’économie mauricienne qui avait subi deux dévaluations de la monnaie nationale et souffert des dégâts causés par une série de cyclones. Ces compatriotes d’hier parvinrent même à ramener à 11 le nombre de jours fériés qui avait atteint 26. Il n’y eut point de protestations dans les lieux publics du pays.
Et que dire des autres ressources de ce pays ?
L’espace terrestre qui ne nous fournit plus les variétés et quantités de légumes et de viande requises pour nous nourrir ainsi que les touristes, l’espace maritime qui ne nous fournit pas suffisamment de poissons et de fruits de mer, les villes sans attraits particuliers pour attirer des touristes avec des moyens financiers importants, des musées dont la réfection perdure. En troisième lieu, préparons l’avenir. L’éducation nationale n’a d’autre choix que de se mettre au service des jeunes de ce pays, lesquels doivent être adéquatement formés pour gérer toutes les nouvelles technologies numériques issues de la présente révolution mondiale.
L’environnement sera un autre axe clé du prochain Budget. Comment se protéger contre les effets du changement climatique ?
Nous devons nous soucier de construire de manière durable, aussi bien les édifices et les maisons que les drains et canaux d’évacuation des eaux de pluie. Ce n’est pas tant l’exécution des travaux dans ces domaines qui fait défaut, mais plutôt la décision de les construire. En deuxième lieu, un suivi rigoureux pour les entretenir et les réparer, le cas échéant, est primordial. Vous l’aurez compris : la responsabilité première incombe aux autorités publiques, notamment le ministère des Travaux publics, les conseils municipaux et les districts. Deux comportements du citoyen responsable sont à envisager : se munir des conseils de professionnels compétents et honnêtes avant de se lancer dans un projet de construction, et dénoncer systématiquement les effets d’annonce. En bref, nous ne pourrons faire face aux dégâts causés par le changement climatique que si nous nous comportons en citoyens responsables.
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