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Nouvelle frontière

Concept que l’on doit à l’entrepreneur belge Gunter Pauli, qui militait pour des solutions industrielles moins polluantes, l’économie bleue a pour enjeu de créer un nouveau modèle économique grâce à l’environnement. Le bleu, couleur du ciel, de la mer et de notre planète, s’oppose au vert du développement durable, notion trop ambiguë pour susciter l’adhésion de tout le monde. A la décroissance verte, on préfère la croissance bleue, générée par un déplacement de la frontière économique vers le large. On peut faire des océans, qui couvrent les deux tiers de la Terre, des sources de nourriture, de médicaments et d’énergie pour assurer la double sécurité alimentaire et énergétique. La première conférence ministérielle de l’Indian Ocean Rim Association sur l’économie bleue a identifié quatre principaux segments de ce nouveau pôle de développement : l’industrie de valorisation des produits de la pêche en haute mer, l’aquaculture, les énergies marines renouvelables, telle l’énergie des vagues, et les activités portuaires, dont le ravitaillement de navires. D’autres secteurs en mer potentiels sont la biotechnologie marine, le dessalement de l’eau de mer, la transformation des algues marines qui ont des vertus médicinales et thérapeutiques, et les applications d’eau profonde comme la climatisation à échelle industrielle. L’industrie des produits de la mer contribue 1,4% du PIB mauricien en 2014, l’exportation annuelle du poisson frais et traité représentant Rs 14 milliards, soit 17% des exportations de biens de Maurice. Il est encore trop tôt de parler de « nouveau pilier économique », car les autres secteurs de l’économie bleue ont à peine démarré. Reste que notre zone économique exclusive de 2,3 millions de kilomètres carrés, ayant le deuxième stock de thon au monde, recèle un grand potentiel de création de richesse. L’eau de nos fonds marins est extrêmement froide et riche en éléments nutritifs et en minéraux. Un tiers du cargo maritime mondial et deux tiers du trafic pétrolier transitent dans la région, et plus de 30 000 navires traversent les eaux mauriciennes chaque année. Les opportunités de création d’emplois sont énormes. De manière générale, ceux ayant des compétences dans les métiers de l’entretien et de la fabrication seront demandés. Plus spécifiquement, le marché du travail mauricien de demain aura besoin d’ingénieurs, de scientifiques, de biologistes et de soudeurs qualifiés dans les filières de la technologie sous-marine, de l’énergie éolienne en mer et de l’utilisation des algues dans les produits cosmétiques. Cependant, il existe un déficit de compétences, et notre connaissance de la mer est encore limitée. Maurice manque de logistiques et d’infrastructures portuaires, d’où la priorité du gouvernement de moderniser le port et de l’étendre sur deux kilomètres, de Pointe aux Sables à Baie du Tombeau. Mais le pays ne peut pas réussir tout seul. Or les efforts des Etats dans les domaines de la recherche maritime et de la sécurité en haute mer ne sont pas coordonnés. C’est pourquoi il est essentiel d’avoir la bonne approche pour mettre en place l’économie bleue, soit en trois volets : la collecte de données sur le milieu marin, l’acquisition de compétences et l’amélioration de la coopération entre les dix-huit pays membres de l’IORA, notamment sur le renforcement des capacités et le transfert technologique. Afin de mieux comprendre le potentiel océanographique de Maurice, il faudra construire une base de données et réaliser une carte numérique des fonds marins de l’océan Indien et des sites potentiels d’exploitation. Une telle cartographie permettra aux entreprises privées et aux pouvoirs publics de disposer des informations communes pour réduire les coûts de leurs études et pour mieux planifier leurs investissements. L’exploitation des avantages de notre océan doit se faire en respectant l’équilibre de l’écosystème marin et en assurant la pérennité des ressources halieutiques. L’aquaculture, considérée comme une alternative à la surpêche, présente des risques de pollution. Pour un petit pays comme Maurice qui dépend énormément du tourisme, il faut savoir réconcilier l’aquaculture et la nécessité de préserver les lagons. Bref, il convient de protéger la mer contre une ruée incontrôlée sur ses richesses et contre tout préjudice environnemental causé par l’homme.
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