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Monde du travail : des métiers rares mais dans l’ère du temps

La popularité des métiers rares à Maurice a dépassé les frontières de leur région natale. Rencontre avec ceux exerçant toujours un emploi qui se démarque du paysage professionnel du pays.  La qualité se paie. À l’ère de la technologie, certains ont choisi des carrières qui se démarquent des autres. Cinq spécialistes nous parlent de leur emploi qui est, avant tout, leur passion.

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Seconde vie aux chevaux retraités

Passionnée de chevaux depuis sa tendre enfance, Arunima Gobin-Bhunjun défend les valeurs du milieu équestre. À 45 ans, sa mission est de donner une nouvelle vie aux chevaux retraités des champs de courses. La directrice du Centre équestre de Riambel ouvre la voie à des loisirs et au tourisme équestre. 

L’objectif de cette écurie est simple : sauver les chevaux, souligne Arunima Gobin-Bhunjun. « J’offre une seconde vie à ces chevaux qui à leurs heures de gloire étaient aimés de tous. » Ces chevaux, observe-t-elle, s’adaptent souvent difficilement à la retraite, d’où la nécessité de faire preuve de patience. « Le cheval de course a subi un entraînement intensif, une alimentation appropriée et un suivi médical adéquat. Il arrive ici hyper stressé. Seule une main gentille peut calmer un cheval énervé. »

D’aussi loin qu’elle se souvienne, Arunima Gobin-Bhunjun affirme que ce lien spécial lui a toujours procuré un sentiment de bien-être. Cela fait 35 ans qu’elle vit son histoire d’amour avec les chevaux. Outre d’être une femme d’affaires avisée, la directrice du centre équestre a le don de communiquer avec ses pensionnaires. « Le cheval, c’est l’école de la patience, du sang-froid, de la maîtrise de soi et de la diplomatie. Pour moi, chaque cheval est unique, tout comme les hommes. Il est très expressif. Bref, l’étalon reste non seulement un bon maître pour le corps, mais aussi pour l’esprit et le cœur. »

Arunima Gobin-Bhunjun gère aussi un institut de beauté. Tous les mercredis et les samedis, elle quitte Roche-Brunes pour se rendre à Riambel pour dorloter ses chevaux, les monter et enseigner l’équitation. « Quand je regarde mes chevaux, j’entrevois mes espoirs et mes rêves. Je vois la raison de mon sourire et mon succès. Je vois ma fierté et mon âme. Le miroir renvoie votre  image. Quand je regarde mes chevaux, je me vois. Sans mes chevaux, je ne suis plus que la moitié de moi-même. »

Passion pour la culture du cresson

Sanatun Nowbuth a un profond amour pour la culture du cresson. Il est quelqu’un de patient. Après une quinzaine d’années de dur labeur pour apprendre et maîtriser les techniques de la culture du cresson, cet habitant de Lallmatie est un homme heureux. À 58 ans, il est un vrai battant. Père de famille, cet entrepreneur a nourri sa passion pour la culture du cresson de fontaine, dont il a fait son métier. Ce talent, il le tient de ses parents.

Depuis, il exerce son rôle de cultivateur de cresson. « Le cresson pousse dans une eau pure provenant d’une source. Cette eau circule en permanence dans la cressonnière et fournit à la plante les nutriments dont elle a besoin pour sa croissance. Au cours de la récolte, les tiges sont étalées sur les plans d’eau », explique Sanatun Nowbuth. Il ajoute que la culture du cresson nécessite très peu d’entretien. « Il faut assurer que l’eau ne stagne pas au pied de la plante. Le sel ainsi que d’autres aliments nourrissent le cresson. La plante bénéficie aussi de traitements d’herbicide moins toxiques, afin de la protéger des chenilles. Les mauvaises herbes sont débarrassées à l’aide d’un balaie. » La récolte commence au bout de quatre semaines après la plantation. Une fois le cresson d’eau prêt, poursuit Sanatun Nowbuth, il coupe les pousses avec un couteau pour ne pas les arracher.

La récolte se fait dans la nuit. « En compagnie de mon épouse et un proche, en une nuit, on prépare 700 à 1 000 bouquets de cresson. On les coupe avec rapidité. Puis on les livre aux marchands de légumes à travers le pays. »

Rajen Govinden, marchand de pistaches : « Le handicap m’a appris la vie »

Cet homme de 61 ans n’a qu’un bras. Rajen Govinden est marchand de pistaches et de « gram bouilli » à Rivière-du-Rempart. Il exerce ce métier depuis plus de 35 ans et habite la localité. Tous les après-midis, il enfourche sa bicyclette avec une trentaine de variétés de friandises. Ce père de famille travaillait jadis comme laboureur et a perdu l’usage de son bras droit à l’âge de 25 ans, alors qu’il aidait un ami à construire sa maison.

Une fois sorti de l’hôpital, Rajen Govinden, qui a vu son monde s’écrouler, a essayé de reprendre sa vie là où elle s’était arrêtée. « Au départ, c’était très pénible. Travailler et être indépendant étaient mes objectifs. » Malgré le peu d’éducation qu’il a reçu, cet homme est un fin stratège. Comment fait-il pour maintenir la rentabilité de son business, alors que la concurrence est rude ? Il explique d’emblée que c’est un métier très dur. Il faut faire face à la chaleur, au soleil et aux concurrents. Il circule à bicyclette avec une seule main. Il transporte ses friandises sur son vélo. C’est grâce à ce métier que Rajen Govinden a pu subvenir aux besoins de sa famille et investir dans les études supérieures de ses deux enfants.

Aujourd’hui, Rajen Govinden est un père heureux. « Mon handicap m’a appris la vie. Pour moi, c’est un mal pour un bien. J’accepte mon destin. Je suis devenu un battant. La détermination et la persévérance ont joué en ma faveur. »

Le bonheur est dans la ruche

Qui dit abeille, dit miel. Pour être un apiculteur, selon Michael Lafrance, il faut être un passionné de la nature. « Les abeilles me fascinent depuis mon enfance. Pour moi, que vous soyez amateur ou professionnel, l’apiculteur reste un amoureux des abeilles et de la nature. L’apiculture n’est pas aussi compliquée qu’on l’imagine. Toutefois, le métier nécessite un apprentissage pour mieux connaître les abeilles et acquérir des techniques, afin de prendre soin des ruches avant la récolte », explique l’habitant de Forest-Side de 57 ans.

« Avec la ruche moderne, on peut facilement l’entretenir, surveiller la reine et éviter de détruire les larves et extraire le miel. Les ruches qui sont munies de cadres, aident les abeilles à travailler en ordre », explique l’apiculteur. De l’assemblage de ruches au nettoyage, de l’extraction du miel à la livraison, le métier d’apiculteur n’est pas de tout repos. 
 Michael Lafrance souligne que ce métier se cale sur la floraison. Il faut savoir qu’en hiver, les abeilles ne produisent pas de miel, ayant très peu de fleurs en cette saison.

Il ajoute que la pluie et la chaleur sont favorables à la création du nectar. « La patience est indispensable pour se lancer dans ce métier. »

Anil Ramratia, charbonnier : « Un métier très dur »

Le métier de charbonnier est considéré comme l’un des plus vieux métiers du monde. Toutefois, cette activité disparaît graduellement de tous les coins et recoins du pays. Anil Ramratia a persévéré. Sur le chantier à Poste-de-Flacq, on aperçoit l’habitant de Roche-Noires de 45 ans, machette à la main, en pleine sueur.

Arborant un chapeau déformé, des vêtements usagés noircis par la fumée du charbon et portant des sabots, le charbonnier a le teint brouillé et seul le blanc des yeux brillent. Le père de famille dit vivre sur le chantier en compagnie d’un collègue pendant un mois. Ils regagnent leur domicile que pour deux semaines. Un camion de livraison abandonné leur sert d’abri. Pour se laver, les deux hommes utilisent l’eau d’une rivière.

« C’est un métier très dur. On doit constamment surveiller la cheminée. Nous n’avons ni congé, ni sortie. Pour le repas, c’est le propriétaire qui s’en charge », relate Anil Ramratia. La journée du charbonnier débute à 5 heures et s’achèvera lorsqu’il tombera de fatigue. Pour la fabrication du charbon, les arbres sont abattus et portés sur les épaules jusqu’au chantier.

En amont du montage de la meule, le terrain est d’abord nettoyé à l’aide d’un râteau-peigne. Puis avec une pioche et une pelle, la surface est aplanie. Cet exercice dure environ une semaine. « On empile les rondins dans le sens de la hauteur, légèrement inclinés vers le centre. On répète l’exercice étage par étage jusqu’au sommet du poteau, d’une hauteur de deux mètres. La pyramide de bois est ensuite recouverte de paille et arrosée d’eau avant qu’une couche de terre bien tassée ne recouvre le four », explique le charbonnier. Une fois le feu allumé, le travail n’est guère terminé. Les charbonniers doivent être constamment à proximité du four pour contrôler le processus de carbonisation et veiller aux flammes.

Car l’oxygène est important pour favoriser la carbonisation. Venue l’heure de la destruction. « Les braises doivent d’abord se consumer avant de réduire les blocs de charbon en petits morceaux. Après avoir refroidi les braises avec de l’eau pendant une demi-heure, on enlève le charbon avec un crochet en fer. Puis, on l’étale et on le tamise avec un large râteau-peigne. On s’affaire ensuite à l’ensachage », soutient le charbonnier. Être charbonnier est fatigant, mais pour rien au monde, Anil Ramratia n’abandonnera son métier.

 

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