La loi sur l’ADN, selon l’ancien Attorney General Yatin Varma, a pour objectif principal d’empêcher les erreurs judiciaires et de se conformer aux autres juridictions où les preuves scientifiques sont très souvent utilisées. Mais qu’en est-il de la protection des droits humains ? Un test ADN peut-il être contesté? L’avocat nous éclaire.
La loi sur l’ADN a été promulguée en août 2009. Quelles sont ses implications et en quoi vient-elle aider les enquêteurs ?
Cette loi est une percée à l’ère des nouvelles technologies. Elle a pour objectif d’apporter des preuves scientifiques au cours d’un procès. Elle aide également à établir la balance entre l’utilisation de différentes preuves et la protection des droits humains. L'article 3 de cette législation donne le pouvoir à un gradé de la police (un surintendant au minimum) de faire une demande d’échantillon ADN pour des délits graves. Ceux-ci concernent des délits passibles d'une peine d’emprisonnement ou de servitude pénale. Mais ces infractions n’incluent pas une contravention ou autres délits qui sont passibles d'amende. En outre, l'article 4 de cette loi permet au commissaire de police de demander à un condamné de se soumettre à un test ADN. Si celui-ci refuse, il commet une infraction sous cette législation.
Pourquoi a-t-il fallu l’introduction de la loi sur l'ADN en 2009 ?
Cette loi est entrée en vigueur en 2010. Le but de cette législation est d’empêcher des erreurs judiciaires et de se conformer aux autres juridictions où les preuves scientifiques sont très souvent utilisées.
L’ADN peut ne pas être une preuve absolue dans une enquête policière ?
Non. Car il fait partie de l'enquête de la police et est utilisé comme une preuve corroborante. Cependant, les preuves scientifiques ne peuvent pas être le seul élément de preuve devant un tribunal. L'enquête de la police doit suivre son cours normal avec les autres preuves (les déclarations des témoins et des prévenus, des plans du lieu du délit ou encore la visite du lieu). Les preuves scientifiques sont une valeur ajoutée pour une enquête policière. Il est très difficile, néanmoins, de contester ce genre de preuve devant une cour de justice.
Est-ce qu’une personne peut refuser de se soumettre à un test ADN ? Récemment, la Cour suprême a ordonné à un homme de se soumettre à un test ADN dans une affaire l’opposant à une femme qui recherche la paternité de son enfant. Votre opinion ?
C’est un arrêt de principe qui stipule également qu'une personne ne peut être effectivement et physiquement obligée de se soumettre à un test ADN. Le jugement conclut que, avec l'entrée en vigueur de la loi sur l’ADN, il est maintenant possible pour une personne de faire une demande de test pour déterminer la filiation alors qu'auparavant, un individu pouvait établir par une analyse de sang qu’il n’était pas le père, cela en vertu de l'article 340 du Code Civil Mauricien.
En France, en matière de filiation, le recours aux preuves scientifiques est de plein droit, sauf s’il y a des motifs légitimes pour refuser ce recours. En Angleterre, dans une procédure civile dans laquelle la filiation d'une personne reste à déterminer, la cour peut, de sa propre initiative ou sur demande présentée par une autre partie, donner une directive pour l'utilisation de tests scientifiques pour établir la filiation. La cour peut à tout moment révoquer ou modifier la demande de cette personne.
Dans quelles circonstances une personne doit-elle obligatoirement se soumettre à un test ADN ?
En vertu de l'article 6 du DNA Act, si une personne refuse de se soumettre à un test ADN, le commissaire de police ou son représentant peut rechercher un ordre ordonnant à cette personne de se soumettre à ce test ADN. Il a l’autorité de faire une telle demande devant un juge en référé. Cette demande ne peut être faite que si le commissaire de police ou son représentant est convaincu que la personne à qui l'échantillon d'ADN a été demandé peut être liée ou associée à un délit grave et que l'échantillon pourra confirmer sa participation à un délit.
Si la personne refuse...
Dans le jugement prononcé par le juge David Chan Kan Choeng dans l’affaire Lafleur vs Bhim en 2015, il a été conclu que même si un tribunal ne trouve aucun motif légitime pour un refus, elle ne peut ordonner à une personne à se soumettre à un test scientifique. Toutefois, la personne ne peut être contrainte de se soumettre à un tel test. La seule prérogative de la cour est de faire le poids en prenant en compte toutes les circonstances de l'affaire.
Existe-t-il une banque de données d’ADN à Maurice ?
Selon l'article 10 du DNA Act, le directeur du Forensic Science Laboratory (FSL) doit conserver les données provenant d'échantillons d'ADN soumis pour l'analyse médico-légale et s'assurer que ces données soient stockées de manière sécurisée et restent confidentielles.
Un test ADN est-il fiable à 100 % ?
Un test ADN peut toujours être contesté par une contre-expertise. Mais, comme je l'ai dit plus tôt, il est difficile de contester ce genre de preuves. Dans le cas de la filiation, il devrait y avoir un allèle (gène) commun au le père et à l'enfant ou à la mère et à l'enfant. Le rapport indiquera alors que la personne ne peut être exclue comme étant le père ou la mère.
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