Invité à commenter la directive de l’Information and Communication Technologies Authority (ICTA), Me Antoine Domingue SC souligne que les fournisseurs d’accès à Internet, comme Mauritius Telecom (MT) ou Emtel, « auraient pu, s’ils l’avaient souhaité », contester cette directive. Cela aurait été possible devant le tribunal de l’ICT, si ce dernier était toujours en fonction.
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Toutefois, selon lui, même si cela était le cas, un appel en ce sens n’aurait pas été envisageable puisque « le président dudit tribunal, Me Denis Vellien, est à la retraite, et les locaux de ce tribunal, qui se trouvaient à l’étage en dessous du mien, ont été restitués à leur propriétaire ». Depuis, le tribunal n’a pas encore été reconstitué pour donner suite aux amendements introduits en juillet 2024 par le Finance (Miscellaneous Provisions) Act 2024, dont les dispositions ne peuvent entrer en vigueur que par proclamation. Or, cela n’a toujours pas été fait.
Contenus Nuisibles
Concernant le communiqué de l’ICTA, le Senior Counsel précise que l’ICTA confirme avoir reçu, dans la nuit du jeudi 31 octobre 2024, une directive gouvernementale sous l’article 18(1)(a) de l’ICT Act lui enjoignant d’implémenter la politique du gouvernement, ce qui a conduit l’ICTA à agir selon les dispositions de la section 18(1)(m) afin de restreindre les contenus nuisibles et illégaux sur Internet.
Selon Me Antoine Domingue SC, en réalité, la section 18(1)(a) de cette loi enjoint à l’ICTA de mettre en application la politique gouvernementale. Il affirme qu’il existe une différence fondamentale entre l’obligation légale de mettre en œuvre la politique gouvernementale et une « directive gouvernementale ».
Cette disposition de l’article 18(1)(a) ne permet pas au gouvernement d’adresser une « directive gouvernementale » à l’ICTA, car les pouvoirs statutaires conférés à cet organisme sous la section 18(1)(m), en tant qu’autorité indépendante, ne sont pas soumis à la tutelle gouvernementale et doivent être exercés par l’ICTA indépendamment de l’exécutif, dans le cadre des attributions légales de l’autorité de régulation, et non sur « directive gouvernementale ».
Il précise qu’il pourrait s’agir de « telephone tapping » ou de manipulation par clonage de voix au moyen de l’intelligence artificielle (IA). Le « telephone tapping » est une interception illégale d’une conversation téléphonique entre deux abonnés. En revanche, la fabrication ou la manipulation de voix fait appel au clonage de voix à partir d’un ordinateur muni d’une IA, capable de puiser dans une large base de données contenant les voix des personnes que l’on souhaite cloner.
Il rappelle que les écoutes et enregistrements téléphoniques illicites, qui sont à l’origine des fameuses bandes sonores dites « Missie Moutass Leaks », constituent un délit grave passible de dix ans de servitude pénale. De plus, de tels enregistrements illicites de conversations téléphoniques entre deux abonnés ne sont pas recevables devant une cour de justice.
Autorisation Judiciaire
Si l’État s’est procuré des équipements pour intercepter des appels téléphoniques, il ne pouvait pas, selon les dispositions légales en vigueur, le faire sans d’abord solliciter et obtenir l’accord préalable de l’ICTA. Selon lui, les écoutes téléphoniques ne peuvent être judiciairement autorisées que sur demande des autorités chargées de faire appliquer la loi (Law Enforcement Agencies), telles que la police ou la Financial Crimes Commission, qui doivent d’abord demander et avoir une autorisation judiciaire pour une durée ne dépassant pas 60 jours dans le cadre d’une enquête sur des activités criminelles.
En l’état actuel du droit, aucun service de renseignement n’est autorisé à procéder à des écoutes téléphoniques d’abonnés. Cela est non seulement illégal, mais aussi anticonstitutionnel, et pourrait engager la responsabilité civile de l’État à la suite des comportements de ses agents et préposés, s’ils agissaient dans le cadre de leurs fonctions.
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