La saisie de 22 tonnes de cuivre provenant du réseau de Mauritius Telecom (MT) et estimées à Rs 18 millions n’a pas fini de livrer ses secrets. Selon nos informations, des révélations devraient bientôt être faites par de nouveaux protagonistes, mettant une fois de plus en cause l’ex-CEO de MT, Sherry Singh. Cette affaire avait été mise en lumière par la publication, en marge des élections générales de 2019, de la vidéo « Sherrygate », ciblant celui qui a fondé depuis le parti One Moris, et par ricochet le gouvernement d’alors.
Un dénonciateur compte bientôt remettre des informations additionnelles, dont des vidéos, aux enquêteurs de la police. C’est du moins ce qu’a fait savoir l’avocat Ashley Hurhangee au Défi Plus. Selon lui, ses services ont été retenus par une personne qui dit détenir des informations pouvant permettre de donner un coup d’accélérateur à l’enquête sur la vente par Mauritius Telecom de milliers de tonnes de câbles en cuivre à la société Tradeway International Ltd. « Mon client dit détenir des informations encore plus détaillées et précises que celles qu’avait révélées un précédent client dans cette affaire, en l’occurrence Kailesh Persand, en 2019. Le [nouveau] client affirme avoir en sa possession des vidéos pour démontrer comment des câbles en cuivre ont été emportés », soutient l’avocat qui dit laisser, en attendant, la police poursuivre son enquête « afin d’éclairer davantage la population dans cette affaire ».
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Me Ashley Hurhangee lui-même n’est pas étranger à ce dossier. Il avait été interrogé « under warning », tout comme l’avocat Samad Golamaully, par le Central CID en septembre 2020 dans le cadre de l’affaire « Sherrygate ». Ce, après des dénonciations faites par Shameem Korrimbocus, plus connu sur la Toile comme Shameem One and Only, pour « complot ». Ce dernier reprochait aux deux avocats, ainsi qu’à des politiciens et des journalistes, d’avoir participé à l’élaboration d’une vidéo contre le MSM pendant la campagne électorale de 2019. Par la suite, Me Ashley Hurhangee a porté plainte contre Shameem Korrimbocus pour « déclaration écrite fausse et malveillante » car il estimait que les allégations de ce dernier étaient « fausses, voire fabriquées ».
Presque trois ans après, Me Hurhangee souligne que la récente saisie de lingots de cuivre et les arrestations qui ont suivi viennent leur donner raison. « En tant qu’avocats, nous avions vu, à l’époque, des choses qui ne correspondaient pas aux normes et aux pratiques de la bonne gouvernance, notamment des [soupçons de] fraudes et de dilapidation massive de l’argent des contribuables. Et sur les instructions que j’avais reçues d’un de mes clients (Ndlr : Kailesh Persand), nous avions dénoncé ces pratiques malsaines. Conséquence : j’ai dû faire de multiples va-et-vient aux Casernes centrales où j’ai été interrogé pendant plus de 60 heures par le Central CID », explique-t-il.
« Bonne foi »
L’avocat concède néanmoins qu’il n’avait pas mené une enquête. « J’avais agi comme avocat, sur les instructions de mon client. Je n’avais pas conduit une enquête dans cette affaire de câbles de fibre optique et de cuivre. J’estime avoir agi de bonne foi. Et d’ailleurs, Kailesh Persand maintient toujours sa version », soutient-il. Aujourd’hui, bien que l’ancien CEO de Mauritius Telecom, Sherry Singh, se soit dédouané dans cette affaire lors d’une conférence de presse en avril dernier, Me Hurhangee fait remarquer que cela ne veut pas dire que le fondateur de One Moris n'est pas impliqué dans cette affaire. « Ses biens et ses avoirs font déjà l’objet d’une enquête des autorités compétentes, notamment sa maison se trouvant dans le morcellement Au Bout du Monde à Ébène et évaluée à plusieurs dizaines de millions de roupies », dit-il.
Raj Rughoonath : « Le cuivre vendu au ‘lowest bidder’ »
Dans une plainte déposée à la Cour suprême et à l’Independent Commission against Corruption en 2018, un actionnaire et ancien employé de Mauritius Telecom, Raj Rughoonath, signalait qu’à l’issue de l’exercice d’appel d’offres lancé en 2017 pour la vente de 500 tonnes de cuivre, le contrat avait été étonnamment alloué au « lowest bidder », soit l’entreprise qui avait proposé de racheter le cuivre au prix le plus bas. « D’après mon enquête en tant que syndicaliste [de Mauritius Telecom], ces câbles ont été vendus au ‘lowest bidder’ », avait-il déclaré. Ce qui, précisait Raj Rughoonath, représentait un manque à gagner pour les actionnaires, dont il fait partie. À l’époque, ces câbles « de bonne qualité » étaient évalués entre Rs 80 000 et Rs 100 000 la tonne, selon l’ancien employé de MT. Toutefois, à la Cour suprême, la juge Rehana Mungly-Gulbul (aujourd’hui cheffe juge) avait estimé que le cas n’est pas défendable.
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