À Maurice la semaine dernière, dans le cadre de la mise en place d’une consultation de médecine personnalisée du diabète et de ses complications à la Clinique Mauricienne, le Professeur Philippe Froguel va aussi collaborer avec le ministère de la Santé. Cela concerne des recommandations sur les lignes directrices et la prise en charge des patients souffrant de maladies métaboliques.
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Quels sont les derniers développements dans la compréhension des bases génétiques de l’obésité et du diabète ? Comment ces connaissances peuvent-elles influencer les approches de traitement ?
Il y a un nombre important de diabétiques qui ont une maladie génétique qui était suspectée, mais pas connue. On connaît maintenant les gènes. On sait que ces personnes, qui ont ces gènes, peuvent être traitées différemment des autres. Dans certains cas, par exemple, des patients n’ont pas besoin de traitements particuliers, car ils ne développent aucune complication. Il n’est pas nécessaire de les embêter.
Dans d’autres cas, il existe des médicaments peu coûteux depuis 60 ans qui fonctionnent très bien, et il n’est pas nécessaire de dépenser énormément d’argent ou de mettre ces gens sous des injections d’insuline qui les embêteraient tout au long de leur vie. Un certain nombre de ces maladies génétiques s’accompagnent de maladies cardiaques qui ne sont pas toujours évidentes, ainsi que de maladies rénales. Il est possible de prévenir les complications du diabète pour eux et pour leurs enfants, en faisant une prévention de la maladie. Si on a une maladie génétique, il est possible de la transmettre aux enfants.
Pouvez-vous expliquer comment la génétique influence la prédisposition d’une personne à l’obésité et au diabète, et comment cela peut être pris en compte dans la gestion de ces conditions ?
Les gènes de l’obésité provoquent la faim. Ce sont des personnes qui ont plus faim que les autres, notamment des enfants qui ont très faim. Il existe maintenant des médicaments pour bloquer cela, mais il existe également une prise en charge pour réduire la sensation de faim chez ces personnes, car même après avoir mangé, elles ont encore faim. Cela les pousse à manger en permanence.
On peut donc les aider à réduire cette sensation de faim, ce qui les fait maigrir, ce qui fonctionne très bien pour l’obésité. En ce qui concerne le diabète, il faut prendre en compte les gènes qui affectent la production d’insuline par le pancréas. Ainsi, il existe des médicaments qui aident à rétablir cela. Il est également essentiel d’éviter qu’ils prennent du poids et qu’ils consomment trop de sucre, de riz ou d’autres aliments qui pourraient favoriser la prise de poids. Il est important qu’ils pratiquent régulièrement une activité physique, car cela réduit le risque de développer le diabète à l’avenir.
Quels sont les liens entre l’obésité, le diabète et l’insuffisance rénale. Comment cela affecte-t-il les options de traitement pour les patients atteints de ces maladies métaboliques ?
Dans le monde, environ 80 % des diabétiques sont obèses ou en surpoids. Les principaux facteurs de développement du diabète sont d’abord l’âge, car c’est une maladie liée au vieillissement. La mauvaise alimentation, notamment la consommation excessive de riz blanc ou de pain, dans des pays comme Maurice, ainsi que le manque d’activité physique, contribuent également à l’apparition de la maladie. Le diabète peut également être lié à une prédisposition génétique. À poids et âge égaux, certaines personnes ont cette prédisposition, tandis que d’autres ne l’ont pas.
De nombreuses campagnes de prévention ont été organisées afin de sensibiliser la population aux maladies non transmissibles, mais le taux de ces maladies demeure élevé. Comment encourager les patients atteints de maladies métaboliques à adopter un mode de vie sain en complément des traitements médicaux ?
Il n’est en effet pas facile d’adopter de bonnes habitudes alimentaires, mais cela dépend en premier lieu de l’éducation des médecins, afin qu’ils puissent détecter plus précocement les prises de poids chez les adolescents, par exemple.
En ce qui concerne la population en général, il est essentiel d’expliquer comment manger en fonction de leur quotidien, tout en faisant comprendre qu’ils ont le contrôle sur leur consommation de riz et de pain. Ils peuvent également augmenter leur consommation de produits laitiers et d’aliments riches en protéines et en calcium, entre autres. Il est donc nécessaire de dispenser une éducation nutritionnelle complète.
La pratique d’une activité physique est souvent compliquée pour certains en fonction des possibilités locales, comme la disponibilité de clubs de sport. Cela relève davantage de la société que des médecins. Un médecin peut encourager la pratique régulière d’une activité physique, mais il doit y avoir des structures ou des infrastructures favorisant cela.
Il est important de noter que la pratique d’un sport ou d’une activité physique en général constitue un facteur de protection essentiel contre le diabète et l’obésité.
Avec tout ce que vous proposez au niveau de la génétique, peut-on guérir du diabète ?
On ne guérit pas de la maladie, mais dans certains cas, comme ceux que nous avons rencontrés, des enfants atteints de diabète dès les premiers mois de leur vie et traités initialement à l’insuline ont été « guéris » de leur diabète en prenant un médicament par voie orale au lieu d’injections d’insuline, une fois que les gènes de la maladie ont été identifiés. Ils ne sont plus diabétiques depuis maintenant 15 ans, mais ils doivent continuer à prendre leur médicament.
Qu’en est-il des adultes, peuvent-ils guérir du diabète ?
Pour ceux qui développent le diabète à l’âge adulte, afin de guérir de la maladie, il est nécessaire qu’il y ait préalablement un dépistage précoce suivi d’une prise en charge appropriée. Cela doit se faire au stade prédiabétique, lorsque leur taux de glycémie est légèrement élevé. Selon les études qui ont été effectuées, si on parvient à réaliser cela, on peut prévenir le risque de diabète dans au moins 50 % des cas. Ainsi, le dépistage précoce est essentiel, tout comme l’historique familial pour déterminer s’il existe des antécédents de diabète dans la famille.
Quelles sont les perspectives d’avenir en matière de recherche et de traitement des maladies métaboliques grâce à la génétique et à la médecine personnalisée ?
Nous souhaitons désormais nous pencher sur les maladies rénales, car environ 30 % des diabétiques évoluent vers une maladie rénale, entraînant éventuellement une dialyse ou une transplantation rénale. Cette situation peut également entraîner une mortalité précoce. Nous voulons utiliser la génétique pour dépister les diabétiques qui présentent un risque de maladie rénale, et nous avons déjà commencé ce processus.
Il semble que ces individus présentent une maladie génétique qui affecte les reins. Ces maladies génétiques ne provoquent pas de complications chez les non-diabétiques, mais elles peuvent entraîner une maladie rénale chez les diabétiques. Grâce à la génétique, il sera possible de dépister le diabète chez les personnes à risque, et des mesures pourront être prises, notamment la réduction de la consommation de sel, la surveillance de la pression artérielle et la limitation de l’apport en protéines, entre autres, pour protéger les reins.
La prévention des maladies rénales doit être envisagée dès le début, car le problème du diabète ne réside pas seulement dans une glycémie élevée, mais surtout dans les complications potentielles de la maladie, comme le risque d’accident vasculaire cérébral, de maladies cardiaques et rénales, entre autres. Ce sont autant de maladies qui peuvent entraîner la mort des diabétiques ou leur rendre la vie difficile. Nous pensons que la génétique peut être un moyen de détecter ces anomalies.
Actuellement, lorsqu’on diagnostique un diabétique, on ne sait jamais ce qui peut lui arriver, tout est imprévisible, ce qui est une véritable catastrophe. La génétique peut donc aider à identifier les personnes à risque, afin de concentrer les efforts de traitement sur elles.
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