C’est le début d’une nouvelle année pour les Mauriciens d’origine chinoise. Placée sous le signe du coq, elle s’annonce prospère. C’est un grand moment festif ponctué de son lot de symbolisme et de coutumes encore bien ancrés dans la culture chinoise.
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Les célébrations
Le Nouvel An Chinois est la fête la plus importante pour la communauté chinoise. Une nouvelle année, une nouvelle ère, un nouveau départ ! Elle est célébrée ce samedi 28 janvier et prend fin 15 jours après avec la fête des Lanternes. La Fête du Printemps est un moment de retrouvailles entre les différentes générations d’une famille après une année où, pris par le travail et autres préoccupations, l’on ne se voit pas souvent.
Offrandes, partage de gâteaux, menus festifs et grosses pétarades accueillent cette année du Coq. Après plusieurs jours de grand nettoyage, la journée du réveillon du Nouvel An débute avec une offrande aux dieux. « Sur une table placée en direction du soleil levant, on dispose des offrandes dont des fruits, des biscuits, du poulet, des morceaux de porc, des poulpes séchés, du vin de riz, cinq coupes de vin rouge et cinq tasses de thé infusé, explique Li Kwong Ken Ah Kwet, ex-président et membre de la Chambre de Commerce Chinoise (CCC). Puis, on allume des sandales et des ‘zhi-bao’, soit des petits bateaux en papier qui sont brûlés symboliquement. »
Le réveil du Nouvel An
La veille, on prépare une assiette composée de quatre compartiments pourvus de douceurs, dont des jujubes et des longanes secs qui seront consommés au réveil du Nouvel An. Puis, place au grand nettoyage de la cuisine pour accueillir la nouvelle année. Le matin même de la veillée, on fait éclater des pétards devant la maison pour pousser les « mauvais airs ». En soirée, le point culminant comprend le festin gastronomique du réveillon qui réunit différentes générations de la famille autour d’une table ronde.
Le repas du réveillon : un moment fort en famille
Aussi connu comme ‘tuan yuan fan’, le dîner du réveillon est un moment de partage et de convivialité pour la communauté autour d’un repas festif. Pour l’occasion, on sort sa plus belle porcelaine et ses baguettes chinoises. « À table, on retrouve des plats qui ne se consomment pas tous les jours, fait ressortir Li Kwong Ken Ah Kwet. Comme par exemple, l’abalone, les œufs de 100 ans, les ailerons de requins et le concombre de mer (banbara) en plus du poulet, du porc et des saucisses, etc. »
« Les plus jeunes, qui travaillent déjà, offrent des ‘foong pao’ à leurs aînés en guise de remerciement et de respect, ajoute Li Kwong Ken Ah Kwet. La journée de ce 28 janvier débute au petit matin, une sandale est allumée accompagnée d’une prière afin que Dieu nous accompagne durant cette nouvelle année. Certaines familles d’autrefois se rendaient dans huit pagodes différentes et de retour à la maison, il y a la danse du lion et les pétards. Le premier jour du Nouvel An chinois est sous le signe du végétarisme. En effet, aucune chair n’est consommée jusqu’au coucher du soleil. »
Durant cette journée, nos compatriotes de la communauté chinoise consomment donc du vermicelle, des fleurs de riz séché, des germes de bambou, du céleri, des champignons secs et des pistaches, entre autres plats végétariens. Pendant les 15 jours qui suivent, la tradition veut que les parents se rendent chez leurs proches pour la distribution de gâteaux. « C’est une tradition qui se perd malheureusement, car les familles sont dispersées à travers le monde et certains partent en voyage durant cette période », souligne le président de la CCC, Lloyd Lai.
Les jours suivants, il y a aussi des séances de prière pour demander à Dieu de protéger sa famille. « À la pagode, c’est la coutume de secouer une boîte composée de 100 bâtons en papier, confie Li Kwong Ken Ah Kwet. Celui qui tombe va indiquera à la personne si l’année sera bonne ou pas pour elle. C’est d’ailleurs en fonction de cela que l’on fait des offrandes. »
Les ‘foong pao’
Le ‘foong pao’, petite enveloppe rouge aussi connue comme ‘hong bao’, est un symbole incontournable. Les plus jeunes sont invités le soir du réveillon à remettre une enveloppe à leurs aînés en guise de respect et d’amour. Pour remercier, le destinataire offre ses vœux pour un avenir favorable. Le montant du don varie selon la personne et demeure symbolique. « Tout dépend de la relation entre le donneur et le destinataire. La somme représente, souvent pour les plus superstitieux, un nombre porte-bonheur qui se compose de huit chiffres, symbole de prospérité pour les chinois », explique notre interlocuteur.
Partage de douceurs
Les gâteaux chinois sont distribués avant la fête aux amis et aux proches. Ces douceurs, venues tout droit de l’Orient, n’ont plus de secret pour les Sino-mauriciens. Outre les classiques gâteaux cravates, ‘chipek’, gâteaux ‘la cire’ et ‘zinzli’, plusieurs autres délices plus originaux sont aussi distribués. C’est surtout une famille de la capitale qui en détient le secret. En effet, les Chu Fung Leung sont les seuls fabricants de gâteaux chinois traditionnels, comme l’affirme Lilin Chu Fung Leung, la gérante de la boutique située en plein cœur de China Town. « Nous commercialisons des gâteaux traditionnels, uniques à Maurice, qui proviennent de Meixian, mais nous en fabriquons aussi. »
On y retrouve les ‘gâteaux la lune’, ronds ou rectangulaires, remplis d’une pâte de graine de sésame noire, de farine de riz et d’autres ingrédients. Cette spécialité des hakkas existe en différentes variétés dont le ‘niet-kong’ et le ‘chu chong kow’ parfumés à la banane, la fraise et l’ananas souvent utilisés comme offrandes pour les fêtes. « Nous avons préservé le côté traditionnel de ces gâteaux en y apportant notre touche personnelle avec des saveurs fruitées », souligne Lilin.
Les gâteaux de cire concoctés par les Chu Fung Leung sont aussi cuisinés de façon différente « Nous y mettons de l’orange pour relever le goût. » Parmi les autres spécialités : le traditionnel gâteau ‘zinzli’, les biscuits à base de papaye, les pistaches, le sésame, le ‘pot pan’ (poutou rouge), les feuilletés fourrés aux lentilles ou haricots ou encore les nougats au sésame. « Ces gâteaux sont consommés pendant les fêtes en Chine, mais à Maurice, nous les consommons tout le long de l’année, notamment en des desserts », précise Laval Lai Min.
Pétards chinois
La nouvelle année est accueillie avec ferveur par les Sino-mauriciens. Des longs rouleaux de pétards parent les devantures des maisons et des cours. On les fait éclater le matin pour exprimer la joie et le bonheur. « La terre est remplie de rouge. » Les poussières des pétards ne doivent pas être balayées tout de suite afin de laisser entrer le bonheur, selon les superstitions chinoises.
Les danses du lion et du dragon
Les danses du lion et du dragon se pratiquent durant la Fête du Printemps ou des festivités culturelles, nous apprend Dhan Yong, président de la ‘Chinese Wushu and Lion Dance Association’. « Les lions et les dragons doivent d’abord faire leur baptême aux pagodes avant de pouvoir danser et ce rituel est appelé ‘give liee’. Ces danses apportent bonheur et prospérité et repoussent les mauvais airs. Il existe deux types de lion : celui du sud et celui du nord, mais puisque les familles mauriciennes sont principalement d’origine cantonaise, nous pratiquons la danse du lion du sud. Une danse peut durer jusqu’à 25 minutes. »
La danse du dragon se pratique à huit personnes ou plus. Dans la culture asiatique, le dragon est l’animal légendaire par excellence. Il qualifie à la fois la force, l’intelligence, la longévité, la persévérance et la réussite. La danse folklorique du dragon implique de la coordination, de l’endurance et de l’agilité. Ce sont donc souvent des pratiquants d’arts martiaux qui s’y attellent, portant à bout de bras de longues tiges de bambous et faisant onduler les morceaux de soie qui composent le corps et la tête de la bête.
La danse du lion se pratique, elle, à deux. Deux lions se tournent autour, sautent, s’agitent et se dressent tout en exécutant des mouvements bien précis sur un rythme tout aussi codé. Ils prennent vie grâce à la force, la souplesse et l’agilité de deux athlètes glissés dans chaque costume. C’est au rythme des cymbales, des tambours et des gongs que dansent les lions et les dragons. « Nous commençons à pratiquer trois mois avant la fête », confie Dhan Yong.
Fête des Lanternes
Quinze jours après, la Fête du Printemps se clôture par la Fête des Lanternes. Pour cette célébration, les membres de la communauté chinoise se rendent dans les pagodes en début de journée. C’est aussi une nouvelle occasion de se retrouver en famille et de déguster des gâteaux ‘tang yuan’. Pour le côté spectaculaire, les centres commerciaux et les jardins publics s’illuminent de lanternes chinoises.
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