La 10e édition de la série ‘Projet de société’ était centrée sur la thématique ‘Au cœur de la jeunesse’, organisée à Strike City, Bagatelle, le mercredi 8 mai. Malenn Oodiah, initiateur de ces débats, et Nawaz Noorbux de Radio Plus, ont abordé des questions liées aux interrogations et craintes de notre jeunesse.
Dès l’entame du forum, Malenn Oodiah s’est dit résolument dans une posture de prospection afin d’ancrer l’idée que l’écosystème mauricien est aujourd’hui dans une dimension intégrée avec le monde extérieur grâce au numérique et faisant valoir que, chaque jour, un jeune est accroché à son smartphone durant
trois heures et demie. « Le smartphone, c’est la télévision d’hier, avec ses aspects tant positifs que négatifs », dit-il.
Est-ce que ce petit appareil est-il responsable de l’érosion des valeurs chez le jeune ? Pour Sean Rungen, les réseaux sociaux, auxquels il n’est pas abonné, ne font qu’ajouter à la déprime qu’éprouverait une personne. À ses yeux, c’est l’amitié qui a une valeur profonde pour le jeune mais, selon Tommy Lee, la figure d’un ‘role model’ fait défaut à ce dernier, de même que l’absence de repères.
« Je pense que le jeune s’identifie à ce qu’il trouve sur Facebook », dit-il. Shabnaaz Ahmod explique qu’en l’absence d’encadrement, les réseaux sociaux n’offrent aucune sécurité à leurs utilisateurs. Elle regrette aussi le manque d’intérêt des jeunes pour les décisions prises par le gouvernement car lorsqu’ils seront aux commandes du pays dans le futur, ils seront rattrapés par ces décisions.
La problématique du chômage a été liée à la préfiguration de l’ère numérique dans les entreprises, une perspective inévitable, selon Malenn Oodiah, chiffres à l’appui. L’inadéquation entre la formation et les offres d’emploi – cela dure depuis 20 ans, dira-t-il, n’a pas manqué durant les débats. Mais l’animateur a voulu remettre les choses en perspective en faisant valoir la nécessité d’enrichir le cursus scolaire mauricien avec des sujets non-académiques. Si l’école a souvent été au centre des débats – les drogues, les comportements, le travail - Michèle Lionnet a tenté de recentrer le travail de l’enseignant qui, selon elle, ne peut être tenu seul responsable de l’échec scolaire de certains jeunes.
« L’enseignant dispense le savoir mais ce sont aux parents d’inculquer le savoir-vivre, le savoir-être », dit-elle, avant de faire sienne le dicton prêté au Mahatma Gandhi pour appeler les jeunes à s’inscrire afin de voter: « Be the change that you wish to see in the world. » Mais comment emmener des parents pris dans l’engrenage du travail, accrochés à des heures sup, au dialogue avec leurs enfants, eux-mêmes enchainés aux leçons particulières et aux devoirs une fois rentrés chez eux ?
Contrôle du système
Au rang des paradoxes, Malenn Oodiah a fait ressortir le pessimisme qu’éprouve une majorité de jeunes, tentés par l’émigration mais en même temps leur admiration pour Maurice, où il fait bon d’y vivre. Ce pessimisme est le constat auquel aboutit tant Shabnaaz Ahmod que Tommy Lee, qui expliquent que le système prime les contacts plutôt que la méritocratie.
Pour Sean Rungen, ceux d’en haut ont mis en place des structures qui leur permettent de monopoliser le contrôle du système et d’en assurer eux-mêmes la pérennité. Même si le système est en crise et que la chose politique n’inspire que défiance et désintérêt chez les jeunes, l’exercice politique reste quand même ‘noble’, fait observer avec force Malenn Oodiah, rejoint en cela par Michèle Lionnet qui dira : « La politique est présente en tout ce qu’on fait. »
Mais comment redorer le blason terni de la chose politique si, comme semble le suggérer Michèle Lionnet, l’école n’a pas pour mission d’offrir des outils de conscientisation aux jeunes ? Est-ce que la solution tiendrait-elle au rajeunissement de certains cadres des partis politiques traditionnels et l’apparition de nouvelles formations constituées de jeunes ? « Pour changer le système, tout dépendra de nos capacités à bâtir une force et à mobiliser autour des idées », souligne Malenn Oodiah.
L’école, elle, peut encore intéresser les jeunes à l’actualité locale pour les études de GP en HSC, tout comme la prise de conscience aux fléaux sociaux, dont la drogue reste la plus dangereuse. Concernant les drogues et la question de la dépénalisation, les panelistes se sont tous accordés sur la nécessité d’un débat national.
À souligner que la prochaine édition de ‘Projet de société’ sera consacrée à la «bombe démographique».
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