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Fifa: élection à suspense sur fond de crise aiguë

Qui succédera à Joseph Blatter au bout de 17 ans de règne ? Comment la Fifa, cernée par la justice et à l'image ravagée sur fond de corruption, se relèvera-t-elle de la plus grave crise de son histoire ? C'est tout l'enjeu de l'élection de vendredi à Zurich. Cinq candidats sont en lice, dont deux favoris: le Cheikh Salman (50 ans), président bahreïni de la Confédération asiatique (AFC), et le juriste italo-suisse Gianni Infantino (45 ans), secrétaire général de l'UEFA. Les trois autres candidats sont le prince jordanien Ali (unique concurrent de Blatter au scrutin de 2015), le Français Jérôme Champagne (ex-secrétaire général adjoint de la Fifa) et l'homme d'affaires sud-africain Tokyo Sexwale, qui a annoncé jeudi qu'il était prêt "à travailler" avec Infantino. Le nouveau président sera élu dans l'après-midi par les 209 fédérations membres de la Fifa (voire 207 si l'Indonésie et le Koweït, suspendus, restent privés de vote), qui disposent chacune d'une voix. Le petit Etat caribéen de Saint-Vincent et les Grenadines pèse ainsi autant que le géant brésilien. Sa tâche promet d'être herculéenne: il s'agit de restaurer auprès du grand public et des sponsors une crédibilité et une confiance en ruines, contrairement au tiroir-caisse (1,5 milliard de dollars de réserves). Et son poste promet d'être exposé. Aura-t-il à gérer les suites d'une nouvelle descente de police, comme lors du précédent congrès de mai dernier, ou de nouvelles poursuites judiciaires ? Cette éventualité est dans toutes les têtes. Car d'arrestations en incarcérations, la Fifa vient de vivre neuf mois de crise ouverte, à résonances géopolitiques, après des années de suspicions. La tourmente débute le 27 mai 2015 à l'aube, quand la police suisse débarque au luxueux hôtel zurichois Baur au Lac pour interpeller sept hauts dirigeants du foot, à la demande de la justice américaine. Depuis, celle-ci a effectué un coup de filet inédit dans l'oligarchie du ballon rond, essentiellement en Amérique latine, pour des faits de racket, fraude et autres blanchiment d'argent: au total, 39 personnes et deux sociétés sont à ce jour mises en cause. Depuis, l'attribution de plusieurs Coupes du monde a été questionnée, notamment celle de 2006 en Allemagne, qui vaut des soucis au "Kaiser" Franz Beckenbauer, ou celle de 2010 en Afrique du Sud, autour de Jack Warner, sulfureux potentat des Caraïbes et ex-vice-président de la Fifa. La justice suisse se penche de son côté sur l'attribution du Mondial-2022 au Qatar fin 2010, qui portait en germe la crise actuelle et constituera l'un des dossiers les plus brûlants sur le bureau du nouveau président. Depuis, des têtes sont tombées. Dans d'autres affaires parallèles. Joseph Blatter et Michel Platini, président de l'UEFA et considéré comme le grand favori à la succession du Suisse avant d'y renoncer: suspendus six ans de toute activité dans le foot. Jérôme Valcke, N.2 de la Fifa depuis 2007: licencié et suspendu 12 ans. Après ce coup de balai et au bout de neuf mois de chronique judiciaire, la Fifa souhaite accoucher d'un nouveau départ, sur le base du paquet de réformes impulsé par Blatter et soumis à la ratification du congrès. Ces réformes portent principalement sur une plus grande transparence et une dissociation des fonctions politiques et exécutives. Les deux favoris ont chacun reçu le soutien officiel de leur zone d'origine, l'Asie (46 voix) pour Salman et l'Europe (53) pour Infantino. Ce dernier a également celui de l'Amérique du Sud (10) et centrale (7). Les autres pays du continent américain et l'Océanie (11) n'ont pas donné de consigne de vote. Salman a reçu l'appui de l'Afrique, le plus gros contingent de voix (54). Mais Infantino a sillonné ce continent et dit avoir désormais "des raisons d'être encore plus confiant". Son profil de technocrate siglé UEFA peut cependant rebuter ceux qui craignent l'européo-centrisme. Mais le Bahreïni lui est fragilisé par les critiques sur son rôle présumé dans la répression des manifestations de 2011 dans son pays. "En tant que membre de la famille royale, le Cheikh Salman incarne un régime qui a réprimé les journalistes et les blogueurs critiques du royaume pendant des années", a accusé jeudi l'ONG Reporters sans frontières.
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