La Journée internationale des personnes handicapées est célébrée le 3 décembre chaque année à travers le monde. Le thème de cette année est « Atteindre 17 objectifs pour l’avenir que nous voulons ». Les personnes en situation de handicap font face à d’énormes défis économiques, par exemple l’accès à l’emploi.
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Le thème choisi cette année s’inscrit dans la récente adoption par les Nations Unies des 17 objectifs de développement durable (ODD) et souligne leur rôle dans la construction d’un monde plus inclusif et plus équitable pour les personnes vivant avec un handicap physique ou autre.
Afin de favoriser l’intégration et l’accès à la vie économique, sociale et politique des personnes handicapées, cette journée mondiale est l’occasion idéale de réaffirmer certains principes de base, trop souvent oubliés : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». Le respect de cette dignité due à chaque personne, valide ou non, implique la reconnaissance de droits fondamentaux, comme l’éducation ou l’accès au travail. Les différentes activités organisées à cette occasion nous invitent à modifier le regard que nous portons sur les personnes handicapées.
Les différentes associations qui militent pour le bien-être des personnes vivant avec un handicap mènent un combat pour mieux intégrer les personnes handicapées dans la vie économique. C’est un fait que beaucoup de personnes autrement capables arrivent difficilement à trouver un emploi. Le ‘Training and Employment of Disabled Persons Act 1996’ préconise que les entreprises ayant un minimum de 35 employés doivent compter au moins 3 % des personnes en situation d’handicap parmi eux. Mais cette loi n’est pas toujours suivie à la lettre. En effet, même si les employeurs veulent recruter des personnes handicapées, ils ne peuvent pas le faire à cause de plusieurs obstacles : absence de moyen de transport adapté et infrastructures inadéquates, entre autres. Yaaseen Edoo, un jeune qui souffre d’un handicap et qui est récipiendaire du Queen’s Young Leaders Award, dit qu’il faut résoudre ces problèmes d’abord. « Par exemple, nous saluons le changement au niveau des autobus, mais il faut noter que les ‘semi-low floor’ ne sont quand même pas 100 % disabled-friendly. »
Gavin Ng, analyste et aussi animateur de ‘Handicap Universel’, explique qu’il faut trouver d’autres moyens pour encourager l’embauche des personnes en situation de handicap. « Par exemple, encourager le ‘work from home’. Cela est possible pour des tâches administratives ou ICT/BPO. Pour y arriver, il suffit d’offrir des mesures incitatives fiscales ou autres aux entreprises pour que celles-ci jouent le jeu. Il faut aussi offrir des facilités d’accès a l’Internet gratuitement aux personnes embauchées sous un plan ‘Work from Home’. »
Coomara Pyaneandee : «La formation aidera à l’inclusion des handicapés»
Que pensez-vous de la situation des personnes en situation d’handicap à Maurice ?
La première chose que je constate, c’est qu’à Maurice, les personnes en situation d’handicap font face à beaucoup de discriminations. C’est malheureux de le dire, mais on est considéré comme des citoyens de second rang. On peut se sentir Mauricien dans l’âme, mais en ayant un ou plusieurs handicaps, la société mauricienne nous impose des limites. Par exemple, saviez-vous que les handicapés à Maurice ne sont pas reconnus dans l’article 16 de la non-discrimination ? Il n’existe jusqu’à l’heure aucune loi à Maurice qui protège les personnes vulnérables tels que les handicapés face aux discriminations. Il existe une instance telle que l’« Equal Opportunities Commission », vers laquelle les personnes en situation d’handicap peuvent se référer, mais celle-ci entre en jeu que dans des cas très spécifiques.
Deuxièmement, les personnes en situation de handicap n’ont pas un accès égal à l’éducation. Si on a un handicap, on doit aller dans une école spécialisée. Il est grand temps de comprendre qu’il existe plusieurs types de handicap et qu’il ne faut pas tout mettre dans le même panier. La plupart des personnes en situation de handicap à Maurice sont amplement capables de fréquenter une école normale comme n’importe quel autre élève, si on investit, bien sûr, dans des infrastructures qui facilitent l’accès à l’éducation. De plus, si nous avions suivi un modèle d’éducation inclusive depuis les années 1980, nos enfants auraient grandi dans une société qui aurait été complètement différente de ce que nous avons actuellement. Ce que je veux dire, c’est que nos enfants auraient été élevés dans un système d’éducation inclusive, où élèves handicapés et non-handicapés auraient pu se côtoyer. C’est alors que nos enfants auraient appris à être plus tolérants envers autrui et l’on aurait appris à apprécier la diversité humaine.
Que pensez-vous de l’avenir professionnel des handicapés à Maurice ?
Il reste beaucoup à faire dans ce domaine. On a besoin de formation afin d’aider à l’inclusion des handicapés dans leurs vies professionnelles. L’environnement doit aussi être adapté à la participation des handicapés dans l’emploi. Quand les handicapés militent pour une société plus accessible, on demande, l’accessibilité non seulement à l’infrastructure, mais aussi l’accessibilité à l’information, à la technologie et aux droits. Cependant, je suis très soulagé d’apprendre qu’il existe maintenant des programmes inclusifs pour les personnes en situation de handicap. On a pris du retard dans ce domaine, mais comme dit l’adage, mieux vaut tard que jamais. Je suis agréablement surpris d’apprendre que dans le récent Budget, les enfants de 0 à 15 ans auront droit à une allocation financière. Ceci aidera énormément à la protection et à l’épanouissement des enfants handicapés à Maurice. Je pense aussi que des parents doivent respecter les allocations données aux enfants en situation de handicap et ne pas s’en servir pour payer les leçons particulières des sœurs et frères non-handicapés.
Quelles sont les mesures que vous préconisez à long terme pour remédier aux problèmes que vous avez décrits ?
Tout d’abord, il y a la responsabilité de l’État. Je pense que le problème des handicapés n’est pas seulement le problème du ministère de la Sécurité sociale. Quand les handicapés ont un problème de santé dans un hôpital, pourquoi faut-il aller au ministère de la Sécurité sociale ? Ne devrions-nous pas plutôt transmettre ce problème au ministère de la Santé ? Je pense qu’il faut une collaboration des différents ministères et organisations publiques afin d’apporter un soutien efficace aux personnes en situation de handicap. Le gouvernement doit aussi faciliter un consensus parmi la société mauricienne et les mouvements des handicapés. Pour cela, nos responsables politiques devraient mieux consulter les personnes concernées, mais aussi prendre l’avis de la société en général sur le sujet du handicap. Jusqu’à l’heure, les acteurs politiques passent, mais le handicap reste. Il est grand temps qu’on dépasse la politique partisane pour aller plus loin sur des sujets qui peuvent améliorer la vie des handicapés à Maurice. Il faudrait aussi une meilleure représentation démocratique à tous les niveaux de la société. Les parents des handicapés et les handicapés devraient être capables de faire parti d’un comité. Par exemple, il y a beaucoup de parents d’enfants handicapés et des handicapés qui veulent se lancer dans l’entrepreneuriat. Si on avait une meilleure représentation démocratique, peut-être que la SMEDA aurait pu offrir des facilités mieux adaptées à leurs besoin. Je voudrais aussi saisir ce moment afin de sensibiliser la société mauricienne à l’article 16 sur la non-discrimination qui exclut les personnes en situation d’handicap. C’est encourageant d’apprendre que nos responsables politiques travaillent actuellement sur ce dossier à travers le Disability Bill. J’invite nos responsables politiques à débattre sur ce sujet en y incluant les différentes parties concernées. Il faut surtout un ‘wide consultation’ incluant les handicapés. Comme on dit : ‘Nothing about us without us’.
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