«Ce qui fait la force de notre pays, Dieu merci, c’est notre vivre-ensemble. C’est cela qui permet le développement et le progrès». C'est ce qu'affirme le Dr Khalil Elahee dans un mini-entretien accordé au journal Star, publié ce dimanche 9 juin. L'universitaire a accordé ce mini-entretien dans le cadre d'un dossier après les récentes tentatives des groupuscules, fauteurs de troubles et autres pyromanes de nuire à notre harmonie sociale et à l'entente cordiale entre les nombreuses communautés qui cohabitent en paix au sein de notre société. Nous prenons la liberté de reproduire sur notre site Web ce mini-entretien.
L’harmonie sociale est-elle réellement menacée à Maurice ?
Il y a un monde réel où le vivre-ensemble au quotidien se passe relativement bien. C’est ce que nous voyons à l’école, au travail, au marché, dans la rue. Il y a, ensuite, un monde virtuel sur les réseaux sociaux et dans les esprits de certains, souvent des extrémistes de toutes sortes. Là, malheureusement, est amplifiée la moindre provocation, insulte, ou écart, qui peut venir soit d’ici et d’ailleurs. La menace peut venir de notre inhabilité à être reconnaissants pour tout ce qui passe plutôt bien. Et de parler sans arrêt et réagir de manière exagérée à l’incitation au mal de quelques-uns.
Qu’est-ce qui explique les messages de haine véhiculés par des groupuscules ces derniers temps ?
Il faut s’attendre à ce type de messages lorsque nous abordons une campagne électorale, ici ou ailleurs. Sans les réseaux sociaux, cela ne serait pas arrivé. Les élections sont aujourd’hui l’occasion pour les extrémistes de se mettre de l’avant, surtout avec l’échec des partis traditionnels. D’ailleurs, nous voyons à quel point – des États-Unis à l’Inde en passant par l’Israël, l’Ukraine ou le Nigéria – Facebook joue un rôle majeur dans les campagnes électorales. Ces messages de haine ne doivent pas être circulés mais nous voyons ceux qui s’y opposent devenir indirectement les agents de leur propagation en simplement cliquant sur «resend» ou «forward».
Que faut-il faire pour mettre un frein à ces agissements ?
Il faut utiliser «delete» plus souvent pour envoyer ces messages à la poubelle. Mieux, il faut refuser de les regarder et d’inviter les autres à les regarder. Cela devient frustrant lorsque les gens sont exposés à ces messages, donc sont insultés et agressés, dans leur dignité et psychologiquement, et ne peuvent réagir proprement. C’est sans doute ce que cherche souvent l’individu qui est à l’origine du message. Nous lui faisons un cadeau en accordant tant d’importance à sa provocation. C’est aux autorités d’agir promptement.
Comment peut-on ainsi propager davantage la paix et l’harmonie entre toutes les communautés ?
Avant d’arriver au point où les autorités doivent agir, et ce de manière indépendante et impartiale, il faut un travail en amont en termes d’éducation. L’esprit critique, la connaissance des religions, l’histoire et même les arts, la philosophie et la culture, bref tout ce qui ne semble pas être utilitaire, ne fait pas souvent partie de nos programmes d’étude. L’enseignement des valeurs est négligé. Les associations socioreligieuses doivent construire des ponts entre elles et entre les gens, et non devenir des «roder bout». La classe politique est celle que nous méritons finalement. Ceux qui sont une menace pour la paix sociale doivent être rejetés par les électeurs.
On dit que sans harmonie sociale, il n’y a pas de succès sur les plans social, économique et autres. N’est-ce pas ?
Mon humble opinion est que ce qui fait la force de notre pays, Dieu merci, c’est notre vivre-ensemble. C’est cela qui permet le développement et le progrès. Mais il faut rester vigilant. Le respect est durable et réciproque lorsque la connaissance prend le dessus de notre ignorance. La clé est donc dans notre éducation qui ne doit pas être uniquement dans un but utilitaire. Il ne faut pas oublier la dimension spirituelle et morale, surtout lorsqu’on a à cœur l’avenir de nos enfants.
Propos recueillis par Nuur-Uddin Jandanee
Le journal Star dit un grand «NON» à la haine raciale dans un dossier publié ce dimanche. Plusieurs personnes, notamment l'ex-Président de la République, Cassam Uteem, le père Philippe Goupille, président du Conseil des religions, le Pandit Ved Gopee, vice-président du Conseil des religions, Nissar Ramtoola, président de la Jummah Mosque, Navin Unoop, vice-président de la Voice of Hindu, Yusuf Joomun du Centre de Documentation sur l'Islam et le Dr Khalil Elahee se sont exprimés sur le sujet dans ce dossier.
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