Selon les estimations de l’Alzheimer Diseases International, 10 000 personnes souffrent de cette maladie à Maurice.
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Dans le monde, elles seraient 46,8 millions. Le défi est maintenant le coût qu’implique la prise en charge des malades. En marge de la Journée de l’Alzheimer, le lundi 21 septembre, le Dr Ameenah Sorefan, présidente de l’Association Alzheimer Ile Maurice, fait le point.
Quelle est la situation concernant l’Alzheimer à Maurice ?
Aucune étude n’a été réalisée sur la prévalence de la démence ou de l’Alzheimer, qui est un des syndromes de la démence. Selon les World Alzheimer Reports de 2009, 2013 et 2015, la maladie est progressive et le nombre de cas augmente de jour en jour. Le dernier rapport indique que Maurice compterait 10 000 cas. Mais d’ici 2030, ce nombre devrait doubler, selon les prévisions. Le nombre de personnes âgées de plus de 60 ans représente 14 % à 15 % de la population mauricienne. Comme cette maladie est associée au vieillissement, plus la population vieillit, plus on aura des personnes atteintes de démence ou d’Alzheimer.
Est-ce que le vieillissement est le seul facteur de l’Alzheimer ou la démence ?
Non. Il y a deux types d’Alzheimer : celui associé au vieillissement et les « early onsets » ou Alzheimer précoce, touchant les personnes dès l’âge de 50 à 60 ans. Les études faites en 2014 ont démontré qu’il y a beaucoup de facteurs de risque auxquels nous devons nous préparer. À Maurice, nous avons un énorme problème. Nous sommes concernés par tous les facteurs de risque des maladies non transmissibles : diabète non contrôlé, hypertension, maladies cardiovasculaires, tabagisme, alcoolisme, traumatisme crânien, obésité, manque d’exercices physiques et maladies dépressives.
Est-ce que l’Alzheimer peut être prévenue ?
Oui, il suffit d’éliminer les facteurs de risque. Si nous souffrons de dépression ou d’une maladie non transmissible, il faut simplement se prendre en charge et se soigner. La prévention commence tôt. Chaque personne devrait faire en sorte de ne pas avoir les maladies non transmissibles. Pour ce faire, prenez soin de votre cœur, arrêtez la cigarette, l’alcoolisme, surveillez la tension, le cholestérol, le diabète... Il faut aussi être actif sur le plan physique en faisant des exercices régulièrement. Une alimentation saine et équilibrée est importante également. Certains aliments sont à privilégier : les poissons gras, les oméga-3 et 6, les vitamines B1 et B6 qu’on trouve dans les graines (amandes, noix, haricots, noix de cajou). On doit aussi entretenir son cerveau par des activités mentales telles que les jeux de société, les puzzles, la lecture. Vivre en société et ne pas rester dans l’isolement sont aussi importants.
L’Alzheimer est une maladie neurodégénérative. quels sont ses symptômes ?
Que ce soit l’Alzheimer précoce ou celui lié au vieillissement, les signes sont les mêmes : perte de mémoire récente, changement de comportement soudain, désorientation, trouble du langage, manque de mots et difficulté à prendre des décisions. C’est une maladie progressive affectant les neurones. La dépression précède l’Alzheimer dans certains cas et le patient à des sautes d’humeur. Tous ces symptômes ne viennent pas en même temps, mais de manière progressive. Les études ont démontré que la maladie commence dix ans avant que les symptômes n’apparaissent. Si on note ces symptômes, il faut consulter un médecin et non pas se dire que c’est normal et que c’est dû au vieillissement. Il faut savoir que la maladie d’Alzheimer chez les personnes âgées peut arriver à n’importe qui, tandis que le type précoce est familial ou génétique.
Une fois le diagnostic posé, qu’est-ce qui peut être fait pour retarder les effets de la maladie ?
Il y a des médicaments, mais ils ne sont pas efficaces dans tous les cas, car c’est une maladie sans guérison. Les traitements sont symptomatiques et il n’y a pas de vaccin. Il est bon de se faire rapidement diagnostiquer, afin que la famille puisse se préparer, car c’est une maladie progressive, comme nous l’avons dit. Le cheminement pour accepter et comprendre l’Alzheimer est long, tout comme l’étape d’une bonne prise en charge. Le diagnostic doit se faire par un psychiatre, un neuropsychiatre, un neuropsychologue... Je souligne que ce n’est pas parce que quelqu’un oublie les choses qu’il a l’Alzheimer. Il faut procéder par élimination, en fonction des symptômes, car une tumeur au cerveau peut présenter les mêmes signes que l’Alzheimer. Une dépression aussi. Dans le dernier cas, une fois soignée, la personne va mieux.
Vous avez parlé de la prise en charge. comment est-ce que l’entourage peut aider une personne atteinte d’Alzheimer ?
Le problème, à Maurice, c’est que les gens ont tendance à laisser traîner les choses et à réagir souvent tardivement. C’est pareil pour toutes les maladies. On est dans le déni. C’est pour cela que notre association mise sur la sensibilisation pour éduquer et informer la population. La prise en charge est importante et la famille doit savoir se montrer patiente et témoigner de l’affection au malade. La façon dont on va s’adresser à lui va lui faire sentir qu’il s’agit d’un proche. Il faut que le malade continue à sortir et à participer à des activités sociales. Il ne faut pas avoir honte de la maladie d’Alzheimer et la considérer comme tabou. C’est un droit humain de continuer à valoriser le malade.
Avec le vieillissement de la population, quelles mesures les autorités devraient-elles mettre en place afin d’encadrer et d’accompagner les malades et leur famille ? Depuis des années, l’OMS considère la démence comme une priorité de santé publique. L’Association Alzheimer travaille en collaboration avec les autorités et nous réclamons un plan national pour la démence. Il faut un programme de sensibilisation et d’éducation de la population. Il est utile de former des professionnels pour les diagnostics et de prévoir la prise en charge. Il est nécessaire de mettre en place des cliniques de mémoire dans les unités psychiatriques ou neurologiques. Le ministère de la Sécurité sociale pourrait aider en prévoyant une pension pour les personnes malades et une allocation pour les « Carers ».
L’Alzheimer : démystifié par les associations
Le mois de septembre est connu comme le mois de l’Alzheimer. Plusieurs activités sont prévues dans ce contexte. Le centre de l’Association Alzheimer, à Belle-Rose, propose des journées portes ouvertes, afin de sensibiliser le public tant sur la maladie que sur le travail fait pour encadrer les malades. Le thème de la journée du 21 septembre est Ne m’oublie pas. L’association souhaite qu’on se rappelle des personnes malades, aussi bien que ceux qui sont décédés.
Le public pourra visiter le centre le lundi 21, le mercredi 23, le vendredi 25 et le mardi 29 septembre de 9 h 30 à 12 h 30. Par ailleurs, le Lifecare Residential Care Home de Curepipe organise un après-midi culturel, le lundi 21 septembre de 12 h 30 à 15 heures. Selon le responsable de l’organisation, Pravesh Dabedeen, l’Alzheimer est méconnu, ce qui fait que certaines personnes se retrouvent à l’hôpital psychiatrique parce que leurs proches les considèrent comme folles.
« D’autres pensent qu’on leur a jeté un mauvais sort », dit-il. À travers une petite représentation, l’association compte démystifier l’Alzheimer en montrant ses symptômes, comment procéder à la prise en charge d’un malade et les difficultés que rencontrent les familles.
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