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Document du Parlement britannique sur les Chagos : la Chambre des communes peut «retarder la ratification d’un traité» avec Maurice

Que l’accord entre le Royaume-Uni et Maurice, datant du 3 octobre, sur la rétrocession de l’archipel des Chagos, se transforme en réalité n’est pas une garantie absolue. Dans un Research Briefing de 28 pages sur l’accord entre les gouvernements britannique et mauricien sur les Chagos, John Curtis, le Senior Library Clerk - International Affairs and Defence - et rédacteur de ce document destiné aux parlementaires britanniques, indique que « la Chambre des communes possède un pouvoir statutaire pour retarder (théoriquement indéfiniment) la ratification d’un traité ». Le document a été déposé à la House of Commons britannique, équivalent du Parlement mauricien, la semaine dernière. John Curtis indique que même s’il y a eu un « accord politique de principe », un traité doit être ratifié pour transformer cet accord en réalité. Celui-ci « devrait être publié dans les semaines à venir ». John Curtis explique que « bien que ce soit le gouvernement, et non le Parlement, qui ratifie les traités, le pouvoir statutaire de la Chambre des communes repose sur une convention constitutionnelle bien établie, connue sous le nom de règle de Ponsonby, qui prévoyait que les traités devaient être soumis au Parlement (avec une note explicative) avant leur ratification ». Cette convention se trouve dans la partie 2 de la Constitutional Reform and Governance Act (CRAG). En vertu de cette loi, « le gouvernement doit normalement déposer un traité proposé devant les deux chambres (House of Commons et House of Lords) et attendre ensuite 21 jours de séance avant de prendre des mesures pour le ratifier. Si, pendant cette période, la Chambre des communes adopte une résolution contre la ratification du traité, celui-ci ne peut être ratifié, et une nouvelle période de 21 jours de séance est déclenchée. Ce processus peut, théoriquement, être répété indéfiniment si la Chambre des communes continue de trouver le temps d’adopter des résolutions contre la ratification d’un traité ».

John Curtis fait également ressortir que « la Chambre des lords peut s’opposer à la ratification d’un traité », comme cela s’est passé le 22 janvier dernier, concernant la ratification de l’accord Royaume-Uni/Rwanda sur un partenariat d’asile.

Le gouvernement britannique a aussi confirmé qu’une législation sera introduite en 2025 pour mettre en œuvre le traité Royaume-Uni/Maurice. Comme le précise Hendry et Dickson dans British Overseas Territories Law (2e éd., 2018), « le transfert d’un territoire britannique d’outre-mer à un autre État nécessiterait la modification de l’annexe 6 de la loi sur la nationalité britannique de 1981 ». L’annexe 6 liste les territoires d’outre-mer pertinents pour cette loi, y compris l’archipel de Chagos. « Cette modification nécessiterait une législation primaire », affirme John Curtis. D e plus , « comme la déclaration conjointe Royaume-Uni-Maurice indique que le Royaume-Uni fournira un soutien financier continu à Maurice, cette dépense nécessitera l’autorisation du Parlement, probablement via une résolution financière liée au projet de loi ». Notons que les parlementaires britanniques sont très divisés sur la question de la rétrocession des Chagos, y compris dans les rangs de la majorité travaillistes.

La question de la compensation et du loyer

Sur la compensation à être donnée à Maurice et aux Chagossiens si l’accord est ratifié, le rapport ne donne pas de chiffres. Citant David Lammy, Secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères, le document indique que « aucun accord de base militaire ne mentionne de coûts, car cela nuirait à notre sécurité nationale ». Cependant, il y aura une « discussion sur les coûts » lors de la présentation du traité à la Chambre.
Par contre, « le Royaume-Uni et Maurice se sont également engagés à soutenir le bien-être des Chagossiens, en établissant un nouveau fonds de soutien financé par le Royaume-Uni. Il n’est pas encore clair qui administrera le fonds et sera chargé des paiements ».

Puis, précise le document, il y aura un « financement du Royaume-Uni à Maurice en contrepartie de l’utilisation de Diego Garcia et pour des projets d’infrastructure visant à « permettre » un nouveau «partenariat économique, sécuritaire et environnemental» entre les deux pays ».

La zone océanique de l’archipel des Chagos « est plus de deux fois la taille de la superficie terrestre du Royaume-Uni, et elle comporte environ 2 859 kilomètres carrés de récifs coralliens ». En 2010, le Royaume-Uni y a établi une Marine Protected Area couvrant 640 000 km², où toutes les activités de pêche commerciale et d’extraction sont interdites. « Il n’est pas encore clair si la nouvelle zone marine protégée mauricienne couvrira la même zone et sera soumise aux mêmes restrictions de pêche », indique le document. 

Réinstallation des Chagossiens : la responsabilité de Maurice

Pour ce qui est de la réinstallation des Chagossiens, ce sera à Maurice de la gérer. « Maurice sera libre de mettre en œuvre un programme de réinstallation pour les Chagossiens vers les îles extérieures, mais pas Diego Garcia – Maurice et le Royaume-Uni établiront un nouveau programme de visites pour les Chagossiens dans l’archipel, limité aux îles extérieures. »

Diego Garcia: pleins pouvoirs aux Britanniques

Concernant la base militaire américaine sur Diego Garcia, « pour une période initiale de 99 ans, le Royaume-Uni sera autorisé à exercer, à l’égard de Diego Garcia, les droits et autorités souverains de Maurice nécessaires pour assurer la poursuite de l’exploitation de la base ». De plus, « les opérations de la base resteront sous le contrôle total du Royaume-Uni » et le « Royaume-Uni a le droit de prolonger » la période initiale de 99 ans.

Le document précise que David Lammy a déclaré : « Nous avons le plein soutien de Maurice pour des arrangements de sécurité robustes, y compris pour empêcher les forces armées étrangères d’accéder aux îles extérieures ou de s’y établir ».

 

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