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Consommation : d’autres hausses à prévoir prochainement 

Jean-Luc Émile a abordé avec ses invités la hausse des prix des produits alimentaires dans l’émission « Au Cœur de l’Info ».

Jusqu’où ira la flambée des prix des produits alimentaires ? C’était le thème de l’émission « Au Coeur de l’Info » du mardi 9 juillet, animée par Jean-Luc Émile. Le consommateur aura-t-il un répit prochainement ? Autant de questions qui ont été abordées par les divers intervenants. 

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La hausse actuelle des prix des produits alimentaires et des articles de grande consommation est causée par deux facteurs : les coûts élevés du fret et la dépréciation continue de la roupie face au dollar. Cette situation exerce une pression croissante sur les prix des produits importés à Maurice. Malheureusement, les personnes qui ont pris la parole durant l’émission sont catégoriques : d’autres augmentations sont attendues dans les jours et semaines à venir. Ils ont proposé des pistes en vue d’alléger le fardeau des consommateurs. 

Pénurie de devises 

Certains prix ont déjà augmenté. Produits laitiers, pâtes, beurre, fromage : tout coûte plus cher. Ainsi, les allocations récemment perçues fondent comme neige au soleil, déplorent de nombreux Mauriciens. De leur côté, les importateurs indiquent que leur situation difficile s’empire à cause du manque de devises. C’est ce que précise Pritam Dabydoyal. « Certes, la Banque de Maurice intervient, mais tout le monde a du mal à obtenir des devises. Si on en trouve, celles-ci sont en petite quantité. Étant donné que c’est compliqué d’avoir des devises de la banque, on perd des contrats », fait-il ressortir. Selon lui, l’approvisionnement de produits alimentaires de base ne peut pas fonctionner ainsi. Il est donc essentiel de trouver une solution afin d’éviter de se retrouver dans une situation où le ravitaillement en produits bon marché est compromis. Il est crucial de gérer les risques financiers de manière prudente, mais parfois le manque de devises requises pour payer pose problème. C’est ainsi que l’augmentation des prix impacte la population.

Pritam Dabydoyal explique qu’il y a des périodes où certains produits sont abordables, mais souligne qu’il est nécessaire d’avoir les moyens financiers pour les acheter. « C’est en respectant nos engagements financiers que nous pouvons bénéficier de produits bon marché, grâce à de bonnes relations internationales qui facilitent l’accès à ces produits à bas prix. Les autorités doivent être à l’écoute et établir des priorités en conséquence », ajoute-t-il. Selon lui, lorsqu’une personne souhaite importer et demande des devises, la banque devrait fournir le taux de change actuel. Il estime qu’en respectant la loi et en permettant l’importation de tous les produits pour briser les monopoles, les prix pourraient baisser significativement, offrant une solution bénéfique pour tous. C’est pourquoi il préconise un renforcement du contrôle sur les devises.

Il explique que les importateurs anticipent une augmentation continue des coûts de fret, passant de 1 300 à 1 400 dollars à 5 500 dollars. Il souligne également un problème de disponibilité des conteneurs. « Cette tendance à la hausse ne semble pas près de s’arrêter. Beaucoup de commerçants planifient leurs activités sur les trois à quatre prochains mois en fonction des partenariats établis. Nous sommes encore chanceux de pouvoir maintenir des contacts et des contrats à des prix raisonnables, mais avec l’augmentation du fret, l’inflation et la dépréciation de la roupie, ces accords se fragilisent », déplore-t-il, exprimant l’espoir que des mesures seront prises pour remédier à la situation.

Abus 

Outre la hausse des frais de fret et la dépréciation de la roupie par rapport au dollar, d’autres éléments contribuent à la flambée des prix. Il s’agit des taxes sur certains produits et la TVA, affirme pour sa part, Jayen Chellum, le secrétaire général de l’Association des Consommateurs de l’Ile Maurice (ACIM). « Dans une économie libérale, cela entraîne une inflation des profits. Malheureusement, un grand nombre de commerçants ne jouent pas un rôle social et profitent de l’occasion pour augmenter leurs prix de manière excessive », dit-il sur un ton indigné.  L’ACIM, fait-il ressortir, est déjà intervenue pour demander des éclaircissements sur la méthode de calcul de la marge bénéficiaire (« mark-up »). Il explique : « Le ministère indique un certain mark-up, mais c’est le commerçant qui le calcule. Nous devons prendre tout cela en considération ». D’ailleurs, une étude a été menée et démontre « une exagération ». Il note également que certains commerces n’affichent pas les prix et estime que le ministère du Commerce doit augmenter les amendes, car le droit du consommateur à l’information est en jeu.

Jayen Chellum regrette que l’observatoire des prix ne remplisse pas son rôle efficacement. « L’observatoire des prix est peu visible et rarement mentionné. Avec le ‘mark-up’ actuel, les prix ne se stabilisent pas. Il faut trouver une solution pour fixer les prix. La STC importait des produits, mais de manière insuffisante. Il est crucial de revoir la structure de cet organisme pour qu’il soit plus actif sur le marché », ajoute-t-il.

Illusion monétaire

L’économiste, Takesh Luckho ne passe pas par quatre chemins. « Les prix augmentent et continueront de le faire. Depuis deux ans, le problème de l’inflation et du pouvoir d’achat persiste. Les décideurs ne prennent pas les mesures appropriées.  Des allocations ont été accordées, mais des institutions comme la Banque mondiale et le FMI avertissent d’une illusion monétaire et d’un cercle vicieux d’inflation. Même si l’inflation a diminué, il ne faut pas se laisser berner », met-il en garde. Une situation due à des problèmes structurels et de politique.  De surcroit, la dette des ménages a augmenté. « Un ménage dépense en moyenne Rs 41 000 pour les besoins de base. Lorsqu’on regarde les chiffres, dans une maison où une seule personne travaille, le salaire garanti est de Rs 20 000. Les gens doivent trouver un autre emploi pour joindre les deux bouts, prendre des prêts, utiliser des cartes de crédit pour payer les dettes et acheter les provisions. Si la situation continue sans changement de modèle économique, les personnes devront emprunter davantage », ajoute-t-il. 

Certes, le salaire minimum a été rehaussé, mais la relativité des rémunérations doit reprendre sa place. Takesh Luckho est d’avis qu’il faut redonner confiance à la population en mettant les bonnes personnes aux bons endroits. « Plusieurs aspects doivent être revus pour redresser l’économie avec efficacité. Les allocations sont illusoires, car elles donnent l’impression d’une amélioration. Or, les prix augmentent et il faut plus d’argent pour joindre les deux bouts », explique-t-il. 

Accords bilatéraux 

Suttyhudeo Tengur, directeur de l’APEC et membre de l’observatoire des prix, parle d’une « période sombre pour les consommateurs ». Il affirme : « Environ 88 % des revenus de l’État proviennent des taxes et la TVA à elle seule rapporte Rs 112,6 milliards. C’est une taxe qui, plus on consomme, plus on paie ». Il déplore que les acheteurs soient contraints de s’endetter pour financer leurs études et remplir leurs caddies, entre autres. « La classe moyenne est en train de s’effondrer, tandis que la classe moyenne inférieure se fond dans la catégorie des revenus plus bas. Aujourd’hui, notre argent perd de sa valeur et il est crucial d’arrêter de surtaxer les commodités et de dévaluer la roupie », déclare-t-il. 

Selon lui, il est nécessaire de former des accords bilatéraux pour avoir un accès direct aux commodités, de pays à pays ou de gouvernement à gouvernement, sans passer par des intermédiaires.  « Le prix de l’essence surtaxé pourrait baisser si nous faisions des accords directs », fait-il ressortir. Pour lui, il est essentiel de tirer les leçons du Royaume-Uni et de la France, où la baisse du pouvoir d’achat affecte les électeurs et entraîne des ajustements, voire corrections, politiques. « Nos politiciens doivent tirer des leçons de ces situations, sinon ils feront face aux mêmes difficultés. Il faut rassembler toutes les compétences nécessaires pour prendre les bonnes décisions. Il est urgent de cesser les guerres politiques et se concentrer sur une guerre économique », recommande-t-il. 

En guise de conclusion, il fait comprendre qu’avec le fret qui augmente, sans oublier les conséquences de la guerre entre grandes puissances, « Maurice a besoin d’avoir ses propres navires pour transporter les marchandises ».

 

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