Que pensent les jeunes lycéens des seniors ? Sont-ils conscients, ou non, de leur contribution au développement de Maurice, à la stabilité de la famille, à la transmission des valeurs positives ? Ces questions étaient posées aux participants lors d’un Essay Competition organisé par le Senior Citizen Council (SCC). Les participants et gagnants ont été récompensés le mercredi 22 mai, lors d’une cérémonie au centre récréatif James Burty David, à Pointe-aux-Sables.
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Après l’organisation, la semaine dernière, du festival d’art dramatique créole-bhojpuri, en collaboration avec le ministère des Arts et de la Culture, cette semaine a vu l’édition 2019 du concours de dissertation organisé par le SCC.
Le thème, « Contribution of the elderly in the development of Mauritius - A gender perspective », a mobilisé la participation de neuf collèges de Maurice. Le concours était destiné aux seuls élèves de Lower VI, vu qu’ils n’ont aucune contrainte d’examen. Selon Beenah Seebaluck, Assistant-Secretary du Council, la thématique reste résolument pertinente, avec une actualité marquée par des actes de violence perpétrés sur des seniors. « Il ne faut jamais baisser la garde. Les jeunes doivent être en premier sensibilisés, surtout en milieu scolaire », fait-elle ressortir.
Mercredi, à Pointe-aux-Sables, devant une salle comble, le SCC avait réuni toutes les conditions nécessaires pour un accueil digne des participants: boissons et sandwiches, musique et chansons, sans oublier des ‘cash prize’ généreux où nul n’a été oublié. « Nous accordons un grand intérêt à la nécessité de réduire le conflit intergénérationnel, de manière à rapprocher les jeunes des seniors, afin que prévaut le respect à l’égard de ces derniers dans une perspective nationale», explique Beenah Seebaluck.
En ce sens, l’organisation de ces Essay competitions participe d’une volonté de promouvoir le respect de la société envers les seniors. Cela passe par un certain nombre d’activités – ainsi que des législations – leur permettant de ne plus être ‘invisibles’. Toutefois, ce travail serait incomplet sans l’approche pédagogique dans le milieu scolaire, où les élèves, en participant à des rédactions, sont amenés à se documenter.
Cet exercice ‘de terrain’, du coup, permet de rétablir un peu l’équilibre dans une société qui valorise les jeunes et c’est souvent l’autre, le plus âgé que nous, qui apparait introuvable, invisible.De cette manière là, les participants ont relevé un gros défi ‘à contre courant’ dans leur milieu, où la stigmatisation du ‘vieux’ semble relever d’une banalité. L’effort pécuniaire du SCC à chacun des participants est, à juste titre, fort louable, plutôt que d’offrir une coupe ou des livres, dans une société où la lecture est en perte de vitesse.
L’âgisme : les stéréotypes discriminatoires contre les ‘vieux’
Le terme est un anglicisme – fixé par le gérontologue Robert Butler, à la fin des années 60.
Aujourd’hui, il s’applique à toutes les circonstances qui caractérisent un comportement discriminatoire à l’égard des ‘vieux’. Selon l’avocat français Diego Pollet, l’âgisme désigne un ensemble de stéréotypes négatifs à l’égard du vieillissement.
À l’hôpital, dans le milieu professionnel, dans le bus, la famille, à l’embauche, dans l’accès au logement, voire dans les rues. Les ‘vieux’ dans le regard des ‘jeunes’ sont souvent des ‘non-citoyens’, ‘invisibles’, fait ressortir Virjanand Mulloo, président d’une association de seniors regroupant essentiellement des ex-fonctionnaires. Il intervenait lors de la cérémonie de remise des prix. Victimes de représentations sociales, les seniors, même en possession de toutes leurs capacités physiques et mentales, sont privés de promotion dans leur travail, confinés dans des espaces exigus au domicile et ignorés dans les espaces publics.
Contre la discrimination à l’égard des femmes
À la faveur de la thématique “The contribution of the elderly in the development of Mauritius - A gender perspective”, le SCC a voulu donner l’occasion aux élèves en Lower VI de réfléchir sur la discrimination à l’égard des femmes dans la société mauricienne. Ce qui contribue, par la même, à l’effort national de solidarité intergénérationnelle. Ce concours témoigne en même temps des actions encore nécessaires pour éliminer les restes de la discrimination dont sont victimes les femmes, en tenant compte du fait que toute société est constituée de groupes, parfois antagonistes sur le plan social, mais aussi au niveau des genres, lorsque les femmes sont discriminées dans une société où s’exerce la domination patriarcale.
Toutefois, force est de reconnaître que les différents gouvernements qui se sont succédé à Maurice ont tous réalisé des avancées pour la cause des femmes. Celles-ci ont, elles-mêmes et sans attendre les législations, toujours œuvré naturellement à la « stabilité au sein de la famille,
l’émancipation sociale, politique et culturelle, au développement économique », fait observer le SCC. Il déplore cependant que l’histoire ne leur rend pas suffisamment justice.
Les participants étaient appelés à se pencher sur la contribution de la femme mauricienne, âgée entre 60 et 90 et plus, dans le développement de l’île Maurice moderne. Pour y arriver, il leur fallait consulter les livres d’histoire, mais surtout interviewer les seniors dans leur environnement, leurs parents et voisins.
Durant les périodes charnières datant d’avant 1970, marquées par une économie dépendant de la monoculture sucrière, où hommes et femmes se retrouvaient dans les champs, les femmes accomplissaient tout aussi bien les tâches ménagères. Puis la période 1970-1990 vit l’apparition de la zone franche manufacturière, grande employeur de la main-d’œuvre féminine, mais aussi le secteur touristique vers la fin des années 80.
L’an 2000 est celui de la transformation radicale des moyens d’information et de communication, impactant profondément le tissu social, économique et culturel des Mauriciens, y compromis la vie des seniors, tandis que le développement des réseaux sociaux a favorisé le rapprochement des individus. Cette nouvelle donne fut aussi celle des défis à l’ère de la communication de l’info en temps réel, celle des ‘fake news’ et les applications qui permettent d’accéder aux services en ligne. "Comment les seniors se retrouvent-ils dans cette nouvelle configuration qui, souvent, creuse le conflit intergénérationnel ?", s’interroge le SCC.
Hafsia Bibi Koya Badrealam 2e prix : Anjalay Coopen parmi ses modèles
Coachée par son enseignant de sociologie, Malini Arjoon, Hafsia Bibi Koya Badrealam, 16 ans, est en Lower VI au SSS de Beau-Bassin. Elle a été éclectique dans son choix de grandes figures féminines mauriciennes : Anjalay Coopen, icône de la lutte des laboureurs contre les barons sucriers, tombée sous les balles durant une fusillade à l’occasion d’une grève sur la sucrerie de Belle-Vue-Harel en 1943 ; Sheila Bappoo, militante de la première heure du MMM, avant d’adhérer successivement au MSM et au PTr, où elle a occupé le ministère des Droits de la femme et celui de la Sécurité sociale ; puis récemment l’ex-Présidente de la République Ameenah Gurib-Fakim qui, même contrainte à la démission, incarne l’image d’une femme qui a su s’imposer dans le milieu universitaire et celui de la recherche.
« La difficulté dans cet exercice a été de rester pertinent et de trouver une cohésion », explique l’adolescente, orpheline de père et dont la mère gère une boulangerie. « Je vais lui offrir le cash prize, ça tombe bien, car ce sera à l’occasion de la fête des Mères », fait-elle valoir. Sous ses dehors timides, l’adolescente confie n’éprouver aucun trac à s’exprimer en public pour l’avoir déjà fait à l’occasion des Models United Nations. Après le secondaire, elle souhaite étudier l’économie. Évoquant les relations compliquées entre la nouvelle génération et les seniors, elle reconnaît que de nombreux jeunes excluent leurs parents de leur monde et sont séduits par le jeunisme.
« Ce concours, dit-elle, permet de jeter des ponts entre eux et encourage le dialogue pour la transmission des valeurs. »
Abhimaanyuh Mattapulut 1er prix : «Un prix important»
Au moment de prendre son prix, Abhimaanyuh Mattapulut, élève à la SSS Triolet, a eu une pensée spéciale pour ses parents, son père receveur de bus et sa mère femme au foyer. « Ils ne savent pas encore que j’ai obtenu Rs 10 000 », confie-t-il, toute joie affichée. Il avoue avoir travaillé sans le soutien de ses enseignants. « Je me suis concentré sur le développement de nos industries », explique-t-il. Lui-aussi reconnait que les seniors font l’objet de rejet dans notre société. Toutefois, dans les régions rurales, il observe que les aînés ont encore leur place au sein de la famille. « Ce sont eux qui assurent cette connexion nécessaire à la stabilité de la famille », déclare-t-il, avant d’indiquer que son ‘cash prize’ est destiné à financer ses futures études en économie.
Les gagnants au niveau national | |||
Les ‘cash prizes’ – Rs 10,000, Rs 7,000 and Rs 5,000 | |||
District | Collège | Filles/Garçons /Mixte | Nom de l’élève |
Lower Plaines Wilhems 3e Prix (Rs 5,000) | Beau-Bassin SSS | Filles | Bibi HafsaBadrealam KOYA |
Nom recteur | Mme M.L. Simonet | ||
Moka 2e Prix (Rs 7, 000) | Quartier Militaire SSS | Filles | Iranah DEEKSHI |
Nom recteur | Mme I. Balnath | ||
Pamplemousses 1er Prix (Rs 10,000) | Triolet SSS | Garçons | Abhimaanyuh MATTAPULLUT |
Nom recteur | Mme Y. Jeetoo |
Les résultats par collèges | ||||
Cash prize de Rs 2,000 pour chaque élève | ||||
District | Collège | Filles/garçons/Mixte | Nom de l’élève | Name of Rector |
Flacq | Modern College | Mixte | Thapeshwaree JHUGUR | M. Y. Sanmukhya |
Grand Port | SookdeoBissoondoyal State College | Garçons | PreetishGeshan BAGHA | M. S. Parmessa |
Moka | Quartier Militaire SSS | Filles | Nishita GOOMANY | Mme I. Balnath |
Pamplemousses | Triolet SSS | Garçons | Tejrajsingh PURMAH | Mme Y. Jeetoo |
Port-Louis | Pailles SSS | Filles | Celina April Lea MARISSON | Mme G. Samputh |
Rivière-du-Rempart | Friendship College | Filles | Hansaveni SOOKALOO | Mme A. Pyneeandee |
Lower Plaines Wilhems | Beau-Bassin SSS | Filles | Davini APPASAMY | Mme M. L. Simonet |
Upper Plaines Wilhems | Forest Side SSS | Garçons | Justin MARIE | M. S. Mohitram |
Savanne | Doha College Souillac | Filles | Farha BUXOO | Mme Yushra Bagalee |
Nombre d’élèves : 9 |
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