Face à la flambée des prix de la viande et de la volaille, de nombreux Mauriciens s’efforcent d’adapter leur alimentation afin de réduire considérablement leur consommation de produits non-végétariens. Dans certains foyers, la transition se fait vers une alimentation axée sur les végétaux.
Cela fera bientôt quatre ans que Sarah Thandrayen, 44 ans, a choisi de réduire sa consommation de poulet. Ce choix, explique la Portlouisienne, est motivé par diverses raisons, notamment économiques et de santé. Le déclic a été son constat d’une « détérioration » de la qualité de la viande et du poulet proposés sur le marché.
« Au fil des années, j’ai constaté qu’on se faisait berner. La qualité n’est plus la même. Par exemple, lorsqu’on achète de la volaille, elle semble peser lourd. Mais en cuisinant le poulet, c’est tout autre chose, on constate qu’il contient plus d’eau que de chair », déclare-t-elle. Sarah Thandrayen indique, de plus, que « la chair est sèche. Par conséquent, nous avons estimé que cela n’en valait pas la peine, surtout pour le prix ».
Si elle achetait toujours de la viande, elle confie en avoir vu de toutes les couleurs avec les hausses de prix. De fait, elle s’est également récemment vue contrainte de réduire le petit plaisir de déguster de la viande d’agneau lors des repas en famille.
« Chez nous, nous avions une préférence pour la viande d’agneau. Hélas, cette viande se vendant désormais à prix d’or, nous n’avons pas eu d’autre choix que de réduire notre consommation. » De plus, ajoute Sarah Thandrayen, l’incertitude quant à l’origine de la viande l’a poussée à réfléchir plus en profondeur aux conséquences sur sa santé et son hygiène de vie.
Aujourd’hui, la famille Thandrayen a basculé vers le flexitarisme, c’est-à-dire une alimentation semi-végétarienne. « L’hygiène alimentaire a été le déclencheur dans notre démarche de transition. Cependant le coût élevé de la viande et du poulet pèse également lourd dans la balance », poursuit la quadragénaire.
Le confinement, souligne-t-elle, a favorisé cette transition. « À ce jour, notre consommation de viande et de poulet s’est réduite d’une fréquence quotidienne à occasionnelle. La source de protéines animales est très limitée dans notre alimentation », fait savoir Sarah Thandrayen.
Cependant, elle essaie d’intégrer des substituts à la viande dans son alimentation. « Malgré notre choix de réduire la consommation de viande, il est important pour nous d’avoir une alimentation équilibrée à la maison. Pour ce faire, nous trouvons toujours des façons d’incorporer l’apport de protéines à travers des aliments tels que le poisson frais, plus abordable que la viande ou le poulet. Ou encore les légumineuses (grains secs) et le tofu », énumère-t-elle.
D’ailleurs, dit Sarah Thandrayen, le tofu est désormais une protéine qui fait partie intégrante de l’alimentation de sa famille. « D’une part, c’est goûteux et facile à cuisiner. Et d’autre part, cela procure un sentiment de satiété. De plus, nous préparons des pâtes à l’italienne à partir de pâtes à la farine de semoule, qui est une excellente source de vitamine B », fait-elle ressortir.
Selon elle, cette alimentation axée sur le végétal et les substituts de protéine, fer et vitamine lui a permis de constater des changements positifs non seulement dans sa vie, mais également en termes de dépenses. Elle n’écarte d’ailleurs pas la possibilité de devenir végétarienne. Elle a, en effet, pris goût à ce mode de vie qu’elle trouve avantageux.
« Si au début, réduire la viande et le poulet était une contrainte, aujourd’hui c’est un choix complètement assumé. J’estime que je n’aurai aucune difficulté à m’en passer. En sus, grâce à l’accès à l’information sur la Toile, on peut facilement trouver de multiples moyens de rendre des aliments végétaux plus intéressants grâce à des recettes ingénieuses », estime-t-elle.
Chez les Chand, cela fera bientôt deux mois que l’on ne consomme plus de viande. « Aujourd’hui, la viande se vend à prix d’or. Nous avons donc pris la décision de ne plus en acheter », avance Amar, le père de famille.
Auparavant, dit-il, « nous pouvions quand même en consommer occasionnellement, soit deux fois par mois pour le plaisir de varier les protéines et de se régaler les papilles, car l’agneau coûtait déjà cher. Désormais, c’est un luxe qu’on ne peut plus se permettre ».
Si la famille Chand n’est pas encore disposée à se passer de poulet après avoir fait une croix sur la viande, elle opte, elle aussi, de plus en plus pour le flexitarisme. « Nous essayons tant bien que mal de trouver des substituts de protéines tels que les grains secs, le poisson, la crevette ainsi que de nouvelles recettes pour rehausser les légumes », précise Amar Chand.
Il confie que jusqu’à présent, il n’a pas trouvé de substituts d’origine végétale aussi riches en protéines que ceux d’origine animale. « Certes, le prix de la volaille a également accusé une hausse, mais nous n’avons pas le choix. Et puis, les enfants aiment la volaille, nous n’avons donc pas fait le choix radical de l’écarter de notre alimentation. Cependant, la réduction de la consommation de volaille est incontestable. »
Amar Chand préfère se concentrer sur les avantages du flexitarisme. « Je ne peux pas nier que depuis ce changement, certes forcé, de notre alimentation, je me sens en meilleure forme. Cela a été plus que bénéfique pour ma santé, mais surtout pour mon porte-monnaie ! » lance le père de famille.
Alimentation sans viande : risques et bienfaits
Selon la nutritionniste Yoshinee Dhunnoo, une personne dont l’alimentation a peu d’apports en protéines animales ou est purement végétalienne, est susceptible de développer des symptômes d’anémie accompagnés de vertiges. Elle évoque également un risque de manque de masse musculaire et de masse corporelle. « Les symptômes varient d’une personne à l’autre, selon les minéraux et vitamines qui manquent », explique-t-elle.
Néanmoins, un régime flexitarien ou purement végétalien comporte de nombreux bienfaits pour la santé, dit-elle. Les produits végétaux ne sont pas riches en matière grasse saturée. Une personne consommant majoritairement des produits végétariens est moins à risque de souffrir de maladies cardiovasculaires et du mauvais cholestérol, entre autres, indique-t-elle.
Yoshinee Dhunnoo souligne également les bienfaits pour la perte de poids dus aux fibres alimentaires que contiennent les céréales, grains secs et crudités.
« Par ailleurs, les produits végétariens sont riches en antioxydants, à l’instar du soja, présent dans de nombreux substituts à la viande, qui est efficace pour protéger le cœur et la santé en général. Le soja a des valeurs nutritives presque identiques à celles du poulet. »
Les meilleurs moyens de substituer les produits non-végétariens
Devant la tendance grandissante du flexitarisme chez les Mauriciens, la nutritionniste Yoshinee Dhunnoo souligne l’importance de comprendre les composants de la viande et de la volaille afin de trouver les substituts appropriés permettant d’adopter une alimentation saine et équilibrée.
« Généralement, les aliments non-végétariens sont des produits riches en protéines de qualité en comparaison aux protéines d’origine végétale telles que les grains secs ou les produits dérivés à base de soja. Il est donc primordial de trouver des substituts à la viande en cas de consommation réduite ou de non-consommation. Dans le cas contraire, il y aura un manque complet de protéines, de vitamine B12 et d’un bon niveau de fer », précise-t-elle.
Protéine
Pour trouver des protéines en adéquation, la nutritionniste met l’accent sur la prise de différents produits végétariens en complémentarité. « Les protéines contiennent des acides aminés que le corps humain ne peut pas produire. En moyenne, une personne a besoin de huit acides aminés essentiels. Ils sont présents en totalité dans des produits comme le lait, le fromage, la viande, le poulet et les œufs. Cependant, les produits végétaux en manquent un ou deux. De ce fait, en prenant ces produits végétaux ensemble, vous bénéficiez d’un apport en protéines complet. À titre d’exemple, vous pouvez combiner des céréales et des noix, ou bien du riz et des légumes secs. »
La vitamine B12 et le fer
Outre les protéines, les produits non-végétariens sont également une excellente source de vitamine B12 et de fer. Afin de ne pas compromettre ces valeurs nutritionnelles, la nutritionniste met en lumière les substituts à considérer. « Le fer est présent en grande quantité dans la viande rouge. Toutefois, elle peut être substituée par des légumes verts tels que les épinards, le cresson, entre autres », explique-t-elle.
Cependant, Yoshinee Dhunnoo précise que le fer présent dans les légumes verts n’est pas absorbé de la même manière par le corps que le fer présent dans les produits non-végétariens. « Accompagnez un produit végétal riche en fer avec un produit riche en vitamine C, cela facilitera l’absorption du fer », conseille-t-elle.
Concernant la vitamine B12, le lait de vache ainsi que les laits d’amande, de soja ou d’avoine peuvent être de bonnes sources pour ceux qui optent pour une alimentation purement végétalienne. Néanmoins, la nutritionniste recommande de faire un test sanguin afin de mesurer les réserves en vitamine B12. « Il est conseillé aux personnes ayant une alimentation strictement végétalienne de consulter leur médecin, car en cas de faible réserve en vitamine B12, ils devront sans doute prendre des suppléments sous forme de médicaments. »
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