Encore peu connu, le beatboxing dispose toutefois d’une petite communauté à Maurice. Cet art, qui consiste à jouer de son système phonatoire, intéresse ainsi de plus en plus de jeunes. Rencontre avec ces boîtes à rythme humaines.
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Tss, preuu, tick ou encore preuu, les human beatboxers arrivent à reproduire une multitude de sons pour en faire de la musique à la force des lèvres et de la bouche. À Maurice, cet art est encore que trop peu vulgarisé. Il n’empêche que cette discipline compte quelques rares ambassadeurs sur notre sol.
Mel Calou a 16 ans. Étudiant au collège de La Confiance, il pratique le beatboxing sérieusement depuis deux ans : « C’est ma sœur qui m’a fait découvrir le beatboxing en me montrant une vidéo sur la Toile. J’avais alors 13 ans. Cependant, ce n’est qu’à l’âge de 14 ans que je me suis intéressé de plus près quand un de mes amis a commencé à en faire aussi. »
Débutent alors des longues heures à passer pour maîtriser des sons divers : « Ce n’est pas une discipline qui s’apprend du jour au lendemain. Il faut des semaines, voire des mois de pratique pour reproduire à la perfection un son. Quant à moi, j’ai tout appris sur YouTube. »
Une fois qu’on maîtrise les bases, il faut maintenant chercher cette singularité qui viendra vous différencier des autres beatboxers : « Chaque beatboxer a sa particularité. Il y a ceux qui excellent dans le dub step, qui consiste à produire des sons en chantant en même temps. D’autres vont partir vers des sons bizarres, alors qu’il y a ceux, qui comme moi, vont utiliser beaucoup de basses dans leurs interprétations », explique Mel Calou.
Ned Domingue pratique le beatbox depuis trois ans. C’est avec Nathan Ohis, son ami d’enfance, qu’il s’y est mis : « Avec Nathan, on passait notre temps à faire des sons avec notre bouche. On ne savait même pas que c’était du beatbox. Quand nous sommes partis nous documenter sur la Toile que nous avons compris qu’on faisait du beatboxing sans le savoir. »
Dans cette discipline, il est parfois sympathique, d’être à plusieurs : « Il n’est pas toujours possible pour un beatboxer de produire plusieurs sons en même temps, surtout quand certaines compositions sont trop complexes. Dans ce cas, être accompagné d’un ou plusieurs beatboxers va définitivement agrémenter l’interprétation. »
Des battles seraient un très bon début pour faire connaître le beatbox à Maurice»
Par ailleurs, pour s’adonner à cet art qui émane du hip hop, il faut aussi savoir dompter sa respiration : « C’est ce qui, je pense, est le plus difficile à faire, et pour cause, puisque le beatboxing repose sur l’art de trouver un juste équilibre entre sa respiration et les sons qu’on produit », explique Mel Calou.
Une notion de la musique
Donna Kim Soo est, pour sa part, l’une des rares filles qui font du beatboxing à Maurice. « Il y a à peu près deux ans que cette discipline est devenue mon passe-temps. Cependant, ce n’est pas toujours évident. Il y a beaucoup de paramètres à observer. »
D’abord, selon Donna, il faut avoir une oreille musicale : « Je pense qu’il est important d’avoir une notion de la musique quand on s’adonne à cette discipline. Comme je suis chanteuse, cela m’a beaucoup aidée. »
Cependant, quand on pratique cette discipline on ne peut pas toujours reprendre à sa sauce tous les styles : « Certains styles, notamment le séga, sont très difficiles à maîtriser, parce qu’il y a beaucoup de basse. »
De plus, pour faire connaître le beatboxing à Maurice, il faudrait organiser des activités autour de cette discipline : « Des battles seraient un très bon début pour faire connaître le beatbox à Maurice. D’ailleurs, cela se fait déjà dans d’autres pays, » fait ressortir Mel Calou.
Un peu d’histoire
L’human beatbox (littéralement boîte à rythme humaine) serait apparu au cours des années 1970 dans le Bronx, à New York, avec l’émergence du mouvement hip hop. Il s’est développé à partir des années 1980 aux États-Unis avec des stars chez les rappeurs, comme Doug E. Fresh, Biz Markie, puis surtout Rahzel, du groupe de rap The Roots, une influence déterminante pour les jeunes beatboxers, à l’instar des Français Under Kontrol.
Cependant, la musique faite avec la bouche existe ailleurs et s’est développée bien avant l’invention du concept par les rappeurs anglo-saxons. Des artistes du jazz (Louis Armstrong, Bobby McFerrin et tous les acrobates du scat), de la chanson (André Minvielle), des pointures de salsa (le groupe cubain Sampling) ont trouvé une malle aux trésors d’onomatopées, de rythmes énervés et d’instruments les plus variés.
Le rythme en bouche, les Inuits en font leur affaire (le jeu vocal katajjaq). À Bali, le tchak-tchak-tchak haletant des voix d’hommes accompagne le Kecak (danse des singes). Les Sud-Africains Ladysmith Black Mambazo ont popularisé dans le monde le style vocal mbube, mosaïque de mélodies et rythmes vocaux. En Guadeloupe, quand les tambours leur furent interdits, les esclaves ont inventé le boulagel, des onomatopées percussives, un style qu’utilisa le collectif de rap Saïan Supa Crew.
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