Le transvasement illégal de gaz ménager dans les réservoirs de voitures, une pratique risquée mais populaire, fait des vagues. Si elle offre une bouffée d’air financier à des conducteurs, elle suscite toutefois de vives inquiétudes après plusieurs incendies liés à cette méthode. Les autorités ont décidé de serrer la vis aux opérateurs qui roulent cette économie parallèle malgré les dangers qu’elle comporte.
Une pratique clandestine en pleine expansion attire autant de conducteurs que de critiques : le transvasement (« decanting »; NdlR) de gaz ménager pour alimenter les réservoirs de voitures. Une économie parallèle qui, si elle soulage le portefeuille des automobilistes, inquiète toutefois la police et les autorités sur ses conséquences potentiellement tragiques. Cinq véhicules carburant au gaz ont récemment pris feu à travers l’île, faisant des blessés.
Les autorités s’évertuent à mettre un terme à cette pratique. Un ordre de « Special Operation » émanant des divisions régionales de la police a été émis le 8 janvier 2025, visant à intensifier la lutte contre le « decanting of liquefied petroleum gas used for domestic purposes ». En une semaine, deux opérateurs de transvasement illégal de gaz liquéfié vers des voitures ont été verbalisés dans la région de Vallée-des-Prêtres.
Le mercredi 15 janvier, le « Special Team Metro North », dirigé par le surintendant de police Sam Bansoodeb, a pris en flagrant délit un garagiste à Sophia Lane. Sur place, une voiture connectée à une bonbonne de gaz ménager attendait d’être remplie.
Le garagiste et le chauffeur de la voiture ont été arrêtés pour « conspiracy to commit an unlawful act to wit decanting of liquefied gas ». Ils ont reconnu les faits qui leur sont reprochés. Une bonbonne de gaz ménager ainsi qu’un compresseur utilisés pour le transfert de gaz ont été saisis pour les besoins de l’enquête.
Quelques jours plus tôt, soit le vendredi 10 janvier 2025, un autre opérateur, lui de Carreau Lalo, avait été épinglé par la même escouade pour des faits similaires. La scène était presque identique : une bonbonne de gaz ménager de couleur bleue renversée et connectée à un compresseur en action ainsi qu’un véhicule prêt à repartir à moindre coût. « Mo premie masinn sa. Mo aksepte mo tor », a reconnu l’opérateur.
Quand l’économie justifie le risque
Pour ces opérateurs clandestins, chaque litre de gaz transvasé représente une économie bienvenue pour leurs clients, mais aussi un risque d’incendie ou d’explosion. Pour les consommateurs, le recours au gaz ménager n’est pas un caprice, mais une nécessité dans un contexte économique tendu. « Avek enn bonbonn gaz ou kapav roul bokou kilomet. Ar lesans bokou kas ti pou ale », explique un entrepreneur qui parcourt des kilomètres chaque jour dans le cadre de son activité.
Les promesses de campagne, comme celle de réduire le prix des carburants de Rs 20, semblent bien loin, déplore-t-il. « Dan kampagn elektoral ti anonse pou bes pri lesans par Rs 20, me zot pann realiz zot promes », dit-il.
Un chauffeur de taxi opérant dans la capitale précise que son véhicule équipé d’un système à gaz a été régularisé lors de son passage dans un centre de contrôle technique : « Kan monn al fer fitness, bann ekzaminater inn konfirme ki ena rezervwar gaz. Lerla zot inn donn mwa enn papie pou al fer amand mo Horse Power dans NLTA pou mantione ki mo loto roul ar gaz. »
Cependant, il s’insurge contre la rareté du gaz liquéfié dans les stations-service : « Nou oblize al dan bann garaz ki met gaz parski enn laparey kout ser pou aste pou fer transfer la. Dan Filling inn aret vann gaz. »
Une hypocrisie pointée du doigt
Cette répression ciblée par la police suscite une vague de mécontentement. « Loto nef, taxi touris, loto prive… tou pe roul ar gaz aster. Lapolis pe anpes nou travay, selma ena bokou polisie vinn met gaz dan zot loto kot nou », allègue un opérateur de transvasement illégal, amer face à ce qu’il perçoit comme une injustice flagrante.
Si la police mène la vie dure aux opérateurs de « decanting », plusieurs automobilistes se demandent pourquoi les restaurants et snacks, qui consomment des bonbonnes à un rythme effréné, ne font pas également l’objet d’inspections rigoureuses.
« Ena snak, restoran, marsan gato pima, dholl puri, ki servi plis ki 2 bonbonn gaz par zour. Mem bann ki fer ‘waterproofing’ servi bonbonn 12 kilo. Kifer lapolis pe get 2 lizie e pa fer ‘landing’ dan sa bann plas la pou verifie zot lakwizinn ? », s’interroge Ben, un automobiliste frustré.
Une question de survie
Si certains voient dans cette pratique une simple infraction, d’autres y perçoivent un moyen de subsistance. Les opérateurs clandestins ne nient pas les dangers, mais pour eux, le véritable enjeu réside dans la survie économique. Dans une vidéo postée sur TikTok le dimanche 12 janvier 2025, l’internaute Youleburner7 pousse un véritable coup de gueule.
Il est furieux que le gouvernement ait décidé de serrer la vis aux opérateurs de transvasement : « Monn donn zot mo vot ek monn inflians bann dimounn pou donn zot vot. Nounn donn ou pouvwar. Ounn asize la. Les ou kamarad travay aster. »
Il ajoute que c’est grâce à l’utilisation du gaz ménager dans sa voiture qu’il parvient à subvenir aux besoins de sa famille : « Bann ti dimounn mizer ki vwayaz ar mwa. Eski mo bizin pran zot Rs 4,5 par ‘mile’ pou fer zot kours ? Mo bizin pran zot Rs 200 mem. Ar sa bonbonn gaz la mo ti pe kapav swagn mo fami. Sa kout la bann la aret met gaz dan loto, mo zanfan, mo mama, mo papa kouma pou manze ? », déclare le Tiktokeur dans sa vidéo.
Le dilemme des autorités
Pour le ministre du Commerce, Michael Sik Yuen, la lutte contre cette pratique n’est pas seulement une question de sécurité publique, mais aussi de justice pour les consommateurs domestiques, souvent confrontés à des pénuries de gaz. Pourtant, l’équilibre entre répression et empathie reste délicat à trouver.
Alors que la police intensifie ses efforts pour éradiquer le « decanting » illégal, les automobilistes réclament des solutions plus équitables. En attendant, l’usage du gaz ménager comme carburant reste une pratique risquée et controversée, alimentant les tensions entre autorités, opérateurs et consommateurs.
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