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Alternative : le carburant vert dans l’impasse

Michael Chan Michael Chan devant son 4×4 fonctionnant à l’huile usée.

Le biodiésel, le bioéthanol et d’autres biocarburants à la pompe, proposés comme énergies alternatives aux carburants conventionnels, sont loin d’être une réalité à Maurice. Retour sur quinze ans d’échecs.

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Le secteur du transport consomme 53,2 % de produits pétroliers, soit 506 kilotonnes du carburant importé. Pourtant, depuis 2002, on parle d’introduction de biocarburant à la pompe et d’énergies alternatives aux carburants conventionnels. Le mélange de biocarburant, huile de cuisine usée et voitures électriques tardent à décoller. La faute aux gouvernements successifs qui n’ont pas trouvé une solution viable.

Après quinze ans, un premier pas pourrait être franchi vers fin 2017. Il s’agit du projet d’introduire le biocarburant dans le pays. Le projet éthanol tarde à décoller et entre-temps plusieurs projets de carburant propre ont vu le jour, mais n’atteignent pas leur vitesse de croisière.

Pourtant, ce ne sont pas les efforts qui manquent. Sur un des dossiers, l’État piétine, depuis 2002. Il s’agit de l’éthanol. C’est la Mauritius Cane Industry Authority (MCIA) qui chapeaute le projet. Celui-ci sera ficelé vers fin novembre 2017, selon une source proche du dossier. Toutefois, il a pris du retard car le framework aurait dû être prêt, en juillet, mais les techniciens butent sur un point. Il s’agit du prix de ce mélange.

Les calculs en vue de déterminer le prix du mélange à la pompe sont en cours. Le comité responsable de ce dossier à la MCIA hésite entre  offrir le produit au même prix ou proposer un prix plus bas que le carburant conventionnel. Toutefois, tout dépendra du prix qu’offrent les distilleries, fait-on comprendre. D’ailleurs, des discussions sont engagées, affirme un des responsables du dossier. Pour le moment, le cadre légal placera le carburant mélangé à l’éthanol comme une option pour les automobilistes, au lieu d’une obligation.

Le pourcentage d’éthanol variera entre 2,5 et 5 %, selon notre interlocuteur. « Nous comptons commencer à partir de 2,5 % et hausser le taux graduellement. Si le cadre légal est prêt fin novembre, c’est vers octobre 2018 que le mélange sera disponible à la pompe », laisse-t-on entendre. 

Prix élevé

Or, le prix reste un débat éternel. Xavier-Luc Duval a été ministre des Finances sous l’ancien gouvernement, de 2011 à 2014. Il explique que ce projet ne décolle pas pour deux raisons. D’une part, le choix du prix du carburant à la pompe rendait la tâche difficile aux décideurs et de l’autre, la mise en œuvre pose problème. Les débats portaient sur l’imposition du mélange contre une introduction optionnelle. «Aucune solution n’avait été trouvée et c’est pour cette raison que l’introduction du biocarburant est restée au point mort », souligne le leader de l’opposition.

Les voitures électriques n’ont pas la cote non plus. Notre parc automobile compte 519 265 véhicules, dont 263 145 voitures. De ce nombre, 38 véhicules sont électriques. Très peu, selon le ministre de l’Environnement, Étienne Sinatambou. Il est intervenu mardi, au parlement, à ce sujet. Le ministre a d’ailleurs affirmé que le prix des véhicules est très élevé et demeure un obstacle aux véhicules propres. Des comités ont d’ailleurs été institués pour travailler sur l’introduction d’un parc automobile moins  polluant.

Outre l’éthanol, d’autres projets alternatifs à l’essence ont été introduits ces dix dernières années. Parmi eux, le projet conjoint du Mauritius Research Council (MRC) et du garage Chan. Il y a aussi l’introduction de l’autogas, où Vivo Energy a été le premier à introduire cette technologie à travers les stations-service Shell. Michael Chan a voulu remplacer le diesel par l’huile de cuisine usée. Toutefois, il s’est heurté à plusieurs obstacles et n’a pu modifier que 25 véhicules en 11 ans. Quant à Vivo Energy, l’introduction du gaz dans les voitures a occasionné un business parallèle et illégal : celui de l’utilisation du gaz ménager pour alimenter les voitures. La majorité des utilisateurs préfère, donc, se diriger vers le marché noir.


L’huile usée ne trouve pas preneur

Depuis 2009, un tracteur roule à l’huile de coco à Agalega. C’est un projet initié par Michael Chan, propriétaire de Chan Garage. Malheureusement, son projet n’a pas décollé. Il n’a modifié que 25 véhicules, de 2006 à ce jour.  Michael Chan raconte qu’il a commencé à modifier des moteurs diesel en 2006. Il importait des pièces de Chine qui permettaient aux véhicules de rouler aux huiles végétales ou aux huiles de cuisson usées (chute de cuisine). Il est arrivé en troisième position d’une compétition organisée par le National Productivity and Competitiveness Council (NPCC), en 2006.  Le Mauritius Research Council (MRC) a aidé Michael Chan à affiner ses recherches et ce dernier a fini par modifier des véhicules de certains hôtels et usines. Mais il a dû arrêter pour trois raisons : manque d’encadrement, pénurie de ressources (huiles usées) et absence d’engouement de la part du public. « À ce jour, les 25 véhicules roulent toujours. Pourtant, les examens effectués en Afrique du Sud avaient révélé que les huiles de cuisson usées polluent deux fois moins que le diesel », affirme le gérant de Chan Garage.


Swaley Kasenally parle de manque de volonté

Swaley Kasenally, ancien ministre de l’Energie, est très critique envers les différents gouvernements. « Il y a eu un manque de volonté de la part des gouvernements successifs. Depuis 1980, je parle du biocarburant et il est temps pour moi de me taire », dit l’ancien ministre. Il affirme qu’outre les annonces budgétaires et le souhait des divers gouvernements, aucune loi n’est venue instaurer l’utilisation du biocarburant. « Nous produisons plus de 20 millions de litres d’éthanol par an, il suffit d’introduire la loi pour imposer un mélange de 5 % ou de 10 % », explique Swaley Kasenally. Il affirme que l’obstacle principal est la volonté politique.


Omnicane exporte en attendant le cadre légal

Cette firme productrice d’éthanol génère 80 000 litres de ce produit par jour. Soit 25 millions de litres par an. Celle-ci est prête à fournir le pays, selon Jacques d’Unienville, directeur de la compagnie. Mais en attendant il exporte son produit.  Il convient de rappeler que la distillerie Alcodis Ltd a débuté ses opérations, en 2003, à Rose-Belle. Éprouvant des difficultés, l’unité a été transférée à La Baraque, en 2012 et a relancé ses opérations sous la bannière d’Omnicane, en 2014.

Quatre stations fournissent le gaz aux automobiles

Ravi Ramjus, B2B Manager chez Vivo Energy Mauritius, affirme que le gaz (Shell Autogas) est une énergie propre. Vivo Energy Mauritius encourage son utilisation dans les véhicules aussi bien que dans les foyers. « C’est pour cette raison que nous continuons nos opérations de remplissage dans quatre de nos stations-service. »  À ce jour, Vivo Energy est la seule entreprise à fournir ce service aux automobilistes. « Toutefois, pour des raisons purement économiques, certains automobilistes font fi non seulement de la loi, mais aussi du danger en transvasant le gaz ménager dans des voitures. Ces transvasements ont déjà causé des accidents faisant des victimes. Des cas continuent à être répertoriés. »

 

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