Suite à la liquidation de la Bramer Banking Corporation Limited (BBCL) le 3 avril 2015, 14 arrestations ont été effectuées. Cette affaire a également donné lieu à de nombreuses actions judiciaires, intentées aussi bien par que contre l’ancien propriétaire du groupe British American Investment (BAI), Dawood Ajum Rawat, ainsi que ses filles, Laina Rawat et Adeela Rawat-Feistritzer.
Après la révocation du permis d’opération de la BBCL
Une demande d’autorisation pour une révision judiciaire
Le 8 mai 2015, Abdul Cader Ajum Rawat, actionnaire de la Bramer Banking Corporation Limited (BBCL), a fait une demande d’autorisation pour une révision judiciaire de la décision de la Banque de Maurice (BoM) de révoquer le permis d’opération de l’institution. Il soutient qu’il n’y a aucune raison qui justifie le transfert des actifs de la BBCL pour un montant nominal d’une roupie et réfute que ce transfert est « illégal ». La BoM a agi « contre les règles de justice naturelle et les attentes légitimes de la BBCL ».
Selon lui, les incohérences notées entre les raisons invoquées pour justifier la révocation du permis d’opération de la BBCL et la succession d’événements connus par les parties concernées et le public démontrent « la mauvaise foi » de la BoM qui a, selon lui, dissimulé les véritables raisons de son action. La décision de la BoM est, selon Abdul Cader Ajum Rawat, « arbitraire et irrationnelle ». Il est d’avis qu’il y a « abus de pouvoir ».
Procès contre deux administrateurs judiciaires
Laina Dawood Rawat est contre le fait que les deux administrateurs judiciaires aient eu accès aux livres, documents et comptes de la BBCL. Elle a logé une action devant la Cour commerciale. Selon la fille de Dawood Rawat, Robert Marie André Bonieux et Mushtaq Oosman ne devraient pas pouvoir s’ingérer dans les affaires de la BBCL, disposer de ses livres, de ses données et de ses actifs, divulguer et faire usage de ses informations.
Elle souligne que les deux administrateurs ont décidé de placer 80 % des comptes gérés par la BBCL à la National Commercial Bank (NCB) et de ne garder que 20 % des actifs à la BBCL. Pour elle, cette décision est « irrationnelle » et « les actionnaires et les clients n’étaient pas au courant de cette décision ». Elle ajoute que les deux administrateurs judiciaires ont licencié des employés de la BBCL sans aucune raison valable. Selon elle, Robert Marie André Bonieux et Mushtaq Oosman n’agissent pas dans l’intérêt de la compagnie.
Réclamation pour endettement
La State Bank of Mauritius (SBM) réclamait Rs 137 497 132,65 à Dawood Rawat. Dans l’ébauche de sa plainte, la SBM dit avoir accordé un prêt et des découverts totalisant Rs 50 millions à Dawood Rawat. Il bénéficie aussi d’une carte de crédit avec un plafond de Rs 1 million. La banque affirme que Dawood Rawat a cessé de rembourser ces facilités.
Au 31 juillet 2019, ce dernier lui devait Rs 156 378 145, intérêts compris. Pour rappel, les avoirs de Dawood Rawat à Maurice ont été gelés, le 18 avril 2015, sur ordre du juge des référés. Les ordres de gel ont toutefois expiré le 18 avril 2019. L'ex-patron du défunt groupe BAI a invoqué une vendetta politique contre lui et ses entreprises à Maurice. Ce qui fait qu’il a été incapable de rembourser des dettes.
Rs 15 M de dommages à deux anciens administrateurs
Laina Rawat réclame Rs 15 millions de dommages au tandem Bonieux/Oosman pour préjudices subis devant la Cour suprême. Elle affirme que les anciens administrateurs ont commis une « faute » à son égard pour avoir failli à respecter une dérogation accordée par la Cour suprême, l’autorisant à faire des retraits mensuels de Rs 100 000. Ses avoirs gelés, elle a été autorisée à toucher ce montant pour subvenir à ses besoins. Il a fallu la nomination de Gérard Lincoln comme administrateur de la BBCL pour qu’elle puisse enfin toucher la somme promise. Aussi, elle que avance Gérard Lincoln a fait débloquer Rs 300 000 le 24 décembre 2015. Pour elle, le tandem Bonieux/Oosman a failli à l’informer du transfert de ses épargnes de Rs 14 millions, vers un compte à la MauBank. Elle a dû entrer une affaire en justice pour savoir où se trouvent ses économies.
Suivant les séquelles de l’affaire BAI, les procès en diffamation se sont poursuivis et les procès sont toujours en cours
- Adeela Rawat-Feistritzer et son époux Claudio Alejandro Salvador Feistritzer réclament chacun des dommages de Rs 100 millions. La plainte est dirigée contre l’Etat, le Commissaire de police et l’ancien Deputy Commissioner of police (DCP), Heman Jangi. Le couple invoque des pertes lourdes et des dommages pour préjudices subis.
- Allégation d’abus de pouvoirs. Le gendre de Dawood Rawat, Brian Burns réclame Rs 40 millions de dommages. Cet ancien Chief Executive Officer (CEO) d’Iframac a dirigé son action contre l’État, le Commissaire de police et l’ancien DCP Jangi. Il invoque un abus de pouvoirs de la part de la police autour de son arrestation dans l’enquête policière sur les irrégularités alléguées du groupe BAI/Bramer.
- Laina Rawat, quant à elle, réclame des dommages de Rs 75 millions à l’État, au Commissaire de police et à l’ex-DCP Jangi. Elle déplore « le traitement dégradant » subi depuis la chute du groupe que dirigeait son père Dawood Rawat.
- L’ancien président du Credit Committee de la défunte Bramer Bank, Hassam Vayid (GOSK) a déposé une plainte en Cour suprême réclamant des dommages de Rs 30 millions pour arrestation arbitraire. Sa plainte est dirigée contre l’État, le Commissaire de police, l’ex-DCP Jangi et l’ancien assistant-Commissaire de police Nemraj Dayal, le chef inspecteur Pooran Jeeavoo, l’inspecteur Sanjay Dussoye et le sergent Nabeebaccus.
- Nelly Marie Isnelle Jirari, ancienne directrice générale de la Banque des Mascareignes, évoque une « faute lourde » pour des préjudices subis suite à son arrestation dans le sillage de l’affaire British American Insurance (BAI) en octobre 2015. Elle a dirigé son action contre l’État, le CP et le ministère de la Bonne gouvernance et des Services financiers. Elle leur réclame conjointement des dommages de Rs 40 millions.
- L’ancien membre du Credit Committee de la défunte Bramer Banking Corporation Limited, Yatemani Gujadhur réclame des dommages de Rs 30 millions à l’État et à six policiers : le Commissaire de police, l’ex-DCP Heman Jangi, l’ancien assistant Commissaire de police Nemraj Dayal, le chef inspecteur Pooran Jeeavoo, l’inspecteur Sanjay Dussoye et le sergent Nabeebaccus. Yatemani Gujadhur dit avoir été injustement arrêté dans le sillage de l’enquête sur le prêt de Rs 40 millions accordé à Navin Ramgoolam pour l’acquisition de son campement à Roches-Noires.
Ceux qui avaient été arrêtés, inculpés et exonérés de toute blâme
Quatorze personnes ont été arrêtées dans le sillage de l’éclatement de l'ex-British American Insurance (BAI). Par la suite, les accusations provisoires retenues contre elles ont été rayées. Parmi ces personnes figuraient l’actuel Premier ministre, Navin Ramgoolam, ainsi que les deux filles et les gendres de Dawood Rawat : Laina Rawat et son époux Brian Bruns, ainsi qu’Adeela Rawat-Feistritzer et son époux Claudio Alejandro Salvador Feistritzer.
- Brian Burns, ancien Chief Executive Officer (CEO) d'Iframac, faisait face à quatre accusations, notamment d'utilisation frauduleuse des biens de la compagnie, d'entente délictueuse, de blanchiment d'argent et de faux témoignages. Les accusations provisoires contre lui ont été rayées fin avril 2017.
- Les filles de Dawood Rawat, Laina et Adeela, ainsi que l’époux de cette dernière, Claudio Feistritzer, ont également vu les accusations provisoires retenues contre eux être rayées.
- Les accusations d'utilisation frauduleuse des biens de la compagnie, de blanchiment d'argent et d'entente délictueuse ont également été rayées à l'encontre de Rishi Sookdawoor, ancien CEO de British American Insurance. Ce dernier était soupçonné d’avoir facilité un transfert fictif de Rs 3,6 milliards vers un compte de la Banque des Mascareignes au nom de l'ex-BAI.
- L’ancienne directrice générale de la Banque des Mascareignes, Nelly Marie Isnelle Jirari, avait été arrêtée en octobre 2015 et inculpée sous une accusation provisoire de complot. Elle était soupçonnée d’avoir autorisé un transfert de Rs 3,6 milliards vers la BAI. Le 19 avril 2017, cette accusation provisoire a été rayée à son encontre.
- Lobine Unmole, ancien numéro 5 de la Banque des Mascareignes, et Jean Jacques Fung Wah Heen Fah, ancien Relationship Manager de l’établissement bancaire, ont aussi vu l’accusation provisoire de « conspiracy to make a false entry in a statement of account » être rayées contre eux.
- Les deux accusations provisoires contre Iqbal Mallam-Hasham ont également été rayées. Cet ancien directeur de la State Investment Corporation (SIC) avait été arrêté en mai 2015 à la suite d’une enquête de l'Independent Commission Against Corruption (ICAC) dans le cadre de l'affaire Bramer House. Iqbal Mallam-Hasham répondait de l’infraction de « public official using his office for gratification » et de blanchiment d'argent.
- L’actuel Premier ministre, Navin Ramgoolam, a pour sa part vu l'accusation provisoire de faux être rayée en septembre 2016.
- Jaya Allock, ex-CEO de Bramer Asset Management Ltd, qui était accusée provisoirement d’entente délictueuse en vue de commettre une fraude, a vu l'accusation provisoire retenue contre elle être rayée en octobre 2016.
- L’accusation provisoire de « conspiracy to defraud » retenue contre les deux ex-cadres de l’ex Bramer Bank, Hassen Vayid et Yatemani Gujadhur, a été rayée le 15 février 2016. Ils étaient accusés d’avoir accordé un prêt de Rs 40 millions à Navin Ramgoolam pour l’achat du campement de Roches-Noires.
- Shivananda Mootien, ancien membre du « board » de l'ex-Bramer Bank, a vu l'accusation provisoire d’entente délictueuse contre lui être rayée, le 3 mars 2016. Il avait été arrêté le 27 octobre 2015 dans le cadre de l’enquête sur le prêt de Rs 40 millions accordé à l’actuel Premier ministre Navin Ramgoolam, alors que ce dernier ne répondait pas aux critères requis.
Affaire Britam : le rapport contesté par révision judiciaire
Les conclusions du rapport Britam sont contestées par plusieurs parties. Parmi les contestataires, on trouve l’avocat et leader du Reform Party, Roshi Bhadain, l’ancien ministre de la Bonne gouvernance et des Services financiers, Akilesh Deerpalsingh, ancien conseiller dudit ministère, la firme d’expertise comptable BDO & Co Ltd, son Managing Partner Yacoob Ramtoola, ainsi qu'Afsar Ebrahim, l’ancien Deputy Group Managing Partner de la firme, le ressortissant kenyan Sandeep Raghunath Khapre et BDO East Africa Advisory Services Ltd.
Ces derniers ont obtenu l’autorisation de la Cour suprême pour contester les conclusions du rapport Britam. Leur demande est dirigée contre le président de la commission d’enquête, l’ex-juge Bushan Domah, ainsi que ses deux assesseurs, Sattar Hajee Abdoula et Imrith Ramtohul.
Le rapport a été rendu public le 27 juillet 2021. Il porte sur la vente de 23 % des actions détenues par l'ex-British American Investment (Mauritius) Co Ltd dans Britam Holdings Ltd (Kenya). La commission d’enquête devait se pencher sur les circonstances de cette vente, effectuée par les administrateurs spéciaux Yacoob Ramtoola et Georges Chung, à Peter Munga et d'autres investisseurs au Kenya pour la somme de Rs 2,4 milliards. Ce choix a été fait alors qu'une offre de Rs 4,3 milliards avait été faite par MMI Holdings Ltd d’Afrique du Sud.
Le rapport avait recommandé des enquêtes pour délits de faux et usage de faux, entre autres, à l'encontre de plusieurs personnes.
Annulation de quatre paragraphes du rapport Britam : La requête de Me Thierry Koenig agréée par la Cour
Le 5 septembre 2024, ENSafrica (Mauritius) et son directeur, Me Thierry Koenig, ont remporté une victoire devant la Cour suprême, qui a ordonné l’annulation de quatre des six paragraphes contestés du rapport de la Commission d'enquête sur l’affaire Britam. Me Koenig a expliqué que sa firme avait été engagée en 2015 pour des services professionnels évalués à Rs 2 millions. Il a contesté une conclusion du rapport affirmant que sa firme aurait réclamé Rs 1 million pour des travaux non effectués, la qualifiant de « fausse et sans fondement ». La Commission avait argué qu’il s’agissait seulement d’observations, mais la Cour suprême a jugé celles-ci contraires aux principes de justice naturelle et a ordonné leur suppression.
Dawood Rawat évoque une attaque planifiée pour démanteler son groupe
Neuf ans après les évènements qui ont conduit à l’effondrement de son groupe en 2015, Dawood Rawat, ancien magnat du groupe British American Investment, réclame des dommages de Rs 22 milliards devant la cour commerciale de la Cour suprême.
Il conteste les allégations selon lesquelles le British American Investment (BAI) aurait fonctionné comme un système de Ponzi. Dawood Rawat, magnat des affaires et bénéficiaire ultime (ultimate beneficial owner) du groupe BAI et de ses filiales, a saisi la cour commerciale, le 1er novembre 2024, pour réclamer des dommages de Rs 22 milliards. Sa plainte, rédigée par l’avoué Gilbert Noël, est dirigée contre la Banque de Maurice, la Financial Services Commission, le cabinet de conseil et d’audit PricewaterhouseCoopers (PwC) et trois associés de PwC : André Bonieux, Mushtaq Oosman et Yogesh Rai Basgeet. Ces derniers sont cités dans la plainte comme défendeurs. Dawood Rawat les accuse d’avoir agi de « mauvaise foi » pour démanteler son groupe.
Pour Dawood Rawat l’allégation de « Ponzi scheme » a surtout été utilisée pour justifier les actions du gouvernement sortant et pour discréditer son groupe. Ce qui a causé des torts irréparables à sa réputation et à sa carrière professionnelle. Or, dit-il, malgré la « gravité » de cette accusation, « aucune preuve » n’a été fournie pour étayer cette thèse de fraude.
Faits marquants
Dawood Rawat, qui détient la citoyenneté mauricienne et française, affirme être le bénéficiaire ultime du groupe BAI et de ses filiales, dont Bramer Banking Corporation Ltd (BBCL). Il indique que la révocation de la licence bancaire de BBCL le 2 avril 2015, suivie de la vente des actifs du groupe pour des sommes dérisoires, constitue une « attaque planifiée et politique à son encontre ». Ces actions ont causé « des pertes financières importantes, ont terni sa réputation à l’échelle internationale et ont empêché toute possibilité de redressement pour son groupe », fait-il observer.
Changement de régime
Il relate dans sa plainte que l’affaire remonte à 2014, lorsque des amendements législatifs ont imposé des limites strictes aux transactions entre parties liées pour les compagnies d’assurance. Selon Dawood Rawat, le groupe BAI, bien que conforme à ces nouvelles règles, a été « ciblé de manière injuste ». C'était après un changement de régime politique en décembre 2014.
Il évoque des retraits massifs, orchestrés par des organismes publics et des personnalités liées au nouveau gouvernement. Ce qui aurait provoqué une crise de liquidité artificielle au sein de BBCL. En parallèle, il accuse les autorités d’avoir divulgué des informations confidentielles et de s’être appuyées sur des rapports « biased » pour justifier leurs actions.
Somme symbolique de Re 1
Dawood Rawat estime que la révocation de la licence de BBCL était injustifiée. Il déclare que la BBCL avait été classée dans une situation satisfaisante selon le système de notation CAMEL quelques mois auparavant.
Il ajoute que malgré les efforts du groupe pour renforcer sa situation financière, la licence a été révoquée de manière précipitée. Le même jour, dit-il, dans sa plainte, une nouvelle banque, soit la National Commercial Bank Ltd, a été créée et a reçu la majorité des actifs de BBCL pour la somme symbolique de Re 1, sans évaluation préalable.
Vente controversée des actifs
Dawood Rawat critique également la gestion des administrateurs spéciaux nommés par la FSC pour superviser les compagnies du groupe BAI, notamment BAI Co. (Mtius) Ltd.
Selon lui, les administrateurs ont vendu des actifs de grande valeur, comme les actions de Britam Holdings Ltd au Kenya, pour une fraction de leur valeur réelle. Il évoque que des acheteurs potentiels avaient proposé Rs 4,3 milliards pour ces actions, mais qu'elles ont finalement été vendues pour Rs 2,4 milliards.
Dawood Rawat dénonce aussi des « attaques personnelles » contre lui et sa famille. Ses filles et ses gendres ont été arrêtés, ses comptes bancaires internationaux ont été bloqués, et il a été visé par un mandat d’arrêt émis par Interpol, finalement annulé en 2019 pour des raisons politiques.
Dawood Rawat accuse le gouvernement de l’époque d’avoir orchestré ces attaques pour des raisons politiques : son amitié avec l’actuel Premier ministre Navin Ramgoolam.
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